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Sous mes pas fugitifs il creufoit un abîme,
Et j'étois malgré moi dans mon aveuglement,
D'un pouvoir inconnu l'efclave & l'inftrument.
Voilà tous mes forfaits je n'en connois point d'autres ;
Impitoyables Dieux, mes crimes font les vôtres.
Et vous m'en puniffez.

Voltaire, Edip. act. v. fc. IV.

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MALHEURS DE POMPE'E.

PHOTIN à PTOLOM E' E.

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L*fuit Rome perdue, il fuit tous les Romains, A qui par fa défaite il met les fers aux mains; Il fuit le défefpoir des Peuples & des Princes, Qui vengeroient fur lui le fang de leurs Provinces à Leurs Etats & d'argent & d'hommes épuifés, Leurs trônes mis en cendre, & leurs fceptres brifés Auteur des maux de tous, il eft à tous en butte, Et fuit le monde entier écrafé fous fa chûte. Le défendrez-vous feul contre tant d'ennemis ? L'efpoir de fon falut en lui feul étoit mis Lui feul pouvoit pour foi, cédez alors qu'il tombe Soutiendrez-vous un faix fous qui Rome fuccombe Sous qui tout l'univers fe trouve foudroyé Sous qui le grand Pompée a lui-même ployé ? Quand on veut foutenir ceux que le fort accable A force d'être jufte on eft fouvent coupable'; Et la fidélité qu'on garde imprudemment, Après un peu d'éclat traîne un long châtiment, Trouve un noble revers, dont les coups invincibles; Pour être glorieux ne font pas moins fenfibles. Seigneur, n'attirez point le tonnerre en ces lieux à Rangez-vous du parti des Deftins & des Dieux ; Et fans les accufer d'injuftice ou d'outrage,

* Pompée.

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Puifqu'ils font les heureux, adorez leur ouvrage : Quelques foient leurs décrets, déclarez-vous pour eux, Et pour leur obéir, perdez le malheureux.

Corneille, Mort de Pompée, act. I. fc. I.

Q

MAL MARIE'.

UE le bon foit toujours camarade du beau,
Dès demain je chercherai femme :

Mais comme le Divorce entre eux n'eft pas nouveau ;
Et que peu de beaux corps, hôtes d'une belle ame,
Affemblent l'un & l'autre point,

Ne trouvez pas mauvais que je ne cherche point.
J'ai vu beaucoup d'hymens, aucuns d'eux ne me tentent :
Cependant des humains prefque les quatre parts,
S'expofent hardiment au plus grand des hafards;
Les quatre parts auffi des humains fe

repentent.
J'en vais alléguer un qui s'étant repenti,
Ne pût trouver d'autre parti,
Que de renvoyer fon épouse
Querelleufe, avare & jaloufe.

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Rien ne la contentoit, rien n'étoit comme il faut,
On fe levoit trop tard, on fe couchoit trop tôt.
Puis du blanc, puis du noir, puis encore autre chofe;
Les valets enrageoient, l'époux étoit à bout :
Monfieur ne fonge à rien, Monfieur dépenfe tout
Monfieur court, Monfieur fe repofe.

Elle en dit tant, que Monfieur à la fin,
Laffé d'entendre un tel lutin,

Vous la renvoie à la campagne,
Chez fes parens. La voilà donc compagne
De certaines Philis qui gardent les dindons,
Avec les gardeurs de cochons."

Au bout de quelque tems qu'on la crût adoucie
Le mari la reprend. Eh bien ! qu'avez-vous fait ?
Comment paffiez-vous votre vie?

L'innocence des champs eft-elle votre fait ?
Affez, dit elle: mais ma peine

Etoit de voir les gens plus pareffeux qu'ici :
Ils n'ont des troupeaux nul fouci.

Je leur favois bien dire ; & m'attirois la haine
De tous ces gens fi peu foigneux.

Eh, Madame, reprit fon époux tout à l'heure,
Si votre efprit eft fi hargneux
Que le monde qui ne demeure

Qu'un moment avec vous, & ne revient qu'au foir
Eft déja laffé de vous voir,

Que feront des valets qui toute la journée,
Vous verront contre eux déchaînée ?
Et que pourra faire un époux,

Que vous voulez qui foit jour & nuit avec vous ?
Retournez au Village: adieu, fi de ma vie

Je vous rappelle, & qu'il m'en prenne envie, Puiffé-je chez les morts avoir, pour mes péchés i Deux femmes comme vous fans ceffe à mes côtés. La Fontaine, Fables.

PLUS

MARIAGE.

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LUS d'une fois je me fuis étonné, Que ce qui fait la paix du mariage En eft le point le moins considéré. Lorfque l'on met une fille en ménage, Les pere & mere ont pour objet le bien; Tout le furplus, ils le comptent pour rien. La Fontaine, Contes

JE foutiens & dis hautement,
Que l'hymen eft bon feulement
Pour les gens de certaines claffes.
Je le fouffre en ceux du haut rang,

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Lorfque la nobleffe du fang
L'efprit', la douceur & les graces
Sont joints au bien : & lit à part.
Il me faut plus à mon égard.
Et quoi de l'argent fans affaire;
Ne me voir autre chofe à faire,
Depuis le matin jufqu'au foir,
Que de fuivre en tout mon vouloir.
Femme de plus affez prudente
Pour me fervir de confidente;
Et quand j'aurois tout à mon choix,
J'y fongerois encor deux fois.

La Fontaine, Envr. divers.

HOMME, qui femme prend, fe met en un état, Que de tous à bon droit on peut nommer le pire: Fol étoit le fecond qui fit un tel contrat,

A l'égard du premier je n'ai rien à lui dire.

La Fontaine,

uur. diverf.

MARIS.

LE malheur des Maris, les bons tours des Agnès,

Ont été de tout tems le fujet de la Fable.
Ce fertile fujet ne tarira jamais ;

C'est une fource inépuifable.

A de pareils malheurs tous hommes font fujets:
Tel qui s'en croit exemt eft tout feul à le croire ;
Tel rit d'une rufe d'amour,
Qui doit devenir à fon tour

Le vifible fujet d'une femblable hiftoire.

D'un tel revers fe laiffer accabler,
Eft à mon gré fottife toute pure.

La Fontaine, Contes.
By

MAUSOL E' E.

BOURBON n'employoit point ces momens falutaires,

A rendre au dernier Roi les honneurs ordinaires,
A parer fon tombeau de ces titres brillans,
Que reçoivent les morts de l'orgueil des vivans.
Ses mains ne chargeoient point ces rives défolées;
De l'appareil pompeux de ces vains Maufolées,
Par qui malgré l'injure & des tems & du fort,
La vanité des Grands triomphe de la mort.

Voltaire, Henri. ch. V I

*Henri III.

Αυ

MECHANS.

U bonheur du méchant qu'un autre porte envie.
Tous les jours paroiffent charmans.

L'or éclate en fes vêtemens,

Son orgueil eft fans borne ainfi que fa richeffe.
Jamais l'air n'eft troublé de fes gémiffemens.
Il s'endort, il s'éveille au fon des inftrumens.
Son cœur nage dans la molleffe.

Pour comble de profpérité,

Il efpére revivre en fa postérité;

Et d'enfans à fa table une riante troupe,
Semble boire avec lui la joie à pleine coupe.

Heureux, dit-on, le peuple floriffant, Sur qui ces biens coulent en abondance. Plus heureux le peuple innocent, Qui dans le Dieu du ciel à mis fa confiance.

La gloire des méchans en un moment s'éteint.

L'affreux tombeau pour jamais les dévore,

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