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enfans? Quelle est la mère qui ne les aime pas? Je ne puis me borner là. Le père de ces jeunes gens m'a épousée pour leur tenir lieu de la mère qu'ils ont perdue. Je dois donc me regarder comme leur propre mère. Peut-on être mère sans tendresse ? Si celle que j'ai pour mes propres enfans, me faisait négliger ceux-ci, je manquerais d'équité. Que fait au monde une mère qui n'a ni équité, ni tendresse? Si ce jeune homme n'a pour moi que de l'aversion, sa haine et ses mauvaises manières ne me

dispensent pas de faire mon devoir. »

Les réponses de cette femme vertueuse étant devenues publiques, et le roi en ayant eu connaissance, il lui accorda la grâce de son fils. Depuis ce temps-là, ce fils peu soumis et ses quatre frères n'eurent pas moins de déférence et de respect pour leur belle-mère, que leurs trois frères du second lit. Elle les instruisit si bien tous les huit, qu'ils occupèrent tous, dans la suite, avec honneur, les premiers emplois du royaume. Mettons à la place de cette femme une belle-mère impatiente, orgueilleuse et jalouse, son mari aurait

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perdu un de ses fils, et les autres ne seraient devenus, peut être, que des hommes ou méprisables ou criminels. Belle leçon adressée par une mère à son fils, qui était ministre.

Un ministre, dans le royaume de Tsi, extorqua de ceux qui dépendaient de lui, une somme assez modique, et vint la remettre à sa mère. « Mon fils, lui ditelle, il n'y a que trois ans que vous êtes en place. Je sais à quoi se montent vos appointemens, et vous avez eu des dépenses à faire. D'où peut venir cette somme que vous m'apportez? Ma mère, répondit le ministre, je dois vous avouer que je l'ai des officiers subalternes. →→→→ reçue Mon fils, un bon ministre doit servir son prince avec affection et sans intérêt, au moins doit-il se conserver les mains nettes, et ne point employer, pour s'enrichir, des moyens illégitimes. S'il lui en vient à l'esprit, il doit aussitôt les rejeter. Enfin, il doit éviter jusqu'au soupçon d'être disposé à recevoir un argent qui ne vient pas par les bonnes voies; être réellement aussi

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désintéressé qu'il désire de le paraître, et par sa conduite, donner du poids à ses paroles. Le prince vous a fait l'honneur de vous mettre en place. Vos appointemens sont considérables. Ce n'est donc que par une conduite irréprochable que vous devez répondre à ses bienfaits. Sachez, mon fils, que les devoirs d'un sujet, et surtout du ministre d'un prince, ne sont pas moins sacrés que ceux d'un fils à l'égard de son père. Il doit au prince qu'il sert, un attachement sincère, un zèle ardent, une fidélité à toute épreuve. Il doit donner des preuves de toutes ses vertus, même au péril de sa vie, si l'occasion l'exige. Comme ces périlleuses occasions sont rares, il doit au moins se distinguer par une constante droiture et par un désintéressement parfait. Outre les autres avantages d'une telle conduite, elle seule peut vous mettre à couvert des mauvaises affaires; en prenant une autre route, vous devenez un mauvais ministre. Comment seriez-vous donc un bon fils? Allez, retirez-vous de ma présence; je ne vous reconnais point pour mon fils. Faites de cet argent ce

qu'il vous plaira. Jamais un bien mal acquis n'entrera chez moi. »

A ces paroles, le ministre se retira plein de confusiou et de repentir. Après avoir rendu l'argent à ceux dont il l'avait tiré, il alla se jeter aux pieds du prince, lui avoua sa faute, et lui demanda le châtiment qu'il méritait. Le monarque qui régnait alors dans le royaume de Tsi, fut enchanté de la vertu de la mère de son ministre, lui fit donner, de son trésor, une somme considérable; pardonna à son fils, et lui laissa son emploi.

Moyen singulier employé par une Impéra trice pour engager l'Empereur son mari à sortir de son indolence, pour mieux gouverner ses états.

La fille du roi de Tui avait épousé l'em. pereur de la Chine. Cette princesse n'était pas moins vertueuse que spirituelle. Jamais on ne trouva rien de blâmable dans ses actions et dans ses discours. Rien ne lui causait plus de peine que l'indolence et la paresse dans laquelle le prince son époux

passait ses journées. Comme il se couchait tous les jours de fort bonne heure et se levait fort tard, voici le moyen qu'elle prit pour le corriger de cette mauvaise babitude. Un jour, ayant quitté ses pendans d'oreilles, et ses ornemens de tête, elle se tint à l'écart dans une ruelle, dans la posture d'une femme coupable; et, par la bouche d'une de ses femmes, elle parla au prince dans les termes suivans: « Prince, j'ai l'honneur d'être votre servante, et je sais depuis long-temps que je ne le mérite sous aucun rapport. Mais un défaut auquel je n'avais pas fait attention jusqu'à présent, c'est l'amour du plaisir que, d'après les apparences, je dois me reprocher. C'est moi, sans doute, qui suis cause que votre majesté, oubliant nos usages, se montre tous les jours si tard, et qu'on vous regarde comme un prince qui préfère son plaisir à son devoir. Cette réputation vous fait un tort d'autant plus grand, que dans tous les temps la volupté a été regardée comme la source d'une infinité de désordres. Sans doute, ce mal, quel qu'il puisse être, ne

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