Images de page
PDF
ePub

au temps des Empereurs Claude & Néron, du moins autant qu'on peut en juger par ce que Pline dit de lui (lib. XIV, cap. IV.), que l'amphore étoit la cubature du pied Romain. Cet Ecrivain, après avoir traité des poids, s'exprime ainsi :

Hac de ponderibus. Supereft pars altera nobis,,
Humida metiri, feu frugum femina mavis
Cujus principio nobis pandetur origo.

Pes longo fpatio atque alto, latoque notetur,
Angulus ut par fit, quem claudit linea triplex,
Quatuor & quadris medium cingatur inane,
Amphora fit cubus ; quam ne violare liceret,
Sacraverè Jovi Tarpeio in monte Quirites.

Feftus, au mot quadrantal, dit la même chofe : Quadrantal vocabant antiqui, quam ex Græco áμqopar dicunt, quod vas pedis quaoto & quadraginta capit fextarios.

drati

Il ne refte donc qu'à prendre la cubature du pied Romain que

nous

avons évalué dans le premier Chapitre, & à la réduire en pintes à raifon de quarante-huit pouces pour une pinte de Paris & nous trouverons que l'amphore Romaine contenoit 30.98 pintes de Paris. Nous aurons facilement la continence des autres vases Romains, lorsque nous connoîtrons leur rapport à l'amphore. En voici l'énumération.

Les vafes pour les liqueurs étoient le culéus, l'amphore, l'urne, le conge, le fetier, l'hémine, le quartarius, l'acétabule, le cyathe, & la ligule.

Les mesures pour les grains & les autres denrées féches, étoient le modius, le femi-modius, le fetier, l'hémine, &c.

Le culéus, l'amphore, l'urne, le conge & le quartarius ne furent en ufage que pour les liqueurs; le modius & le demi-modius ne fervirent que pour mefurer les grains & les marchandises féches; mais le fetier, l'hémine, l'acétabule, le cyathe & la ligule fervirent également à mefurer les liqueurs, les grains & les fruits.

[ocr errors]

Le culéus contenoit quarante urnes, comme il paroît par un endroit de Columelle ( de Re ruft. lib. III, cap. III.), où il dit qu'un jugere de vigne produit au moins un culéus de vin, & que fur ce pied fept jugeres rendent au propriétaire deux mille cent fefterces, à raifon de trois cents fefterces pour quarante urnes: Quippe

Quippe

Ff

ut deterrimi generis fint vineæ, tametfi cultæ fingulos utique culleos vini fingula earum jugera peræquabunt: utque trecentis numis quadragenæ urna veneant, quod minimum pretium eft annonæ, confumant tamen feptem cullei feftertia duo millia & centum numos. Mais le culéus contenoit également vingt amphores, comme nous le voyons par ce paffage (lib. XIV, cap. IV.): Quum & poftea fæpenumero Jeptenos culeos fingula jugera, hoc eft, amphoras centenas quadragenas mufti dedere. De ce que le culéus contenoit vingt amphores ou quarante urnes, il fuit que l'urne étoit la moitié de l'amphore. Nous pourrions alléguer ici un plus grand nombre d'autorités pour prouver que le culéus, l'amphore & l'urne font entr'eux comme 40, 2 & 1; mais pour abréger, nous nous contenterons de donner tous les rapports des mefures creufes Romaines, recueillis par Volufius Métianus, célebre Jurifconfulte, qui vivoit fous les Antonins. « Le quadrantal, dit cet Auteur, que la plupart appellent » aujourd'hui amphore, contient deux urnes, trois modius, fix » demi-modius, huit conges, quarante-huit fetiers, quatre-vingt» feize hémines, cent quatre-vingt-douze quartarius, cinq cents » foixante-seize cyathes»: Quadrantal quod nunc plerique amphoram vocant habet urnas duas, modios tres, femi-modios fex, congios octo, fextarios quadraginta-octo, heminas nonaginta-fex, quartarios centum nonaginta-duos, cyathos quingentos feptuaginta-fex.

A l'égard de l'acétabule ou vinaigrier, & de la ligule, Pline (lib. XXI, cap. ult.) nous fait connoître le premier de ces vafes, en difant qu'il eft le quart de l'hémine: Cùm acetabuli menfura dicitur, fignificat hemina quartam partem.

La ligule étoit la cuiller chez les Romains. Les Auteurs qui ont traité des mesures, la font avec raison le quart du cyathe, c'eft fans doute en se fondant fur un paffage de Columelle (lib. XII, cap. XXI.), que je rapporterai dans la fuite.

Martial (in Pofthumianum) parle de la ligule en cette maniere: Octavus ligulam mifit fextante minorem,

Nonus aculeolos in cochleare tulit.

La ligule a pris fon nom du mot liga ou du mot lingua, d'où vient qu'on l'a appellée aussi lingula; mais Martial blâme cette derniere appellation:

Quamvis me ligulam dicant equitefque patrefque,

Dicor ab indoctis lingula grammaticis.

Le même Auteur montre l'usage du cochlearion ou ligule dans les vers fuivans

Sum cochleis habilis, fed non minus utilis ovis :

Numquid fcis potiùs cur cochleare vocer?

Le culléus ou culéus valant vingt amphores, revenoit à environ 620 pintes mesure de Paris. Le nom de ce vase est un mot grec, qui fignifie un fac. Il a été pris auffi fous cette acception par les Romains. Il fignifie encore le fupplice des parricides, qui confiftoit à renfermer le criminel dans un fac bien coufu, avec un chien, un coq, une vipere & un finge, & à le jetter en cet état dans la riviere. Cependant il ne faut pas s'imaginer que pour cela le culéus à mettre du vin fût une outre de cuir, c'étoit un vafe de terre cuite, de même que l'amphore, l'urne, &c.

L'amphore s'appelloit ainfi, parce que c'étoit un vase à deux anfes; & dans les temps les plus reculés on lui donnoit le nom de quadrantal, à cause qu'elle étoit la cubature du pied Romain. L'urne, moitié de l'amphore, contenoit 15 pintes mesure de Paris.

de

Le conge, quatrieme partie de l'urne, contenoit 3 pintes. Ce mot eft pris du grec chous, qui dérive de cheo, je verse; c'est aussi de ce verbe cheo & de pino, je bois, que vient le mot chopine, mefure de Paris pour mettre du vin, ainfi appellée, dit-on, ce qu'on peut la vuider fans reprendre haleine : le mot pinte peut auffi venir de pino, comme le mot pot peut venir de poto, potare. C'est du conge que quelques fameux buveurs de l'antiquité ont' reçu les furnoms de Bicongius & de Tricongius. Pline raconte (lib. XİV , cap. XXII.) que Novellius Torquatus buvoit de fuite & fans reprendre haleine trois conges de vin, qui valent plus de onze pintes & demie de Paris, & que ce fut ce qui fit changerfon nom de Torquatus en celui de Tricongius. Selon le même Auteur, le fils du célebre Cicéron étoit fi fort adonné aux excès du vin, qu'il vuidoit jufqu'à deux conges tout de fuite, ce qui revient à près de huit pintes. Ce que dit Plaute feroit encore bien plus merveilleux, s'il n'étoit pas hyperbolique :

Anus hac quantillum fitit? modica eft,

Quadrantal capit.

Nous avons déja parlé de la taille énorme de l'Empereur Maximin, auquel on attribue huit pieds & demi Romains de hauteur; il étoit gros & fort à proportion: on le comparoit pour la force à Milon le Crotoniate, à Hercule & à Antée ; comme eux auffi il étoit grand buveur & grand mangeur. Selon Capitolin, il lui arriva fouvent de boire dans un jour une amphore de vin mesure du Capitole, qui vaut 31 pintes, & de manger quarante livres de viande, qui en valent 27; du poids de Paris. La voracité de Milon de Crotone étoit à peine raffafiée de vingt mines de viande, d'autant de pain, & de trois chous de vin; mais le chous ou conge dont il s'agit ici eft celui des Grecs, moins grand que celui de Rome, comme nous le verrons bientôt. Si nous voulons oppofer la frugalité à l'intempérance, nous en aurons un exemple dans la perfonne d'Augufte. Ce Prince, au rapport de Suétone, lorsqu'il vouloit fe régaler & boire plus qu'il n'avoit ordinaire, ne buvoit jamais au-delà d'un fetier de vin, qui fait moins d'une chopine & un tiers, ou s'il excédoit cette mefure, il en étoit incommodé.

13

18

Le fetier Romain étoit ainfi appellé, parce qu'il étoit la fixieme partie du conge; mais à caufe qu'il contenoit douze cyathes, on fui donnoit quelquefois le nom d'as. Chaque cyathe alors prenoit le nom d'once; enforte que le fetier revenant à une chopine & un peu plus d'un quart, l'once vaut Iroquille; le fextans 1 demi-poffon; le quadrans poffon; le triens posson; 1 quincunx 2 ¦ possons ; le femis un demi-fetier de Paris & un peu plus d'un quart; le feptunx demi-fetier; le bes 1 demi-fetier; le dodrans de chopine; le dextans 1 chopine; le deunx 4 1 chopines; & enfin l'as, une chopine & un peu plus d'un quart.

16

18

14

i

13

[ocr errors]

le

On trouve dans les Poëtes la plupart de ces fous-divisions du fetier. En voici des exemples. Le fextans dans Martial :

Sextantes, Callifte, duos infunde Salerni.

Le quadrans dans le même Poëte:

Quadrantem duplica de feniore cado.

Le triens dans Properce:

Cùm fuerit multis, exacta trientibus hora.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

Le quincunx & le bes dans Martial :

Quincunces & fex ciathos beffemque bibamus,

Cujus ut fiat, Julius & Proculus.

Le fextans & le deunx dans le même:

Poto ego fextantes, tu potas, Cinna, deunces, Et quareris, quod non, Cinna, bibamus idem. Le bes encore dans Martial (in Postum.) :

Beffalem ad fcutulam fexto pervenimus anno.

Le femis, fous les noms de felibra & de cotula, dans le même: Poft hunc in cotulá rafa felibra data eft.

Tous ces exemples femblent prouver que le cyathe ou l'once du fetier étoit le verre ou la taffe fervant à boire chez les Romains, & que la continence en étoit déterminée à la douzieme partie du fetier. C'étoit encore un ufage chez cet ancien peuple, dans les repas où régnoit la gaieté, de s'inviter à boire autant de coups qu'il y avoit de lettres dans le nom de fa maîtreffe, de fon ami ou de fon patron; ce qu'on remarque dans Martial (Epigr. lib. 71):

Navia fex cyathis, feptem Juftina bibatur,

Quinque Lycas, Lyde quatuor, ida tribus ;
Omnis ab infufo numeretur amica Falerno, &c.
On en a encore un exemple ( Epigr. IX, 93.):
Addere quid ceffas, puer, immortale Falernum,
Quadrantem duplica de feniore cado.

Nunc mihi dic, quis erit, cui te, Calociffe, deorum,

Sex jubeo ciathos fundere? Caefar erit.

L'hémine étoit la moitié du fetier, & fe divifoit, ainsi que ce dernier vafe, en douze onces. C'étoit, dit Galien (lib. III. de Compof. medicam. fec. gen.), une mesure cylindrique de corne tranfparente, fervant à mefurer l'huile, divifée par des lignes circulaires en douze parties égales qu'on appelloit onces, mais dont les donze onces ne faifoient que dix onces poids de Tap aνTOTS ( PWμαίοις) μέτρον, ᾧ τὸ ἔλαιον μετρόνσιν. ἐντετνημένον γράμμαις διαιρούσαις

« PrécédentContinuer »