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& dans les chants religieux,

qui cherchent à t'ouvrir la barrière des Cieux/ je trouve, je ne fais quels charmes, volupté d'un ami pieux.

Oh! comme en ce moment je fentis dans mon ame s'émouffer l'aiguillon dont s'armoit la douleur! la tombe difparut; & fa lugubre horreur,

cédant à des rayons de flamme,

je crus voir la vertu te parer de fplendeur.

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Les Calas, les Sirven, tous ceux dont l'innocence a dû fon triomphe à ta voix,

reproduits à mes yeux te fuivoient en filence,
& la palme à la main te faifoient à la fois
un cortège de gloire & de reconnoiffance.

Des champs fortunés de Canon,

à grands flots arrivoient encore

tes humbles Laboureurs que la vertu décore,. & de qui la bonté te doit un doux renom : mères, vieillards, enfans, leur foule t'environne; couronnés par tes mains ils t'offroient leur cou

ronne,

en couvroient ton cercueil & béniffoient ton nom

Ó douce, ô confolante image!

je crus voir du fommet des cieux 2 ton époufe au front radieux,

defcendre, & t'apporter un plus touchant hommage, Libre enfin par ta mort, elle vint à mes yeux,

Ecarter avec complaisance,
le mystère religieux

où s'enfermot ta bienfaisance;
La bouche publioit ta facile pitié,.
& le charme que ta présence
donnoit à la fainte amitié.

Ah! fans ceffe il vivra fidèle à ma mémoire
ce jour où m'apparut ta gloire
rayonnante & debout auprès de tón cercueil :
fpectacle raviffant qui raconte ta vie,
& qui défefpérant l'envie,

aigrira le plaifir que lui promit ton deuil.

Et to, jeune Orphelin (1) qu'il laiffe fur la terre, toi, fur qui repofoit tout fon cœur paternel, ah! puisse de mes vers le tribut folemnel, puiffe-t-il confoler ta douleur folitaire!

Si tu fens pour un fils combien il est affreux. de perdre un ami dans un père,

vois comme tous les cœurs mêlent pour toi des vœux au chagrin qui te défefpère.

Rends-nous, rends-nous celui qui te donna le jour; le fruit de fes travaux eft ton riche partage; prétends un plus noble héritage:

ainsi que ses vertus, recueille notre amour.

Par M. ROUCHER.

(1) Le fils de M, Elie de Beaumont étoit préfent à la cérémonie,

LA MALHEUREUSE ÉTOILE

DU GASCON.

LA penfion qué l'on m'avoit promise,

riché déjà, Pierré l'obtient :

un posté vaque; au même inftant j'y vise :
Paul eft fot, & Paul y parvient.
Capédébious! qué mon deftin m'ennuie,
qui,.fauté dé protections,
mé fait toujours, s'il pleut des penfions
demeurer fous lé parapluie!

Par M. DE PIIS.

ÉPITAPH E

DE MM. PILATRE DE ROSIER ET ROMAIN.

(On en a mis la traduction latine au bas du tombeau qu'on vient de leur élever.)

Cy giffent qui, des airs franchiffany la barrière,

Y

& planant fur le monde abaiffé devant eux,

du trône le plus glorieux,

précipités dans la pouffière,

offrent de l'homme, au même inftant,

& la grandeur & le néant..

Par M. VERNES le fils

JAMAIS ET POURTANT,

Ou CONVERSATION que j'eus l'autre jour avec Madame Gertrude.

Air Avec les jeux dans le village.
Dires-MOI, madame Gertrude,

futes-vous belle en votre tems?

Jamais, me répondit la prude,
la beauté perd les jeunes-gens.
Pourtant j'avois la peau tendue,
mon œil n'étoit pas éraillé;
même on prétend que l'on m'a vue
ayant l'air affez éveillé.

Dites-moi, madame Gertrude,
eutes-vous jadis quelqu'amant?
Jamais, me répondit la prude,
aimer eft un crime trop grand.
Pourtant on n'étoit pas
de glace;

Lindor a voulu m'en conter:
Lindor avoit beaucoup de grace,
j'eus peine à ne pas l'écouter.

Dites-moi, madame Gertrude,
n'a-t-il jamais fu vous toucher ?

Jamais, me répondit la prude, j'appréhendois trop de pécher.

Fourtant, m'ayant un jour de fête
demandé par grace un baiser,
féduite par fon air honnête
je ne fus pas le refufer.

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Dites-moi, madame Gertrude, ne fuccombâtes-vous jamais ?

Jamais, me répondit la prude, Dieu fait la peur que j'en avais ! Pourtant, certain foir de Carême, je l'appellai pour le prêcher; mais il prêcha fi bien lui-même, qu'il me fit, je crois, trébucher.

Dites-moi, madame Gertrude, avez-vous trébuché fouvent?

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Jamais, me répondit la prude finon dans ce fatal moment. Pourtant, au bout de la journée, quand j'allois au bois fommeiller, j'étois fouvent toute étonnée dans fes bras de me réveiller.

Dites-moi, madame Gertrude, trébucheriez-vous bien encor?

Jamais, me répondit la prude, j'aimerois cent fois mieux la mort. Pourtant à quelque complaifance s'il falloit pour vous confentir, je tâcherois avec décence de contenter votre defir.

Dites-moi ;

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