Employez vos clairons, triomphantes armées, Pour chanter l'heureux jour qui ranime la France De Pindare ou d'Horace il ne faut point la voix; Le cri d'un peuple heureux est la seule éloquence Qui sait parler des rois. S'il falloit, ô Destin! cette épreuve cruelle Réduits au froid bonheur de l'austere puissance, Les maîtres des humains, au sommet des grandeurs, Ignorent trop souvent quel rang on leur dispense Dans le secret des cœurs. S'ils savent être aimés, suivis de la Contrainte, Ainsi, toujours glacés, toujours inaccessibles Au bonheur d'être aimé. A peine quelques pleurs honorent leur poussiere; Vous jouissez, grand roi, d'un plus heureux partage; Un bonheur tout nouveau va vous suivre sans cesse, Don plus satisfaisant, plus cher que la grandeur, Pour un roi qui connoît le charme et la tendresse Des sentiments du cœur. Vous saviez que dans vous tout respectoit le maître, Que par-tout le héros alloit être admiré: Goûtez ce bien plus doux, ce bonheur de connoître Que l'homme est adoré. X. SUR LA MÉDIOCRITÉ. SOUVERAINE de mes pensées, Tes lois sont-elles effacées ? Toi, qui seule régnois sur les premiers mortels, Dans cette race misérable, Sur cette terre déplorable, Heureuse Liberté, n'as-tu donc plus d'autels? De mille erreurs vils tributaires, Les cœurs, esclaves volontaires, Immolent ta douceur à l'espoir des faux biens: Là d'indignes, là de sacrées; N'est-il plus un cœur vraiment libre Qui, gardant un juste équilibre, Vive maître de soi, sans asservir ses jours? Lui seul obtiendra mon hommage, Et mon cœur sous sa loi se range pour toujours. Tu m'exauces, nymphe ingénue; Aux bords d'une mer furieuse, Où la Fortune impérieuse Porte et brise à son gré de superbes vaisseaux, Il est un port sûr et tranquille, Qui maintient dans un doux asile Des barques à l'abri du caprice des eaux. Sur ces solitaires rivages D'où l'œil, spectateur des naufrages, Dans un temple simple et rustique, Là, conduite par la Sagesse, Loin des palais bruyants du fastueux Plutus; Tu rassemblas, loin du tumulte, Le vrai, les plaisirs purs, les sinceres vertus. Séduits par d'aveugles idoles, Du bonheur fantômes frivoles, Le vulgaire et les grands ne te suivirent pas: Qui doivent l'estime des âges A la sagesse acquise en marchant sur tes pas. Tu vis naître dans tes retraites Ces nobles et tendres poëtes, Dont la voix n'eût jamais formé de sons brillants, Si le fracas de la fortune, Ou si l'indigence importune Eût troublé leur silence, ou caché leurs talents. Mais en vain tu fuyois la gloire; La Renommée et la Victoire Vinrent dans tes déserts se choisir des héros, Aux vertus, aux faits héroïques, Pour Mars tu formois, loin des villes, Et ces sages vainqueurs, philosophes guerriers, |