Et l'on ne doit pas s'estonner de trouver ainfi dans des escailles d'huistres des vers qui les percent, puisque nous voyons dans les cabinets des curieux des branches de corail toutes mangées de vers, & les plus beaux coquilages percez comme du bois vermoulu. Ce fera donc à vous à nous confirmer fi ce font veritablement des vers qui luifent, ou fi c'eft feulement quelque matiere gluante, & il faut en fuite de cette decouverte examiner bien foigneusement ce que c'est qui reluit la nuit dans les écailles de plusieurs poiffons, fi ce font de mefme quelques vers, ou seulement quelque matiere visqueufe. Je ne fçay fi vous n'aurez pas veu ce que dit Kircher des huistres & d'autres poiffons dans les chap. 6. & 7. du 1. livre de Magia lucis & umbra, &c. Autre Extrait d'une Lettre escrite par M. de la Voye à M. Auzcut du 31. Mars, 1666. J E n'ay pû respondre plustost à celle que vous m'avez fait la grace de m'efcrire touchant les versluifans qui se rencontrent dans les huiftres, que vous n'avez pû encore bien examiner; par ce que j'attendois de jour à autre des huistres fraisches, afin d'examiner encore cette matiere, commeje le fis hier dans plus de vingt douzaines d'huistres, que je fis ouvrir à la chandelle & à l'obfcurité. Pour Pour fatisfaire donc à vostre lettre, je vous diray que des vers luisans que j'ay pû voir, les uns font gros comme un petit fer d'éguillette, & longs de 5. ou 6. lignes, les autres gros comme une groffe epingle, & de 3. lignes de longueur, & les autres beaucoup plus menus & plus courts. Pour ce qui est des especes, je n'en ay remarqué de luisans que de trois especes. Les uns blanchastres & qui ont les pieds comme je vous les ay décrits, sçavoir 25. ou environ de chaque costé, qui font fourchus. Ils ont une tache noire d'un costé de la teste, qui me semble un crystalin. Ils ont le dos comme une anguille écorchée. Les autres font tout rouges & semblables à nos vers luisans que l'on trouve sur la terre, avec des replis sur le dos, ils ont les pieds comme les precedens, le museau comme un chien, & un œil, ce me semble, d'un costé de la teste; ce que je juge par le moyen d'une petite tache noire qui ressemble à un crystalin. Les autres font de couleur bigarrée, & ont la teste faite comme celle d'une fole, & plusieurs tousses de barbillons blanchastres aux costez qui dérivent d'une mesme tige, comme si on avoit amassé plusieurs petites touffes de poil de pourceau. Je ne doute point qu'il n'y en ait de plusieurs autres especes: mais je n'ay veu que ⚫ ceux là de luifans. J'en ay veu d'autres fort gros qui font grifastres, la teste groffe. avec deux cornes comme un limaçon, & sept ou huit petits pieds blanchastres de chaque costé, qui occupent le quart de leur longueur, & le reste du corps en tirant vers la queuë est sans pieds. Ils font longs de 8. ou 9. lignes; mais quoy que je les aye gardés la nuit, ils ne luisent point. Ces deux premieres especes de vers font d'une matiere qui se corrompt facilement. Ils se resoudent en une matiere gluante & aqueuse à la moindre secousse ou au moindre attouchement, & cette matiere tombant de l'escaille quand on la secouë, s'attache mesme aux doigts, & y luit l'espace de 20. secondes: Et fi quelque petite partie de cette matiere en secoüant fortement l'efcaille est lancée à terre, il semble que c'est un petit morceau de souffre enflammé, & comme elle est lancée avec vitesse, elle devient comme fune petite ligne luifante, qui est dissipée auparavant que de tomber å terre. Ces matieres luisantes sont de differentes couleurs, les unes blanchastres & les autres rougeastres. Elles produisent neantmoins toutes deux une lumiere qui paroift violette à mes yeux. Il est quasi impoffible de pouvoir examiner ces vers entiers. Car au moindre attouchement ils se crevent, & fe refoudent en une humeur gluante, peuteftre comme celle que vous avez observée; de forte qu'on ne les peut avoir que par Far parcelles, & n'estoit ces petits pieds que l'on apperçoit dans quelque petite portion de leur matiere, on ne jugeroit pas que ce fust des vers; & depuis le premier que j'ay veu & dont je vous ay donné la description, je n'en ay pû attraper d'entiers, mais seulement des parcelles. Les autres, tant petits que grands, tant rougeastres que blanchastres que j'ay veu entiers, n'ont point jetté de lumiere. Neantmoins puisque dans la partie de la matiere blanchastre qui luisoit, j'y ay trouvé des petits pieds semblables à ceux des vers entiers blanchastres, ce doit estre, се me semble, une chose constante, que ces vers luisent, quoy que je n'en aye pas veu d'entiers luisans. Pour ce qui est des rouges, puisque j'en ay veu un entier qui luisoit, cela est sans difficulté. Touchant le lieu de leur corps où paroist cette lueur, cela est assez difficile à determiner, ayant de la peine à en avoir d'entiers. Dans celuy pou rtant que j'ay veu, elle paroissoit de toute fa longueur. J'en ramaslay deux qui devoient estre d'une matiere un peu plus folide que les autres, parce qu'ils ne s'écraferent pas, lesquels reluisoient de toute leur longueur. Quand ils tomberent de l'huistre, ils étinceloient comme une grande étoile qui brille bien fort, & envoyoient des brandons de lumiere violette par reprise l'espace de 20 fecondes ou environ. Je croy que ces scintillations venoient, de ce qu'estant vivans, & tantost levant la teste, tantost la queue, comme une carpe, la lumiere augmentoit & diminuoit: car lors qu'ils ne luifoient plus j'apportay de la lumiere, & les trouvay morts. Si vous aviez secoüé avec force les écailles à l'obscurité, vous euffiez veu quelquefois toute l'écaille pleine de lueurs, quelquefois gros comme le bout du doigt, & quantité de cette matiere gluante, tant rouge que blanche, qui est sans doute des vers qui se sont crevez dans leurs trous. En secoiiant vous eufliez veu toutes les communications de ces petits trous de ver, semblables aux trous de ver qui sont dans les bois, comme je vous avois écrit. Dans plus de 20. douzaines d'huistres je n'ay secoüé aucune écaille, dont je n'aye fait fortir de ces lumieres, à la referve de 10. ou 12. & j'ay trouvé de ces lumieres dans plus de 16. des huistres mesmes. Ils fe rencontrent plus facilement dans les groffes que dans les petites; dans celles qui font percées de ver, que dans celles qui ne le font pas; dans le convexe, que dans le plat; dans les huistres fraisches, que dans les vieilles. J'ay remarqué que quand on a un peu, pour ainsi dire, écorché le convexe de l'écaille, & que l'on a découvert la communication des trous dans lesquels se rencontrent ces matieres gluantes qui ont quelque forme de vers, on fent une puanteur semblable à l'eau d'huistre crevée. Les |