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C

ET Ouvrage a été réellement dérobé à fon Auteur Madame de *** qui n'ofoit le confier à la Preffe. Effrayée du fort de cette foule de Romans qui nous inondent, & dont à peine on lit les Titres, elle a refufé conftamment de fe faire imprimer: en vain a-t-on voulu la raffurer fur fon style & fur le fond de fon hiftoire, lui a-t-on dit que nos Critiques épargneroient en elle fon fexe, fes talens & fes graces; elle a toujours repliqué qu'elle fe connoiffoit affez de ridicules, & qu'elle ne vouloit pas y ajouter celui d'ennuyer le Public. On a profité du

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tems où elle étoit à l'Opéra, pour tranfcrire fon Manufcrit. L'Editeur fouhaite que la fatisfaction des Lecteurs justifie fon larcin, & contribue à lui en obtenir le pardon.

Au reste, on ne dédie cet Ouvrage à aucune Femme de Nom, qui puiffe le faire circuler, & répondre de fa bonté. On ne le portera point aux Toilettes des petites Maîtreffes. On ne dira point aux Prudes qu'il eft défendu.

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2115 TH

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CABRIOLET.

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NE femme comme moi, étourdie par réfléxion, vaine par Nature, inéchante par mode & par défœuvrement, enfin élevée par la fortune, devroit-elle tourner fes regards fur les premieres années de fa vie, & mefurer les degrés qu'elle a franchis! ne devroit-elle pas au contraire avoir oublié ce concours de circonftances, qui lui ont donné un nouvel être, jouir en repos de fon état, & s'applaudir en fecret de fon mérite? Non; elle auroit une infinité de modèles, & fa paffion eft d'en fervir.

Je veux donc, malgré mes réfléxions & l'ufage, me retracer mes actions paffées, les détailler, & faire payer à mon A 3

amour

amour-propre les fotifes dont il me rend coupable tous les jours. Changeons néanmoins les noms des Acteurs de ma Comédie: mon époux lit quelquefois des Romans, & quoique Parifienne, je fuis affez bonne pour m'intéresser à sa tranquillité.

L'un de ces Etres affez ignorés à Paris, & fans doute trop peu eftimés, un Négociant fut l'auteur de mes jours. J'avois à peine atteint ma fixiéme année, lorfqu'il expira dans les bras de fon époufe, qui le fuivit de près. Fille unique d'un homme qui avoir reçu de fes parens une fortune honnête, & qui l'avoit expofée fur les Mers pour l'augmenter, j'aurois dû m'attendre à un héritage confidérable; mais mon pere avoit été honnête-homme & malheureux. Le peu de bien qu'il laiffa fuffit à peine pour mon éducation.

Madame Daronvile, l'une de mes parentes, auprès de laquelle j'ai paffé mes vingt premieres années, me fit connoître la fatalité de mon fort, dès l'inftant où ma raison se développa. Elle me fit prévoir tous les malheurs dont j'étois menacée, puisque je manquois de ce Métal, qui feul fait les heureux. appas maillans, reprit-elle, pourront néan

Vos

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