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hui plus peuplé qu'il ne l'étoit avant fon invafion en Saxe. La France, l'Angleterre & la Maifon d'Autriche, ont contracté des dettes confidérables pour foutenir la derniere guerre ; ils ont fait. pour cela, des emprunts ruineux, & leurs finances ne font pas encore revenues de l'état d'épuisement dont on s'efforce, depuis la paix, de les faire fortir. S'il falloit recommencer la guerre, aucune de ces Puiffances ne feroit en état de mettre fur pied de nouvelles armées & d'équiper des flottes, fur - tout l'Angleterre. C'est auffi à l'Angleterre que le Roi de Pruffe a dû les moyens qu'il a employés pour foutenir la guerre fans fouler fes peuples. Les fubfides qu'il recevoit des Anglois, fuffifoient feuls pour payer les dépentes extraordinaires qu'il faifoit, & il a rempli fes coffres avecţies contributions qu'il a levées sant en Saxe que dans les autres pays

Elle a enriPruffe.

chi le Roi de

Goût des Anglois pour

d'animaux.

où il a porté fes armes. Si on en croit les Anglois, ce qu'ils ont donné au Roi de Pruffe, lui a plus valu que la conquête de dix Villes Un dixieme de leur numé, raire, difent-ils, a été fondu dans le fien; à peine connoiflolt-on autrefois, en Allemagne, la monnoie de Prufse; on la voit aujourd'hui dans tous les marchés, &, ce qui eft de plus étonnant, c'est qu'elle revient dans les bourfes dont elle étoit fortie, par mille canaux que l'induftrie & la bonne adminiftration ont ouverts au commerce des Pruffiens. Que fera-ce quand, dans quelques années les nouvelles branches de commerce, que leur Prince vient de leur procurer, feront dans tout leur rapport?

Si la nation angloife eft hors d'état de les combats faire la guerre, les particuliers s'en dédommagent (tant les Anglois aiment à guerroyer) en faifant combattre les animaux les uns contre les autres. A Lon

dres ce font des coqs armés de toutes pieces qui fe livrent, les uns aux autres, des batailles fanglantes, ou bien ce font des chiens qui s'éventrent & fe dévorent, ou qui fe font dévorer & éventrer par des taureaux, par des tigres & autres bêtes. Dans les campagnes, quiconque a un étang, y raffemble des canards & des cignes, qui fe font une guerre cruelle, ou bien ils apprennent à des carpes, des brochets, des anguilles, à entrer en lice; tantôt ils combattent de poiffon à poiffon; tantôt ils marchent réguliérement en corps d'armée & s'attaquent avec la plus grande précifion. On m'a affuré qu'on avoit vu une de ces fanglantes batailles fe donner dans un grand réfervoir auprès de Richemont. On a longtemps parlé ici d'un projet, qu'avoit un Gentilhomme de l'Yorchire, de faire battre des rats contre des chats, & d'un

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curieux qui faifoit manœuvrer deux corps d'armée de fouris. Ces paffe temps, tout finguliers qu'ils font, font plus tolérables que ceux que prennent ceux qui, pour charmer leur ennui, paffent leur vie à la poursuite d'un cerf ou d'un fanglier, & qui, pour conferver la race de ces animaux voraces, leur facrifient la fubfiftance de leurs fujets, qu'ils puniffent avec la derniere inhumanité, quand, pour conferver les fruits de leurs travaux, ils employent la force pour en écarter les animaux qui dévaftent leurs champs. J'ai va un pays en Allema gne, où il étoit défendu aux habitants de la campagne, d'entourer leurs champs de pieux pointus; & cela, pour que les cerfs puffent impunément franchir ces barrieres & n'être pas en rifque de fe bleffer en fautant par-dessus. Dans an petit Etat d'Allemagne, je rencon

trai un jour, dans une forêt, un homme nud, attaché fur le dos d'un cerf; je lui rendis la vie, en lui donnant les moyens de rompre fes lens. Heureufement que celui qui avoit ordonné ce fupplice contre ce Braconnier, n'en fut pas inftruit avant que je quittaffe le pays; car on m'asfura qu'il y avoit peine de mort contre quiconque faifoit un pareil acte d'humanité. De pareils attentats contre l'humanité, font dignes des fiecles barbares où les hommes, plus féroces que les animaux qui habitoient les bois, s'entredétruifoient les uns les autres. 11 eft affreux que, dans le dix-huitieme fiecle, il y ait encore des hommes qui leur reffemblent, & que ces hommes foient placés au-deffus des autres. Au refte ce n'eft que dans de petits Etats qu'on voit de pareils excès. Heureulement pour T'humanité, que les Souverains des grandes

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