Images de page
PDF
ePub

Marais fit des progrès si rapides dans l'art de jouer de la viole, que Sainte-Colombe, son maître, ne voulut plus Ini montrer à jouer de cet instrument, au bout de six mois de leçon. Il porta la viole à son plus haut degré de perfection, et, afin de les rendre plus sonores, imagina, le premier, de faire filer en laiton les trois dernières cordes des basses. On a de lui plusieurs pièces de viole et plusieurs opéra. Celui d'Alcyone, passe pour son chef-d'œuvre ; on y admire surtout une tempête qui produit un effet prodigieux; un bruit sourd et lugubre s'unissant avec les tons aigus des flûtes et des autres instrumens, rend toute l'horreur d'une meragitée, et le sifflement des vents déchaînés. Outre la musique d'Alcyone, il a fait celle d'Arianne e tBacchus, de Semelé, et d'Alcide, avec Louis Lully,

MARC-ANTOINE, tragédie en cinq actes, en vers, par Robert Garnier, 1576.

Le trait d'histoire qui fait le fonds de cette tragédie est si connu, les amours d'Antoine et de Cléopâtre sont si célèbres, qu'il serait superflu d'en parler ici, où il ne doit être question que de la tragédie de Robert Garnier.

On sait qu'après la défaite de Brutus et de Cassius, Antoine passa en Asie, et que les charmes de Cléopâtre, reine d'Égypte, triomphèrent de ce fier triumvir, Bercé par les amours, ivre de volupté, ce héros, vainqueur de tant de nations, s'endormit au sein de la molesse, et négligea ses intérêts et sa gloire. Bientôt Octave profita de sa faiblesse, et vint le surprendre, à la tête des légions romaines. Après la bataille d'Actium, à laquelle avait assisté Cléopâtre, et où Antoine fut vaincu, ces amans se réfugièrent dans Alexandrie. Octave, profitant de sa fortune, vint les y assiéger. C'est donc dans les murs d'Alexandrie, et sous les murs de

que

cette ville la scène se passe. Antoine entre seul, et nous fait part, dans une tirade d'environ cent-cinquante vers, qui occupe tout le premier acte, de l'histoire de sa fortune, de ses amours, puis des revers qui en ont été la suite. Il s'écrie

[ocr errors]

« O misérable Antoine! hé que te fut le jour,

>> Le jour malencontreux que te gaigna l'amour!
>> Pauvre Antoine! dès l'heure une palle Mégère,
» Crineuse de serpens, encorda ta misère !

» Antoine, pauvre Antoine ! hélas ! dès ce jour-là,
» Ton ancien bonheur de toi se recula,

» Ta vertu devint morte, et ta gloire enfinée

>> De tant de faicts guerriers se perdit en fumée :
» Dès l'heure, les lauriers à ton front si connus
» Mesprisez, firent place aux myrtes de Vénus.

» Te voylà de retour, sans gloire, mesprisé,
>> Lascivement vivant d'une femme abusé,

[ocr errors]

» Croupissant en la fange; et cependant n'as eure
» De ta femme Octavie et de sa géniture, etc. »

Le chœur, le voyant hors d'haleine, vient fort à propos interrompre ce long et ennuyeux soliloque. A celui-ci succède le philosophe Philostrate, qui ouvre le second acte. Moins verbeux qu'Antoine, il déplore, dans une tirade de quatre-vingt-quatre vers, les funestes égaremens de l'amour; et passe en revue une partie des maux qu'il a causés, et, comme on s'y attend bien, il n'oublie point les malheurs de Troie ; il dit:

« Un amour, un amour, las! qui l'eust jamais creu,

» A perdu ce royaume, embrâsé de son feu !

» Tel fut l'horrible amour, sanglant et homicide,
> Qui glissa dans ton cœur, bel hoste Priamide!

T'embrasant d'un flambeau, qui fit ardre depuis » Les Pergames Troyens, par la Grèce destruits.

»De cet amour,

Priam, Sarpedon, et Troïle,

» Glauque, Hector, Deïphobe, et mille autres, et mille
» Que le roux Simoïs, bruyant sous tant de corps,

» A poussé dans la mer, devant leurs jours sont morts. »

Le chœur, prêt à tout événement, vient se lamenter à son tour, et chante :

Il nous faut plorer nos malheurs,
» Il nous faut les noyer de pleurs,
» Les malheurs que l'on pleure
» Reçoivent quelque allégement,
»Et donnent tant de tourment,

» Comme ils font tout à l'heure, etc. >>

Cependant, Cléopâtre, accompagnée de Charmion, d'Eras, ses femmes d'honneur, et de Diomède, son secrétaire, arrive, et se justifie du reproche d'ingratitude dont elle est accusée, Moi, dit-elle :

« Que je t'aye trahi, cher Antoine! ma vie,
» Mon àme, mon soleil? Que j'aye çeste envie?
» Que je t'aye trahi, mon cher seigneur, mon roi?

» Plustôt un foudre aigu me foudroye le chef,
Plustôt puis-je cheoir en extrême méchef,
» Plustôt la terre s'ouvre, et mon corps engloutisse,
» Plustôt un tigre glout de ma chair se nourrisse,

» Et plustôt et plustôt sorte de nostre Nil,

» Pour me dévorer vive, un larmeux crocodile ! »

Ces citations doivent suffire pour donner une idée de cette tragédie: ainsi nous allons nous hâter d'arriver à la catastrophe.

Antoine, abandonné des siens, et certain de tomber au pouvoir d'Octave, ne voit plus d'autre ressource que la mort,

et prie Lucile, son ami, de la lui donner. Celui-ci prend l'épée que lui présente Antoine ; mais au lieu de l'en frapper, il se perce lui-même et lui apprend à mourir. Antoine alors la retire sanglante du corps de son ami, et suit son généreux exemple. Cléopâtre elle-même ne peut lui survivre. Elle dit à ses enfans:

« Adieu, ma douce eure, adieu ! » Et ceux-ci lui répondent :

le

« Adieu, madame. »

Alors tout le monde se retire, et Cléopâtre reste seule avec corps d'Antoine. Ayant tari la source de ses pleurs, et pourtant voulant lui donner les dernières preuves de sa tendresse, elle déclame ces vers qui finissent la tragédie :

[ocr errors]

>> Moi, ne le pouvant plus de mes pleurs arrouser
>> Que feray-je elarmée, hélas ! que le baiser?
>> Que je vous baise donc, ô beaux yeux, ma lumière !
>> O front, siège d'honneur ! belle face guerrière !
» O col, ô bras, ô mains, ô poitrine, où la mort
» Vient de faire, ô méchef! son parricide effort!
» Que de mille baisers, et mille et mille encore,
» Pour office dernier, ma bouche vous honore!

Et qu'en un tel devoir, mon corps affaiblissant,
» Défaille dessus vous, mon âme vomissant. »

MARC-ANTOINE, tragédie en cinq actes, en vers, par Mairet, 1630.

Antoine, vaincu à la bataille d'Actium, et assiégé dans Alexandrie, obtient quelques avantages et espère de rétablir sa fortune. Dans cette idée, il rejette l'entreprise de sa femme Octavie, qui, pour venir le joindre, a franchi toutes sortes d'obstacles et de périls; enfin, il veut de nouveau tenter les hasards d'une bataille; mais tout son camp, séduit et cor

rompu, se rend à Octave. Alors, Antoine se croit trahi par Cléopâtre elle-même. Il l'accable de reproches; elle fuit, et, quelques momens après, lui fait annoncer qu'elle s'est immolée. Ce faible amant le croit, et prend la résolution de l'imiter. Il exhorte Lucile, son confident et son ami, à lui rendre ce tragique service. Lucile, après avoir résisté, prie Antoine de détourner la tête; mais, au lieu de le frapper, il se tue lui-même. Alors le triumvir imite cet exemple courageux. Toutefois, il vit encore assez de tems pour apprendre que Cléopâtre respire, et pour se faire porter auprès d'elle. Cette reine elle-même parvient à tromper Octave, qui voulait lui sauver la vie, et la faire servir d'ornement à son triomphe, et se fait donner la mort par un serpent. Mairet aurait pu tirer meilleur parti du rôle d'Octavie: en effet, elle ne paraît que deux fois, et ses deux apparitions ne produisent aucun événement. Le caractère d'Antoine est peint avec les mêmes traits que ceux que l'histoire nous offre. C'est un composé de grandeur et de faiblesse : c'est un esclave qui rougit de ses fers, et qui ne peut les briser. L'action de Lucile, qui apprend à Marc-Antoine comment il doit mourir, est belle et vraiment tragique.

MARCASSUS (Pierre de), est auteur d'une traduction d'Argenis, et de deux pièces de théâtre, intitulées les Pêcheurs Illustres, et Éromène.

MARCÉ (Roland de) a composé, en 1601, Achab, tragédie, sans distinction de scènes.

MARCEL a fait une comédie, intitulée Mariage sans Mariage. L'auteur et la pièce sont aussi peu connus l'un que

l'autre.

« PrécédentContinuer »