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tique entre la Belgique et les grandes Puissances garantes de notre constitution internationale, a été écartée au début de notre existence nationale, par les dispositions des protocoles n° 14 et 15 des 1er et 7 février 1851.

Signalons encore que l'éventualité d'une union personnelle entre divers États a été souvent exclue par certains traités. Parmi les traités modernes concernant cet objet, citons l'article 6 du Traité de Londres, du 13 juillet 1863, entre le Danemark, la France, la Grande-Bretagne et la Russie, pour l'accession du roi Georges Ier au trône de Grèce. Cet article porte :

En aucun cas ne seront réunies sur la même tête la couronne de Grèce et celle de Danemark.

La participation à une union réelle est-elle incompatible avec le status de la neutralité permanente? Piccioni tranche cette question dans un sens affirmatif absolu. Schweizer se montre plus réservé. De même que des parties d'États qui ne sont point neutres peuvent être neutralisées, de même, nous dit-il, on peut concevoir qu'un État neutre comme la Belgique soit relié à un État de droit commun comme la Hollande, de telle manière. que le territoire primitif du premier demeure neutralisé. Il suffit pour cela de supposer certaine séparation au point de vue militaire, ce qui n'implique pas séparation sous d'autres rapports. L'adhésion des Puissances garantes ne serait pas indispensable ici du chef de la neutralité ou de l'importance du changement survenu dans le système politique, à l'instar de l'intervention européenne lors de la séparation de la Belgique et de la Hollande. Une telle union, ajoute l'auteur, offrirait un grand avantage aux Puissances garantes, puisque le second État ici la Hollande demeurerait sans doute également neutre

dans les guerres étrangères, et pourrait ainsi concourir à la défense des frontières belges (1).

Nous avons traité précédemment la question des alliances, spécialement avec la Hollande, dans leur rapport avec la neutralité belge. La confédération est une alliance permanente qui doit être examinée non seulement au point de vue de la neutralité, mais au point de vue de l'indépendance.

4. Les garanties. --Les protectorats. Les mandats internationaux.

Il faut se garder de créer des incompatibilités artificielles sans avoir recherché d'abord si, dans telle combinaison présentée, les exigences essentielles de la neutralité permanente telle que nous l'avons définie et appliquée à la Belgique, ne peuvent être suffisamment sauvegardées. Se plaçant à ce point de vue, il paraît impossible de considérer comme incompatible avec la neutralité permanente, toute participation à des traités de garantie, même sous le bénéfice de certaines réserves explicites ou implicites, même en compagnie des autres Puissances.

Les termes dans lesquels était conçue la proposition belge à la Conférence de Berlin concernant la neutralité du grand fleuve africain et de ses artères commerciales méritent d'être ici rappelés.

Les Puissances signataires de cet Acte et celles qui y adhéreront postérieurement reconnaissent la neutralité en temps de guerre du Congo, de ses affluents, ainsi que des rivières, routes et canaux mentionnés dans les articles III et IV. Elles prennent l'engagement de respecter et de faire

(1) Schweizer, Geschichte der Schweizerischen Neutralität, p. 89.

respecter cette neutralité, sous la réserve toutefois pour la Belgique des obligations dérivant de sa propre neutralité.

Il n'est pas sans intérêt de comparer ce texte avec celui de l'article 2 du Traité de Londres du 11 mars 1867 concernant la neutralité du Luxembourg (1).

Nous verrons bientôt dans quelle mesure a été consacrée par la Conférence de Berlin la garantie des neutralités à instaurer dans le bassin conventionnel du Congo. La Belgique n'a pas hésité à assumer pour sa part ces stipulations. Le caractère facultatif de la garantie justifie, à lui seul, cette attitude. Mais le fait d'assumer une garantie obligatoire limitée par exemple par la réserve contenue dans la proposition belge prérappelée n'était pas moins justifiable en droit, sauf examen du point de vue relatif à la prophylaxie de la neutralité, point de vue d'ordre politique et non juridique.

Il faut en dire autant du fait, par l'État perpétuellement neutre, d'assumer un protectorat. La Belgique ne peut subir de protectorat, ce qui altérerait sa constitution. internationale comme État indépendant, mais l'article 1er de la Constitution belge revisée prévoit expressément l'acceptation de protectorats par la Belgique. Schweizer compare au protectorat la situation de la Suisse par rapport à la Savoie neutralisée et à sa défense, pour montrer que le neutre à titre permanent peut être protecteur. Il rappelle en même temps qu'autrefois la Confédération suisse a exercé pareil protectorat sur des territoires limitrophes, malgré sa neutralité de principe et même dans le dessein de sauvegarder celle-ci (2).

(1) Voyez supra, p. 319

(2) Schweizer, Geschichte der Schweizerischen Neutralität, p. 90.

Il en est de même encore du fait d'assumer certains mandats internationaux d'intérêt général et de sécurité commune, tels que ceux que l'on a proposé à diverses reprises de confier à des États neutres dans divers pays. Tous ces cas devant être examinés in specie, en se pénétrant des principes régulateurs que nous avons mis en lumière, et en tenant compte des moyens que peut posséder la Belgique de faire face à de pareilles missions tout en satisfaisant couvenablement dans l'Europe occidentale à sa fonction internationale.

5.

Les enrólements. - Les expéditions militaires
à l'étranger.

Les engagements et les enrôlements de militaires, la formation de corps de volontaires à destination d'un pays étranger soulèvent en droit des gens des questions complexes et délicates.

Abstraction faite des motifs politiques qui peuvent dicter à un Gouvernement telle ou telle attitude, les États ne sont point juridiquement tenus, dans l'ordre international, d'interdire absolument à leurs ressortissants agissant en leur qualité de simples particuliers, d'entrer au service militaire d'un Etat étranger, même ayant charge de guerre, ou de subordonner pareille entrée à certaines conditions ou sanctions. L'acceptation du service militaire à l'étranger peut parfaitement demeurer l'affaire personnelle des individus qui se comportent ainsi. Elle n'induit pas de soi en responsabilité internationale l'État dont ils sont les sujets. Elle n'entraîne point par elle-même la perte de la nationalité pour les ressortissants qui agissent ainsi; elle limite seulement en conséquence le cercle des protections généralement

accordées par les Gouvernements à leurs nationaux à l'étranger.

Les licences et faveurs accordées à certains engagements ou enrôlements de volontaires, le concours prêté à la formation de corps militaires distincts de la force publique proprement dite, l'abandon fait du territoire à certaines opérations publiques de recrutement, de rassemblement, d'organisation de compagnies franches peuvent présenter un autre caractère et accuser une attitude d'État, de conséquence internationale.

Plusieurs distinctions sont toutefois ici nécessaires. D'abord, il ne faut pas confondre les engagements, les enrôlements et la formation de corps de volontaires appelés à concourir à la défense du pays même ou de ses droits à l'étranger avec ceux qui visent une tâche d'assistance pure à procurer à un autre État. Il ne peut être question d'interdire à un pays, surtout aux pays où l'armée n'a qu'un effectif limité, de recourir à l'organisation de compagnies franches réunissant les conditions déterminées par les lois et coutumes de la guerre, conditions consignées aujourd'hui dans l'article 1er du Règlement de La Haye du 29 juillet 1899. La seule question qui puisse se poser dans cet ordre, en ce qui concerne un pays neutre à titre permanent, est celle de savoir dans quelle mesure il conserve le pouvoir de guerre pour la défense de tel de ses droits nous l'avons résolue antérieurement.

En ce qui concerne l'assistance militaire procurée à l'étranger, il y a lieu de distinguer encore diverses espèces d'assistances. Il y a l'assistance accordée, dans l'ordre des luttes intérieures ou civiles, à un Gouvernement considéré comme seul régulier contre des rebelles

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