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S’asséger, s'assiéger, S'ASSIÉEZER (du latin adsediare, assediare, assejare, asséger). De ces trois formes, la plus commune est s'assiéezer. Elle est surtout usitée à l'indic. prés., à l'imparf., à l'impératif et au subj. prés., moins souvent au participe prés., presque jamais au futur, ni au conditionnel, où l'on préfère les formes je m'assirai, je m'assirée. Au lieu d'assis (rare), on emploie de préférence les part. passés assiéezé ou assisé.

Je n'ai jamais rencontré dans notre langue primitive aséjer dans le sens d'asseoir. Au contraire, on y trouve très souvent asseoir dans le sens d'assiéger. Je ne serais pas étonné que ces deux verbes, d'une racine commune, eussent eu aussi en commun le double sens que possède seul asseoir dans les textes que j'ai dépouillés. Ce n'est qu'ainsi que je puis m'expliquer la signification qu'a conservée assiéezer, assiéger dans le dialecte blaisois.

ASSISER. Des formes d'asseoir en ise, isons, isez, isant, dont nous avons constaté l'existence jusque dans la seconde moitié du XVIIe siècle, et de la terminaison infinitive des formes en er est dérivé un verbe assiser, de création rustique, et qu'on peut affirmer n'avoir jamais existé au moyen-âge. Ses formes se confondent souvent avec les doubles formes d'assire. Il est régulier et usité surtout à l'impér. Assise-toué; au subj.: Foût-y que je m'assise? au part. prés. Il a ché en s'assisant, et au part. passé : Y s'a assisé. L'auxiliaire avoir n'est guère employé au passé défini qu'aux troisièmes personnes Y s'a assisé; y s'oun assisé.

QUATRIÈME CONJUGAISON.

1° FAIRE n'a dans le dialecte blaisois que le subj. d'irrégulier : que j'féze ou féeze, que tu fézes ou féezes, qu'il féze, que j'fesions ou fesains, qu'vous fesiez, qu'i fézent ou fesaint :

Que des chaaignes d'or li faisse.

(Dolop. p. 279, ap. Burg. II. 161.)

Et faiche quonque li delite.

(V. s. la M. XXXV, id. II, p. 161.)

Dans tous les verbes en aire, ai sonne toujours ée, féere', pléere, que j'féeze, que j'pléeze; re à l'inf. sonne toujours ze, féeze, pléeze. Au lieu de téeze, il en est qui préfèrent taiser.

2o Le verbe pondre se conjugue ainsi : Ind. prés. j'ponnons, pounons; vous ponnez, pounez; ils ponnent, pounent; Imparf. j'ponnée, pounée; Futur, j'ponnerai, pounerai; Condit. j'ponnerée, pounerée; Subj. que j'ponne, poune; Part. prés. ponnant; Part. passé, ponnu.

Les verbes répondre et correspondre se conjuguent de même.

Cette geline cacquette fort; a-t-elle ponneu un œuf, pensez-vous? (Palsgr. p. 472.) Je pons, nous ponnons, je ponnys, j’ay ponnu, je pondray, que je ponne, pondre (Id. p. 601).

Je respons, nous responnons, vous responnez, responnu, corresponu (ld. p. 432).

<«< A la queue chose nous vus responons ke nus ferums pur vus autant comme nus purrums (Doc. inéd. Lre d'Ed. d'Anglet, au prince de Salerne). >>

Répondre et correspondre font aussi très souvent au participe répons, correspons. Pondre fait rarement pons.

Y m'a répons: Le moment est crétique;
G'nia pus d'travail cheux nous pou l'ouverier.
Les lermes ouz yeux, je quittai sa boutique.

(Chanté par une mendiante dans les rues de La Flèche, le 3 octobre 1871.)

<< La cocque d'un œuf pons et esclous par Leda (Rab. Gargantua, ch. IV). » L'ancien participe répons a laissé dans notre langue les substantifs répons et réponse.

Et des psaumes et des leçons,

Et des versets et des répons.

(La Fontne, livr. VII, fabl. 11.)

3o Un certain nombre de verbes en eindre, tels que atteindre, aveindre, éteindre, peindre, teindre, font généralement le part.

passé en u avcindu, éteindu, etc. Ces participes, dont je ne trouve pas d'exemples au moyen-âge, ne sont autre chose que les formes faibles, usitées en place des formes fortes, comme aujourd'hui répondu au lieu de répons.

Ces verbes font aussi à l'ind. prés. nous atteindons, nous aveindons; au subj. que nous atteindions, que nous aveindions : Nos nos complaindons à nostre Sanior (M. sur Job, p. 491). Sur nous l'affaire prendons.

(Ap. Burguy, II. 194.)

Nos nos astraindons.

(Id. id.)

Plaindist, ataindist (Id. id. 243), complaindant (245).

Au lieu du verbe peindre, quelquefois usité, on emploie de préférence peinturer, et avec une expression de mépris peinturlurer: Sur les bords enjonchez des peinturez rivages.

(Ronsard, Amours, 2o livr. Buon, 1622, p. 300.)

4° De même que nous avons signalé la métathèse de l'e au futur, au conditionnel, et, devant une consonne, aux trois pers. sing. de l'indic. prés. dans les verbes en er, dont la terminaison est précédée de deux consonnes dont la seconde est un r, je liverrai, tu souffelras, de même je dois signaler l'intercalation d'un e aux deux prem. pers. plur. du conditionnel d'un grand nombre de verbes de la quatrième conjug. : nous metterions ou nous metteriains, j'peinderions et j'peinderiains, etc. Quelques verbes de la seconde conjugaison éprouvent un changement analogue en remplaçant au fut. et au condit. l'i du radical par un e qui subit la métathèse, s'il est précédé de deux consonnes dont la seconde est un r je soufferrai, tu ouverras (pron. souffeurrai, ouveurras); on dit je courrée, mais j'courrerions ou j'courrains.

Car par devant se couverra,

Mais ses meurs après ouverra.

(Eust. Desch. p. 218.)

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M. du S. d'Orl. confondera (p. 21), trouverroit (v. 7824), trouverrez (p. 306), se trouverra (v. 8133); Palsgrave je deveray (p. 650), De quoy viverons-nous (p. 633), Je metteray (p. 671), Je attenderay (p. 674), Je entenderay, je receveray (p. 680), Je estenderay (p. 629), etc. Rien n'est plus commun que cette intercalation de l'e au futur et au conditionnel. Voir aussi Burguy, II, passim:

A estre clerc metterez-vous

Bien diligence.

(Un mir. de St Valentin.)

4° Les verbes mordre et tordre font le premier quelquefois mors, le second très souvent tors.

Je ne connais pas d'exemple de mors ('), bien que je suppose que cette forme, dérivée régulièrement du participe latin, ait dû exister dans la langue d'oil. Quant à tors, torse et torte qu'on prononce encore teurs, teurse ou teurte, on en trouve des exemples jusqu'au XVIe siècle :

Je teurs et je tors. Jamais ne vis hart mieux teurse.

(Palsgr. p. 785.)

Abas y est, la chère fière et torte.

(Des Maz. p. 503.)

Les uns borgnes, les aultres torz.

(Liv. du bon Jehan, vs. 2794.)

(1) J'en rencontre un dans l'Enéid. de L. des Mazures:

Et un bon coup aux dents la terre a morse (p. 579);

et dans Rabel. Pantagr. IV, 17: Lequel en son épitaphe se complaint estre mords d'une chatte au petit doigt.

SIXIÈME PARTIE.

TEXTES EN DIALECTE BLAISOIS.

ESTOUÉERE DU PÉEZE CROUTECHOU,

Qu'avé outant d'enfauns qu'gnia d'piarres dans lée champs.

Gn'yavé eune foué in bounhoumme, qu'on app'lé l'péeze Croutechou, qu'avé outant d'enfauns qn'gnia d'piarres dans lée champs, et il'té ben malhureux, ben malhureux, paqu'i n'avé pâs d'quoué nouri toute sa couée, et qu'sée p'tits i kervaînt d'faim. V'là qu'i s'en va cougné à la pou'te du paradis :

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« C'ée l'péeze Croutechou, qu'a outant d'enfauns qu'gnia d'piarres dans lée champs. »

« T'née, mon bounhoumme, v'là eune nappe. Vous n'arée qu'à dire Ma nappe nappe, et vous vouèrez c'qu'iarriv'ra. »

L'bounhoumme prend la nappe, et s'en enr'tourne cheux li; mée v'là-t-i pas que l'nigoûd.... s'avise-t-i pâs d'pausser pâ la ville, ousqu'il avé l'habiteud' eud' mendié, et qu'i s'arréete à eune oubarge, et qu'i dit à la métréesse d'oubarge :

<«< Si vous vouliée ben m'gardé ste nappe, pandimant que j'm'en vas féere in tour en ville? >>

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