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d'employer l'un en parlant de plus de deux. Cet usage du mot l'un date de l'origine de la langue :

« E partid son pople en treis, e livrad l'une partie à Joab, e l'altre à « Abisaï, e la tierce à Ethaï. >>

(Rois. p. 185.) << Sa femme commença à devenir l'une des plus belles femmes qui feust « en France. » (MARGUERITE, Heptam. nouv. 15.) Voilà l'un des péchés où mon âme est encline. » (REGNIER. Sat. 12.)

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« L'un des plaisirs où plus il dépensa

Fut la louange: Apollon l'encensa. » (LA FONT. Belphegor.)

J'ai vu les lettres que vous débitez contre celles que j'ai écrites à un

« de mes amis sur le sujet de votre morale, où l'un des principaux points (PASCAL. II Prov.)

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de votre défense est que.....”

- L'UNE par ellipse, pour l'une de vous, l'une ou l'autre :

Non, je veux qu'il se donne à l'une pour époux. (Mélicerte. I. 5.) - L'UN NI L'AUTRE, pour ni l'un ni l'autre :

Vous n'aurez l'un ni l'autre aucun lieu de vous plaindre.

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« Plus n'ont voulu l'avoir fait l'un ni l'autre. »

(RACINE. Epigr. sur l'Iphigénie de Leclerc.)

MACHER CE QUE L'ON A SUR LE COEUR:

Mme

PERNELLE.

Et je ne mâche point ce que j'ai sur le cœur.

(Tart. I. 1.)

Cette métaphore est empruntée des animaux ruminants: je ne rumine point les griefs dont j'ai à me plaindre.

MA COMMÈRE DOLENTE, expression proverbiale :

Et maintenant je suis ma commère dolente.

MAIN; LA MAIN HAUTE. (Voyez HAUT LA MAIN.)

(Sgan. 2.)

A TOUTES MAINS, toujours prêt à tous les partis :

C'est un épouseur à toutes mains.

(Voyez DONNER LES MAINS.)

(D. Juan. I. 1.)

MAINTENIR QUELQU'UN, absolument, le maintenir en

joie et prospérité :

Le bon Dieu vous maintienne!

(Dép, am. III. 4.)

MAL, adverbe joint à un adjectif. (Voyez MAL PROPRE.)

MAL DE MORT, VOULOIR MAL DE MORT A QUELQU'UN: Je me veux mal de mort d'être de votre race!

MAL D'OPINION, qui gît dans l'opinion:

Un mal d'opinion ne touche que les sots.

MALEPESTE DE.... :

Malepeste du sot que je suis aujourd'hui !

(Que la) male peste (soit) du sot... (Voyez PESTE.)

MALFAIT, substantif; UN MALFAIT :

Peux-tu me conseiller un semblable forfait,
D'abandonner Lélie et prendre ce malfait?

(Fem. sav. II. 7.)

(Amph. I. 4.)

(L'Et. II. 5.)

MALGRÉ QUE J'EN AIE OU QU'ON EN AIT :

Me voulez-vous toujours appeler de ce nom?

Ah! malgré que j'en aic, il me vient à la bouche.

(Sgan. 2.)

(Ec. des fem. I. 1.)

Madame tourne les choses d'une manière si agréable, qu'il faut être de son 'sentiment malgré qu'on en ait. (Crit. de l'Ec. des fem. 3.) Cet exemple n'autorise point l'emploi de malgré que. Malgré que vous disiez... pour quoi que vous disiez, sera toujours un solécisme. Voici la différence : dans malgré qu'on en ait, mal gré ou mauvais gré est le complément naturel et direct d'avoir. C'est une espèce d'accusatif absolu : mauvais gré, tel mauvais gré que vous en ayez.

Mais cette explication n'est plus possible dans malgré que vous disiez, fassiez..., parce que gré ne saurait être ici le complément des verbes faire, dire: on ne dit pas, on ne fait pas un gré. Au contraire, quoi (quid) s'allie très-bien aux verbes faire et dire: quoi que vous fassiez, mot à mot quid quod agas.

La faute est venue de ce qu'on a fait de malgré une sorte d'adverbe, en perdant de vue ses racines. Cela ne fût pas árrivé si l'on avait retenu l'usage d'écrire en deux mots mal gré. Personne ne s'est jamais avisé de dire: En dépit que vous fassiez; parce que dépit est resté visiblement substantif.

(Voyez DÉPIT.)

MALHEURE ( A LA ):

Et bien à la malheure est-il venu d'Espagne,

Ce courrier que la foudre ou la grêle accompagne! (L'Et. II. 13.) A la male ou mauvaise heure: in malora; andate in malora.

« Va-t-en à la malheure, excrément de la terre! »

(LA FONTAINE. Le Lion et le Moucheron.)

MALITORNE:

Nous avons le fils du gentilhomme de notre village, qui est le plus grand malitorne et le plus sot dadais que j'aie jamais vu.

Malitorne vient sans doute de male tornatus:

(B. gent. III. 12.)

« Et male tornatos incudi reddere versus. »

(HOR. de Art. poet.)

MAL PROPRE A...

Monsieur, je suis mal propre à décider la chose.

(Mis. 1. 2.)

Les comédiens, par la crainte d'une équivoque ignoble, substituent je suis peu propre. Le sens n'est pas le même. On employait autrefois mal et peu à cet office avec des nuances différentes. Mal gracieux, mal habile, étaient des expressions moins fortes que peu gracieux, peu habile. Il est regrettable que l'on ait laissé perdre cet emploi de mal. La prononciation a soudé inséparablement l'adverbe à l'adjectif dans maussade (mal sade), c'est-à-dire qui est mal sérieux, d'un sérieux désagréable, déplaisant, et non peu sérieux (1).

Je me sens mal propre à bien exécuter ce que vous souhaitez de moi. (Am, magn. I. 2.)

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« Mal content de son stratagème.» (LA FONT. Le Renard et le Coq.)

(1) Sade marquait un sérieux doux, une contenance réservée avec grâce. Plusieurs écrivains du XVe siècle ont pris sade et son diminutif sadinet pour geniil, agréable. Les Anglais, entraînant l'exagération du mot dans le sens opposé, ont gardé sad pour signi. fier triste. Le sens primitif était intermédiaire. « Sadde, dit Palsgrave (en 1530); dis«< crete; sadde, full of gravity. » (Fol. 94 verso.)

Sade parait venir de sedatus, et en exprime parfaitement le sens. Borel dérive maussade de male satus; c'est une étymologie à la façon de Ménage, qui se contente de quelques lettres communes ou analogues pour conclure la filiation. Si maussade vient de male satus, sade tout seul signifiera donc satus? Borel n'y a pas réfléchi.

MALVERSATIONS, dans le sens étendu de désordres

de conduite :

GEORGE DANDIN (à sa femme.)

Vous avez ébloui vos parents et plâtré vos malversations. (G. D. III. 8.)

L'Académie n'attribue à ce mot qu'une application restreinte : — « Faute grave commise par cupidité dans l'exercice d'une charge, d'un emploi, dans l'exécution d'un mandat. »

L'explication de Trévoux s'accorde avec celle de l'Académie; ainsi Molière s'est servi d'un mot impropre, ou plutôt n'y aurait-il pas une intention comique dans cette impropriété même ? Le paysan enrichi se sert du terme le plus considérable qu'il connaisse pour accuser sa femme, et c'est un terme de finances.

MANIÈRE; D'UNE MANIÈRE QUE, avec l'ellipse de

TELLE:

Vous tournez les choses d'une manière qu'il semble que vous avez raison. (Don Juan. I. 2.)

- DES MANIÈRES (des espèces) DE... : Vous n'allez entendre chanter que de la prose cadencée, ou des manières de vers libres. (Mal. im. II. 6.)

MANQUEMENT DE FOI, DE MÉMOIRE, pour manque:

Et qu'on s'aille former un monstre plein d'effroi
De l'affront que nous fait son manquement de foi?

(Ec. des fem. IV. 8.) Et n'ai-je à craindre que le manquement de mémoire? (Impromptu. 1.)

MARCHÉ; COURIR SUR LE MARCHÉ DES AUTRES:

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Ça n'est pas biau de courir su le marché des autres!

De mettre l'enchère à ce qu'ils marchandent.

(D. Juan. II. 5.)

MARCHER SUR QUELQUE CHOSE, métaphoriquement,

traiter un sujet avec circonspection:

Mon Dieu, madame, marchons là-dessus, s'il vous plaît, avec beaucoup de retenue.

(Ctesse d'Esc. 1.)

MARQUIS; LE MARQUIS dans un sens général, et pour désigner toute une classe; DONNER DANS LE MARQUIS :

Vous donnez furieusement dans le marquis!

Vous vous jetez dans les allures des marquis.

Molière a dit de même :

(L'Av. I. 5.)

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Ah, ah, petite masque, vous ne me dites pas que vous avez vu un homme dans la chambre de votre sœur ! (Mal. im. II. 11.)

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MASQUE DE FAVEUR; faveur simulée qui n'a que l'apparence:

D'un masque de faveur vous couvrir mes dédains! (D. Garc. II. 6.) MATIÈRE; DES MATIÈRES DE LARMES:

Ah! Myrtil, vous avez du ciel reçu des charmes

Qui nous ont préparé des matières de larmes. (Mélicerte. II. 6.)

— D'ILLUSTRES MATIÈRES A....:

Je suis médecin passager, qui vais de ville en ville.... pour chercher d'illustres matières à ma capacité. (Mal. im. III. 14.)

MATRIMONION, mot latin, mariage:

Quelque autre, sous l'espoir du matrimonion,
Aurait ouvert l'oreille à la tentation.

(Dépit am. II. 4.)

Dans l'origine, ces notations om, um, soit en latin, soit en français, soit au commencement ou à la fin des mots, se prononçaient on, et non pas, comme on fait aujourd'hui, ome. Eum se prononçait eon, comme on le voit par l'histoire de ce fanatique du moyen âge qui, entendant chanter à la messe per eum qui venturus est, s'alla persuader qu'il s'agissait de lui, parce qu'il s'appelait Eon (1). On disait, au xvIIe siècle, de l'opion :

(1) Il se donna pour le fils de Dieu, et gagna des partisans, à l'aide desquels il envahissait les monastères et en chassait les moines. Pour arrêter cette espèce d'hérésie ridicule, il ne fallut rien de moins qu'un concile tenu à Reims, et présidé par le pape en personne. Cela se passait en 1148. (Cf. d'Argentré.)

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