Images de page
PDF
ePub

la pureté des motifs qui l'avoient déterminé à entreprendre une mission en Irlande. Cet ouvrage, qui respire la piété la plus tendre, est plein de bon sens, d'esprit, et même de feu; on y voit que l'auteur avoit une humilité profonde, qu'il soupiroit ardemment après le martyre, et qu'il étoit parfaitement versé dans la connoissance de nos divines écritures. Partout saint Patrice y fait l'aveu de ses fautes (h), et y loue la grande miséricorde du Seigneur, dont il avoit si souvent éprouvé les effets, préférablement à plusieurs autres qui en auroient été moins indignes que lui. Il reconnoît qu'il avoit eu plusieurs tentations, dont une des plus délicates avoit été un grand désir de retourner dans son pays, et d'aller dans les Gaules visiter les Saints qu'il y connoissoit; mais il ajoute qu'il surmonta cette tentation par la crainte de perdre le fruit de ses travaux en abandonnant son peuple, et parce que le SaintEsprit lui déclara intérieurement que Dieu ne vouloit pas qu'il sortit de l'Irlande. Il dit que quelque temps avant d'écrire sa Confession, il fut arrêté avec ceux qui l'accompagnoient; qu'on lui enleva tout ce qu'il avoit, et qu'on le retint quatorze jours dans les fers, pour avoir baptisé le fils d'un roi contre la volonté de son père. Chaque jour, continue-t-il, je m'attendois à de pareils traitemens, et même au martyre; mais je ne redoutois aucun danger, parce que mon espérance étoit dans le ciel, et que je me jetois avec confiance dans les bras du Tout-puissant: aussi traduction; peut-être aussi que le long séjour du Saint en Irlande, pendant sa captivité et après son ordination, l'empêcha de cultiver cette partie de la littérature qui a pour objet la politesse du langage. Il étoit en récompense très-versé dans la science des Saints.

(h) C'est pour cela que cet ouvrage a le titre de Confession.

ne craignit-il point d'augmenter le nombre de ses ennemis, en donnant le baptême à une jeune fille de qualité, très-belle, et en âge d'être mariée. Quelques jours après, cette fille vint lui dire qu'un ange lui avoit ordonné de faire le sacrifice de sa virginité, afin de devenir plus agréable aux yeux de Dieu. Il en rendit grâces au Seigneur, et reçut lui-même les vœux de cette épouse de Jésus-Christ, six jours seulement avant qu'il insérât ce fait dans sa Confession.

Notre saint missionnaire tint plusieurs conciles pour établir nne bonne discipline dans l'église dont il étoit le fondateur, et nous avons les actes authentiques du premier (i). Les canons qu'on y trouve ont pour objet divers règlemens pleins de sagesse, et qui concernent principalement la pénitence. On croit, d'après saint Bernard et la tradition du pays, que le Saint fixa son siége primatial à Armagh. Il paroît par les actes de son concile, et par d'autres anciens monumens, qu'il ordonna des évêques pour l'Irlande.

Nous omettons plusieurs particularités de sa vie, rapportées par ses historiens, ou parce qu'elles ne sont pas assez certaines, ou parce qu'elles sont peu essentielles; nous ajouterons seulement les faits suivans. Saint Patrice osa, la première année

(i) Quant au second concile qui porte le nom de S. Patrice, il paroit qu'on doit l'attribuer à son neveu. On trouve dans le Spicilège de D. d'Achéry, et dans les Anecdota de D. Martène, t. IV, part. 2, plusieurs canons qui portent aussi le nom de saint Patrice; mais ils sont de quelques-uns de ses successeurs. Voyez Wilkins, Conc. Britan. et Hibern. t. I, p. 3.

Le traité des douze Abus, pubiié parmi les ouvrages de S. Augustin et de S. Cyprien, est attribué à S. Patrice dans d'anciens monumens, et sur-tout dans un recueil d'ordonnances ecclésiastiques qu'Arbedoc fit en Irlande dans le huitième siècle. Le style de cet ouvrage est élégant; ce n'est peu-etre qu'une traduction d'un original irlandais. Ware publia les œuvres de saint Patrice à Londres, en 1658, in-8.o Tome III.

A *

de sa mission, prêcher Jésus-Christ au milieu de l'assemblée générate des rois et des états de toute l'Irlande, qui se tenoit tous les ans à Tarah ou Themoria, dans la province de l'East-Meath. C'étoit là que résidoit le principal roi, appelé monarque de toute l'île. La ville de Tarah étoit encore la principale demeure des Druides, et comme le chef-lieu de la religion du pays.

Le fils de Neill, qui étoit alors monarque, se déclara contre le Saint et contre la doctrine qu'il annonçoit; mais cela n'empêcha pas le fruit de ses discours. Plusieurs princes se convertirent, entre autres le père de saint Benin ou Bénigne, qui fut le successeur immédiat de saint Patrice sur le siége d'Armagh leur conversion fut suivie de celle des rois de Dublin, de Munster, et des sept fils du roi de Connaught. Enfin le ciel répandit des bénédictions si abondantes sur les travaux de Patrice, qu'il eut, avant sa mort, la consolation de voir presque toute l'Irlande adorer le vrai Dieu.

:

Il fonda trois monastères, dont l'un étoit à Armagh (k), et remplit l'Irlande d'églises, et d'écoles où la piété et les bonnes études fleurirent longtemps. Ces écoles devinrent si célèbres, que les étrangers y accoururent de toutes parts durant plusieurs siècles; et l'Irlande, que les autres peuples avoient traitée de pays barbare, fut comme le rendez-vous général de tous ceux qui vouloient cultiver leur esprit par les sciences, et se former aux maximes d'une haute perfection.

Saint Patrice mourut en paix vers l'an 464, et fut enterré à Down en Ultonie, dans une église qui depuis prit son nom (). On y trouva son

(k) Le second s'appeloit Domnach-Padraig, c'est-à-dire P'église de saint Patrice et le troisième, Sabhal-Padraig. (4) On lit dans l'histoire des Bretons par Nennius, qui étoit

corps en 1185. Sa fête est marquée au 17 Mars dans le martyrologe de Bède et dans plusieurs autres martyrologes fort anciens. Sa mémoire a toujours été en grande vénération dans l'église d'Irlande (m). On est étonné en considérant les fruits merveil leux que produisirent autrefois les prédications de saint Patrice et des autres hommes apostoliques; et cet étonnement augmente encore, lorsque l'on réfléchit sur le peu d'utilité que l'on retire aujourd'hui du ministère de la parole. Cette différence vient sans doute de ce que les auditeurs de notre abbé de Bangor en 620, que le vrai nom de notre Saint étoit Maun, et qu'il ne prit celui de Patrice qu'après son sacre. Cet auteur rapporte plusieurs miracles opérés par saint Patrice durant le cours de ses missions. Voyez son histoire de Bretons publiée par le savant Thomas Gale, c. 55, 56, 57, 58, 61.

(m) C'est une tradition populaire en Irlande, que S. Patrice, par sa bénédiction, délivra cette île de toute espèce de bêtes venimeuses; du moins est-il certain qu'on n'y en voit aucune, non plus que dans les îles d'Yviça et de Malte.

Il paroît que le bâton de Jésus, sur lequel les historiens irlandais ont débité tant de merveilles, n'étoit autre chose que le bâton pastoral de S. Patrice et des premiers archevêques d'Armagh. On le gardoit anciennement dans cette ville: mais il étoit à Dublin en 1360, comme nous l'apprenons de Ralph Higden. Voyez son Polichronicon, publié par M. Gale.

Le purgatoire de S. Patrice, dont Denys le chartreux et plusieurs autres écrivains ont dit tant de choses fausses, comme Bollandus l'a démontré, étoit une caverne située dans une petite île du lac Dearg, sur les frontières du comté de Fer managh dans l'Ultonie. Le pape fit fermer cette caverne en 1497 , pour arrêter le cours de certains contes superstitieux qui prenoient parmi le petit peuple; mais on la rouvrit peu de temps après. Elle fut fermée une seconde fois par l'ordre de Henri VIII. On ne laissa pas de la visiter encore pour y prier et y pratiquer les austérités de la pénitence, à l'imitation de saint Patrice et de plusieurs autres Saints, qui se retiroient souvent dans ce lieu et dans des endroits écartés pour y vaquer plus librement aux exercices de la contemplation. On ne peut donner le titre de superstitieuses aux personnes qui s'en tiennent là; mais les premiers pasteurs n'en sont pas moins obligés à la vigilance. On sait de quoi le petit peuple est capable, et combien il est facile qu'il abuse de ces sortes de dévotions. Voyez Bollandus, Tillemont, p. 787; Allemand, Hist. mon. d'Irlande, et Tiers, Hist. des supers. t. IV.

temps ne sont pas dans les mêmes dispositions que ceux des premiers siècles, c'est-à-dire, de ce qu'ils entendent la parole de Dieu, sans avoir un vrai désir d'en profiter: mais ne doit-on pas aussi s'en prendre aux prédicateurs? Il en est qui composent des sermons avec autant d'art que d'esprit, et qui possèdent dans un degré supérieur le talent de charmer les oreilles par les beautés de l'éloquence. A la bonne heure, qu'ils fassent usage de de tous ces moyens; Dieu ne les réprouve point, pourvu qu'ils soient rapportés à sa gloire : le mal heur est qu'ils ne pensent point assez à ce qu'il y a de plus essentiel, à acquérir les dispositions saintes où étoient les hommes vraiment apostoliques. Jamais Dieu ne bénira leurs tra▾ vaux, à moins qu'ils ne deviennent des hommes d'oraison, qu'ils n'agissent par des motifs purs qu'ils n'allument l'amour divin dans leurs cœurs par la méditation fréquente des vérités éternelles, qu'ils ne soient embrasés de zèle pour le salut des ames, qu'ils n'aient une grande défiance d'eux-mêmes et de leurs lumières, qu'ils ne s'appliquent continuellement à mourir au monde et à tous les désirs de la nature corrompue, qu'ils ne vivent dans la pratique d'un recueillement perpétuel, qu'ils ne travaillent enfin à se perfectionner de plus en plus dans la science des Saints.

S. JOSEPH D'ARIMATHIE.

SAINT JOSEPH, dit d'Arimathie, du nom de la ville où il avoit pris naissance, étoit membre du sanhedrin des Juifs. Nous lisons dans l'évangile que c'étoit un homme juste, et du nombre de ceux qui attendoient le royaume de Dieu. Il n'avoit point consenti à tout ce que les Juifs avoient entre

« PrécédentContinuer »