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Lydie. En effet, dans la Cyropédie, VII, 2, Crésus avoue que le premier de ses ancêtres qui fut roi passa de l'esclavage sur le trône. Mais le texte donne le même sens ; le Lydien veut dire Crésus. Cette fable n'est adoptée ni par Hérodote, I, 8 sqq., ni par Plutarque qui le copie, Symposiac., 1, 5, ni par Justin, 1, 7. Philostrate ne transcrit que la moitié du conte, Heroic., p. 28, éd. de M. Boissonade. Pline, XXXIII, 1, substitue Midas à Gygès. Mais on retrouve Gygès et son anneau dans Cicéron, traducteur fidèle, de Offic., III, 9 et 19; Lucien, Nav., s. Vola, etc. Erasme, Adag., Gygis annulus, ne laisse rien à désirer sur l'anneau magique, qui ressemble si bien au casque de Pluton, Iliad., V, 845. Fleury donne l'analyse de ce récit dans son Extr. de la Républ. Fénelon, Fable XI, remet le talisman de Gygės entre les mains d'un autre berger, aussi peu sage que le berde Candaule. C'est l'anneau enchanté du Boiardo et de l'Arioste.

ger

Pag. 235. Car le degré suprême de la méchanceté...... « Totius autem injustitiae nulla capitalior est, quàm eorum, qui, quum maximè fallunt, id agunt, ut viri boni esse videantur.» Cicér., de Offic., I, 13. Plutarque, Du flatteur et de l'ami, init.; St.-Basile, Homil. ad juven., c. 11, etc.

Mettons de l'autre côté.... Voilà le passage tant allégué par les Pères de l'église, Eusèbe, Prép. Eo., XII, 10; Théodoret, Disc. VIII et XII; Clément d'Alex., Strom., IV, 7, p. 495. Celui-ci répète encore, Str., V, p. 601, , que Platon semble prophétiser, ou qu'au moins il imite le livre de la Sagesse, II, 12: « Exterminons le juste du milieu de nous, parce qu'il est contraire à nos œuvres, nous reproche d`enfreindre la loi, et s'appelle le fils de Dieu. » Il avoue même, ibid., VI, p. 636, que les hommes vertueux parmi les Grecs ont pu recevoir l'inspiration. Il dit ailleurs, toujours occupe du disciple de Socrate, Pædagog., 11, 1, p. 150: « Cet homme qui, en cherchant la vérité des philosophes, a allumé le foyer de la philosophie hébraïque.» Lactance, Institut. divin., V, 12, nous a conservé le fragment du troisième livre de la République de Cicéron, où Furius Philus parle comme Glaucon et Thrasymaque. Le même Lactance. VI, 17, cite une autre imitation, extraite d'un ouvrage perdu de Sénèque; et l'on y trouve cette traduction fidèle, sive extendendo per patibulum manus. « Ne semble-t-il pas,

dit

Bossuet, que Dieu n'ait mis cette merveilleuse idée de vertu dans l'esprit d'un philosophe, que pour la rendre effective dans la personne de son fils, et faire voir que le juste a une autre gloire, un autre repos, enfin, un autre bonheur que celui qu'on peut avoir sur la terre? » Disc. sur l'hist., II,6, La Bruyère veut aussi que la vertu soit achevée par le malheur: « Celui-là est bon qui fait du bien aux autres ; s'il souffre pour le bien qu'il fait, il est très-bon; s'il souffre de ceux à qui il fait du bien, il a une si grande bonté qu'elle ne peut être augmentée que dans le cas où ses souffrances viendraient à croître ; et s'il en meurt, sa vertu ne saurait aller plus loin, elle est héroïque, elle est parfaite. » Caractères, ch. II. Enfin Rousseau, Emile, IV : « Quand Platon peint son juste imaginaire couvert de tout l'opprobre du crime, et digne de tous les prix de la vertu, il peint trait pour trait J. C.; la ressemblance est si frappante que tous les Pères l'ont sentie, et qu'il n'est pas possible de s'y tromper. >>

Pag. 235. Plus jaloux, comme dit Eschyle.... Portrait d'Amphiaraüs, dans les Sept devant Thèbes, vers 577. Les Athéniens en font l'application à Aristide (Plut., vie d'Arist.), et Salluste à Caton, Bell. Catil., 54.

Pag. 237. Prononcez. C'est là le sujet de la Ve Tusculane; « Virtutem ad beatè vivendum se ipsâ esse contentam.» Le génie de Platon respire dans cet admirable ouvrage. Cicéron y oppose Lélius à Cinna, Catulus à Marius, Archimède à Denys, et nous dit aussi de choisir. Il prononce hautement lui-même, c. 26, comme Epicure avant lui (Sénèque, Ep. 66), et Plotin après lui, Ennead. I, 4, 13: Que la vertu serait heureuse dans le taureau de Phalaris. Cicéron traduit sans cesse Platon; Platon est pour lui le dieu des philosophes: «Deus noster Plato. » ad Attic., IV, 16. C'est auprès de sa statue qu'il s'entretient sur l'éloquence avec Atticus et Brutus, de Clar. orat., c. 6. C'est là qu'il répète que la langue de Platon serait celle de Jupiter, si Jupiter voulait parler aux hommes, ibid., c. 31. Voy, encore, c. 51; Orat., c. 3; de Opt. gen. or., c. 6; Tuscul., V, 13; de Leg., II, 15; Ep. ad fr., I, 1, etc. Combien de grands hommes, dans tous les siècles, n'ont-ils point confirmé ce jugement! Etonné de ces témoignages, La Mothe le Vayer, quoique très-peu docile à l'empire de l'autorité, convient que, s'il n'est point toujours de l'opinion des panégyristes, « il n'en PENSÉES DE PLATON,

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attribue le défaut qu'à lui-même, soit parce qu'il ne pénètre pas assez dans les matières que traite le philosophe, soit parce que l'énergie de sa diction et les grâces de son élocution ne lui sont pas assez connues. » De la lect. de Pl. Ily a près de deux siècles que La Mothe le Vayer donnait cet exemple de modestie: le monde se perfectionne bien len

tement.

ALCIBIADE, SOCRATE.

Pag. 237. Ces mercenaires, que le peuple nomme Sophistes...

On s'étonne et on se fatigue quelquefois de ces nombreuses attaques dirigées par Socrate contre les Protagoras, les Gorgias, les Thrasymaque. « Nous ne connaissons point aujourd'hui le caractère et les principes de ces sophistes, et nous trouvons que Socrate met beaucoup d'appareil à réfuter des opinions qui ne nous paraissent mériter que du mépris. Mais les lettres Provinciales, du moins quelques-unes, sont peutètre l'ouvrage de notre langue qui ressemble le plus à ces dialogues croyez-vous que la lecture en fût plus piquante pour un étranger qui ne s'intéresse point aux querelles des Jésuites et des Jansénistes, et qui ne possède pas assez parfaitement notre langue pour sentir toutes les beautés du style de Pascal?» M. Suard, de Platon, t. III des Mélanges.

Je ne sais quel monstre énorme et sauvage.... Tout ici nous prouve ce que Montesquieu a dit dans son chapitre des Legislateurs, XXIX, 19: « Platon était indigné contre la tyrannie du peuple d'Athènes. » Aristote, Polit., II, 12, explique les causes de cette démocratie effrénée, dont il gémit d'être témoin.

Pag. 239. Et les éloges populaires le condamnent à les mériter. Dans le texte: C'est une nécessité de Diomède. Voy. les Proverbes d'Erasme. « Il fallait, dit Bossuet, essuyer les bizarreries d'un peuple flatté; c'est-à-dire, selon Platon, quelque chose de plus dangereux que celles d'un prince gâté par la flatterie.» Disc. sur l'hist., III, 5.

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Pag. 239. Le peuple ne sera donc jamais philosophe.... « La philosophie, contente de peu de juges, fuit à dessein la multitude, et lui est par-là même suspecte et odieuse. Aussi, s'élève-t-il contre elle un accusateur, le peuple applaudit, » Cicéron, Tuscul., II, 1.

Pag. 241. Cet ami sera-t-il écouté? Non.... Plutarque, Vie d'Alcib., rapporte un mot de Cléanthe: «< Socrate ne tient Alcibiade que par les oreilles. » Quel philosophe aurait pu faire un sage d'Alcibiade?

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Tel est donc l'abîme où tombent.... Ce caractère est développé merveilleusement dans le premier Alcibiade, dont Cicéron fait un brillant éloge, Tuscul., III, 32, mais dont je ne puis rien extraire, et qu'il faudrait traduire tout entier. Le fils de Clinias y montre d'abord cette fierté, cette confiance téméraire; mais désabusé par les questions de Socrate et par ses propres réponses, il reconnaît bientôt son ignorance sa faiblesse et toutes les erreurs de sa vanité: le chef des Grecs et des barbares, le conquérant de l'Europe et de l'Asie, avoue lui-même qu'il n'est pas au-dessus d'un esclave (Ainsi, dans les Mémoires de Xénophon, III, 6, Socrate et Glaucon, et IV, 2, Socrate et Euthydème). Malgré cette humiliation, ce repentir, ces larmes, Socrate désespère de la raison de son jeune disciple; il craint pour lui l'empire du peuple et l'ivresse de l'ambition. Ce dialogue, plein de génie, nous révèle tous les dangers d'une grande âme, victime de la gloire : c'est tout l'avenir d'Alcibiade.

Pag. 243. Ne diriez-vous pas un chétif esclave.... Thémistius rappelle plusieurs fois ce passage, Disc. V et XXI. M. Böckh, in Minoem, Hal. Sax., 1806, p. 48, le croit dirigé contre Simon le socratique, qui, suivant Diogène Laërce, II, 122, recevait Socrate dans sa boutique de cordonnier, et recueillait ses entretiens. Le savant disciple de Wolf attribue à Simon quelques-uns des dialogues apocryphes. Diogène raconte du moins un trait honorable pour l'artisan philosophe. Périclès lui offrit sa protection. répondit-il, vendre la liberté de mes paroles.

« Je ne veux pas,

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Pag. 245. Voyez Théagès notre ami.... Elien, Var. hist., IV, 15. En effet, il avait témoigné dès son jeune âge le plus violent désir de jouer un rôle politique; et dans le Théagès, Démodocus prie Socrate de lui indiquer un maître qui apprenne à son fils l'art de gouverner les hommes. Socrate

avoue qu'il l'ignore, et nomme ironiquement quelques sophistes; mais il finit par éclairer l'inexpérience de Théagès. qui s'attache à Socrate, et veut s'instruire auprès d'un vrai sage avant de donner des lois à sa patrie. Nous voyons ici qu'il resta philosophe.

Pag. 245. Et de ce Génie dont j'entends la voix? Voyez, dans la première Partie, le Génie de Socrate. « Socrate, comme on sait, avait un bon ange; mais il faut que ce soit le mauvais qui l'ait conduit. Ce ne peut être qu'un trèsmauvais ange qui engage un philosophe à courir de maison en maison pour dire aux gens par demandes et par réponses, que le père et la mère, le précepteur et le petit garçon, sont des ignorans et des imbéciles. L'ange gardien a bien de la peine à garantir alors son protégé de la ciguë.» Voltaire, Quest. sur l'Enc., Ange. L'auteur de cette remarque ingénieuse a-t-il été plus prudent? Est ce en flattant les hommes qu'on les instruit?

DU SERMENT.

Pag. 247. Les jugemens de Rhadamanthe.... « Quand un peuple a de bonnes mœurs, les lois deviennent simples. Platon dit que Rhadamanthe, qui gouvernait un peuple extrêmement religieux, expédiait tous les procès avec célérité. déférant seulement le serment sur chaque chef. Mais, dit le même Platon, quand un peuple n'est pas religieux, on ne peut faire usage du serment que dans les occasions où celui qui jure est sans intérêt, comme un juge et des témoins. » Espr. des Lois, XIX, 22. Beccaria, des Délits et des Peines. c. II, condamne aussi cette profanation, et atteste que jamais le serment n'a forcé un coupable à dire la vérité.

Conversaient parmi les hommes.... « O pauvres, ne vous étonnez pas si vous êtes le rebut du monde: tel était J. C. lorsqu'il a paru sur la terre, et a conversé parmi les hommes. » Bossuet, Avent, second Dimanche.

Avec de petits sacrifices et beaucoup de flatteries superstitieuses. Voyez, dans la première Partie, les Dieux. Male

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