Oui, je veux que du tout vos yeux vous fassent foi. Et, si pour d'autres yeux le vôtre peut brûler, FIN DU TROISIÈME ACTE. ACTE QUATRIÈME. SCÈNE I. - ÉLIANTE, PHILINTE. PHILINTE. Non, l'on n'a point vu d'ame à manier si dure, » Que lui fait mon avis, qu'il a pris de travers? >> On peut être honnête homme, et faire mal des vers, » Ce n'est point à l'honneur que touchent ces matières. » Je le tiens galant homme en toutes les manières, » Homme de qualité, de mérite et de cœur, >> Tout ce qu'il vous plaira, mais fort méchant auteur. » Je louerai, si l'on veut, son train et sa dépense, » Son adresse à cheval, aux armes, à la danse; » Mais, pour louer ses vers, je suis son serviteur; Et, lorsque d'en mieux faire on n'a pas le bonheur, » On ne doit de rimer avoir aucune envie, Qu'on n'y soit condainné sur peine de la vie. >> Enfin, toute la grace et l'accommodement Monsieur, je suis fâché d'être si difficile ; » Et, pour l'amour de vous, je voudrois, de bon cœur, ÉLIANTE. Dans ses façons d'agir il est fort singulier; A quelque chose en soi de noble et d'héroïque, PHILINTE. Pour moi, plus je le vois, plus surtout je m'étonne Cela fait assez voir que l'amour, dans les cœurs, PHILINTE. Mais croyez-vous qu'on l'aime, aux choses qu'on peut voir? ÉLIANTE. C'est un point qu'il n'est pas fort aisé de savoir. Comment pouvoir juger s'il est vrai qu'elle l'aime? Et croit aimer aussi, parfois, qu'il n'en est rien. PHILINTE. Je crois que notre ami, près de cette cousine, Il tourneroit ses vœux tout d'un autre côté ; Et, par un choix plus juste, on le verroit, madaine, Profiter des bontés que lui montre votre ame. ÉLIANTE. Pour moi, je n'en fais point de façons, et je croi PHILINTE. Et moi, de mon côté, je ne m'oppose pas, ÉLIANTE. Vous vous divertissez, Philinte. PHILINTE. Non, madame, Et je vous parle ici du meilleur de mon ame Et, de tous mes souhaits, j'en presse le moment'. 'Le caractère de Philinte a été attaqué avec beaucoup de sévérité par JeanJacques, qui ne voit dans ce personnage « qu'un de ces honnêtes gens du grand > monde, dont les maximes ressemblent beaucoup à celles des fripons; de ces > gens si doux, si modérés, qui trouvent toujours que tout va bien, parcequ'ils » ont intérêt que rien n'aille mieux; qui sont toujours contents de tout le › monde, parcequ'ils ne se soucient de persoane; qui, autour d'une bonne table, > soutiennent qu'il n'est pas vrai que le peuple ait faim; qui, de leur maisou > bien fermée, verroient voier, piller, égorger, massacrer tout le genre humain, > sans se plaindie, attendu que Dieu les a doués d'une douceur très méritoire à > supporter les malheurs d'autrui. » M. Aimé Martin, en rapportant ce passage, dit avec raison qu'une aussi injuste critique n'a pas besoin d'être réfutée. SCÈNE II. ALCESTE, ÉLIANTE, PHILINTE. ALCESTE. Ah! faites-moi raison, madame, d'une offense Qu'est-ce donc? Qu'avez-vous qui vous puisse émouvoir? ALCESTE. J'ai ce que, sans mourir, je ne puis concevoir; Ne m'accableroit pas comme cette aventure. Que votre esprit un peu tâche à se rappeler 1. ALCESTE. O juste ciel! faut-il qu'on joigne à tant de graces ÉLIANTE. Mais encor, qui vous peut...? ALCESTE. Ah! tout est ruiné; Je suis, je suis trahi, je suis assassiné. Avez-vous, pour le croire, un juste fondement? PHILINTE. Peut-être est-ce un soupçon conçu légèrement; ALCESTE. Ah! morbleu! mèlez-vous, monsieur, de vos affaires. (à Eliante.) C'est de sa trahison n'être que trop certain, Et que de mes rivaux je redoutois le moins. Ce vers et les cinq précédents sout empruntes à Don Garcie de Navarre. La scène suivante est également empruntée à la même pièce. PHILINTE. Une lettre peut bien tromper par l'apparence, ALCESTE. Monsieur, encore un coup, laissez-moi, s'il vous plaît, Et ne prenez souci que de votre intérêt. ÉLIANTE. Vous devez modérer vos transports; et l'outrage..... ALCESTE. Madame, c'est à vous qu'appartient cet ouvrage; Moi, vous venger? comment? ALCESTE. En recevant mon cœur. Acceptez-le, madame, au lieu de l'infidèle; Je compatis, sans doute, à ce que vous souffrez, Tout le mal qu'on lui veut se dissipe aisément, ALCESTE. Non, non, madame, non. L'offense est trop mortelle ; Il n'est point de retour, et je romps avec elle; Rien ne sauroit changer le dessein que j'en fais, |