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mort, pour éviter les peines de l'ordonnance, ne répondant jamais sur leur foi que par équivoque.

RÉPONSE. Il est certain déjà qu'on ne leur peut pas donner l'absolution dont ils sont incapables : pour la communion, on suppose qu'ils ne la demandent pas; reste donc à examiner pour l'ExtrêmeOnction. Je réponds que s'il paroît qu'ils l'ont demandée, et que depuis ils n'aient rien fait de contraire; s'ils viennent à perdre la connoissance, on ne leur peut refuser ce sacrement. La raison est que ce seroit déclarer l'incapacité qu'on a reconnue par la confession; ce qui n'est pas permis. Que si, étant en pleine connoissance, ils refusent la communion, ce refus doit être réputé un acte contraire à la demande de l'Extrême-Onction; puisque c'est une marque certaine d'incrédulité. On pourroit douter si la confession faite par un homme qui déclare à son confesseur qu'il ne croit pas la religion catholique, oblige au secret; puisqu'en effet c'est plutôt une moquerie qu'une confession. Mais premièrement, un homme pourroit se confesser en cette manière : Je voudrois bien pouvoir croire; mais je n'en puis venir à bout, et je m'accuse de cette foiblesse. Secondement, quoiqu'il soit vrai qu'un incrédule qui ne veut jamais s'expliquer que par équivoque, et qui, dans la confession, vous déclare qu'il ne peut ni ne veut croire, en effet ne fait pas une confession, et qu'au fond on ne lui doive aucun secret; néanmoins il faut agir avec beaucoup de prudence, et respecter en quelque sorte même l'apparence de la confession, pour ne point rendre un sacrement si nécessaire, odieux aux infirmes.

Quant

Quant à ceux qui veulent bien recevoir l'ExtrêmeOnction avec connoissance, et ne veulent pas s'expliquer précisément sur la foi, on ne peut point la leur administrer sans participer à leur sacrilége.

III. et IV. PROPOSITION. Si l'on peut recevoir parrains et marraines ceux qui ont ces sentimens et qui ne les dissimulent pas, ou qui répondent avec équivoque; et si on peut les recevoir à se marier.

RÉPONSE. Je ne les reçois ni à l'un ni à l'autre dans mon diocèse car on ne peut recevoir parrains et marraines, que ceux qui seront capables d'instruire l'enfant dans les sentimens de l'Eglise; et le rituel même prescrit qu'on leur fasse faire profession de la foi catholique: et pour le mariage, ils sont trop certainement en mauvais état pour être capables de recevoir ce sacrement.

V.e PROPOSITION. S'ils se fiancent, et après cela habitent ensemble sans la bénédiction nuptiale, est-il à propos de procéder contre eux par censure?

RÉPONSE. Il n'y a nul doute en ce cas, qu'il faut procéder par censure, implorer le secours du magistrat comme contre un scandale public.

VI. PROPOSITION. Pour les sépultures: on donne l'Extrême-Onction, et on enterre en terre sainte ceux qui ont toujours parlé comme protestans, et n'ont fait aucun acte de catholique, pourvu qu'à l'extrémité ils aient appelé un prêtre; ce qu'on sait qu'ils font par intérêt, dans la crainte des peines de l'ordonnance : cela est-il canonique?

RÉPONSE. La règle que je donne dans mon dio

BossUET. XXXVII.

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cèse à l'égard de la sépulture en terre sainte, est de la donner ou de la refuser aux nouveaux catholiques dans le même cas qu'aux anciens. Si l'ancien catholique n'a pas satisfait au devoir pascal, et qu'il soit surpris de la mort sans avoir fait aucun acte, je lui fais refuser la terre sainte de même au nouveau catholique; quoiqu'en ce cas il n'encoure point la peine de l'ordonnance, et qu'il n'y ait à s'adresser au magistrat que pour éviter les inconvéniens d'avoir récelé sa mort. Que si on rapporte que l'ancien catholique a demandé un prêtre, je présume fort facilement pour le mort et j'en fais autant pour le nouveau catholique, quelque présomption que j'aie au contraire; parce que la présomption de la pénitence étant la plus favorable, c'est celle qu'on doit suivre.

En général, j'évite, autant que je puis, de donner occasion à la justice de sévir contre le mort; parce que je ne vois pas que ce supplice fasse un bon effet. Il me paroît au reste, non-seulement que c'est la raison que les évêques se rendent maîtres de toutes ces choses; mais encore que c'est assez la disposition de la Cour.

A Versailles, le 26 février 1687.

LETTRE CXXXVIII.

A M. DE RANCÉ, ABBÉ DE LA TRAPPE.

'Sur le chantre de l'église de Meaux, qui vouloit se retirer à la Trappe contre l'avis de Bossuet.

CELUI qui vous rendra cette lettre, Monsieur, est le chantre de mon église, nommé M. de Vitry. C'est un des meilleurs sujets de tout ce clergé, et peutêtre un des meilleurs prêtres qu'on puisse connoître. Il désire avec passion de communiquer avec vous, et il a même des desseins de retraite, où je n'entre pas; car je suis persuadé que de bons prêtres comme lui ne sauroient mieux faire que de servir dans la milice cléricale, et de mourir sur la brèche. Il s'expliquera davantage à vous, si vous lui faites la grâce de l'entendre, comme je vous en supplie. J'aurai une singulière consolation qu'il vous rapporte ici dans son cœur et dans ses discours, en attendant que j'aille vous voir; ce qui sera, s'il plaît à Dieu, de meilleure heure que l'année passée et plus longtemps. C'est une des joies de ma vie, et personne assurément, Monsieur, n'est plus à vous que moi, etc.

A Meaux, ce 6 avril 1687.

LETTRE CXXXIX.

A UN DISCIPLE DU PÈRE MALEBRANCHE.

Sur le livre de ce Père, de la Nature et de la Gráce, dont Bossuet fait sentir les erreurs et les funestes conséquences.

Je n'ai pu trouver que depuis deux jours le loisir de lire le discours que vous m'avez envoyé avec votre lettre du 30 mars (1). Je suis bien aise de peser ces choses avec une liberté toute entière; et sans être distrait par d'autres pensées : et si jamais j'ai apporté du soin à la compréhension d'un ouvrage, c'est de celui-là. Car comme vous autres Messieurs, lorsqu'on vous presse, n'avez rien tant à la bouche que cette réponse : On ne nous entend pas; j'ai fait le dernier effort pour voir si enfin je pourrai venir à bout de vous entendre. Je suis donc très-persuadé que je vous entends autant que vous êtes intelligible; et je vous dirai ingénuement que je n'ai pas trouvé dans votre discours ce que vous nous promettiez autrefois à Monceaux et à Germigny, c'està-dire, un dénouement aux difficultés qu'on vous faisoit. Vous nous dites alors des choses que vous vous engagiez de faire avouer à votre docteur : et moi je vous donnai parole aussi que s'il en convenoit je serois content de lui. Mais il n'y a rien de tout cela dans votre discours ce n'est au contraire qu'une répétition, pompeuse à la vérité et éblouissante, mais enfin une pure répétition de toutes les (1) Cette lettre nous manque.

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