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-Ne pensez pas qu'il était dans le monde ainsi que sont dans le monde la terre, les troupeaux et les hommes, ou bien le ciel, le soleil, la lune et les étoiles; mais ainsi qu'un artisan qui dirige ce qu'il a fait. C'est pour cela qu'il est dit : « Et le monde a été fait par lui. » Il ne l'a pas fait ainsi que travaille un ouvrier; l'ouvrier est extérieur à son ouvrage. Mais Dieu construit, répandu dans le monde, présent en tout lieu; il construit, et il n'est absent de rien. La présence de sa majesté fait ce qu'il fait et gouverne ce qu'il fait; il était dans le nionde comme celui par lequel le monde est fait.

S. CHRYS. Et en second lieu, parce qu'il était dans le monde, mais non pas comme contemporain du monde, il est ajouté : « Et le monde a été fait par lui. » Par là, il nous ramène encore à l'éternité d'existence du Fils unique. Celui, en effet, à qui il a été dit que tout l'univers est son ouvrage, quel que soit son peu de sens, il sera obligé d'avouer que l'ouvrier existait avant l'œuvre. THEOPH. Ces paroles en même temps détruisent l'erreur insensée de Marcion, qui prétendait que c'était un méchant créateur qui avait fait toutes choses; ainsi que celle d'Arius, qui disait que le Fils de Dieu était une créa

ture.

S. AUG. Qu'est-ce que ceci : le monde a été fait par lui-même? Le ciel, la terre, la mer et toutes les choses qui existent en eux sont appelés le monde. Dans un autre sens, ceux qui aiment le monde sont appelés le monde; et c'est ainsi qu'il est dit : « Et le monde ne l'a pas connu. » Pourrait-on dire que les cieux ou les anges ou les astres n'ont pas connu le Créateur que confessent les démons? Toutes les

sus te deducens ad æternam existentiam Unigeniti : qui enim audierit quoniam opus ejus hoc totum, etsi valde insensibilis fuerit, cogetur concedere ante opera esse factorem. THEOPH. Simul autem hic et Marcionis subvertit rabiem, qui malignum conditorem cuncta produxisse dicebat: necnon et Arii, qui filium Dei dicebat creaturam.

esse desinit et evanescit ; sic cœlestis Pater | temporaneus, propter hoc induxit: Et munsi Verbum suum loqui cessavit, effectus dus per ipsum factus est; per hoc et rurVerbi (hoc est universitas Verbo condita) non subsistit. (AUG., ut sup.). Non autem putes quod sic erat in mundo quomodo in mundo est terra, pecora, et homines; vel cœlum, sol, et luna, et stellæ ; sed quomodo artifex regens quod fecit. Unde se quitur: Et mundus per ipsum factus est. Non enim sic fecit quomodo facit faber: qui enim fabricat, extrinsecus est ad illud quod fabricat: Deus autem infusus mundo fabricat, ubique positus fabricat, et non recedit aliquo. Præsentia majestatis facit quod facit, et gubernat quod facit. Sic ergo erat in mundo, quomodo per quem factus est mundus.

CHRYS. (hom. 7, in Joan.). Et iterum, quia in mundo erat, sed non ut mundi con

AUG. (ut sup.). Quid est autem, mundus per ipsuni factus est? Coelum, terra, mare, et omnia quæ in eis sunt, mundus dicitur. Iterum in alia significatione dilectores mundi mundus dicuntur: de quo sequitur: Et mundus eum non cognovit : non enim cœli, aut angeli, aut sidera non cognoverunt Creatorem, quem confitentur dæmonia! Om

créatures lui ont rendu hommage de toutes parts; mais quels sont ceux qui ne l'ont pas connu? Ceux qui sont appelés le monde, parce qu'ils aiment le monde. En aimant le monde, nous habitons par le cœur dans le monde; tandis que ceux qui n'aiment pas le monde sont de corps dans le monde et habitent le ciel par le cœur, ainsi que dit l'Apôtre « Notre conversation est dans le ciel (1). » Ceux qui aiment le monde ont mérité d'ètre désignés par ce monde qu'ils habitent. Ainsi que nous disons: Cette maison est bonne ou mauvaise, en accusant par là ou en louant, non pas les murs, mais les habitants; ainsi nous appelons monde ceux qui habitent le monde par leur cœur.S. CHRYS. Ceux qui étaient les amis de Dieu le connurent avant sa présence corporelle, c'est-à-dire avant son avénement en ce monde; et c'est en ce sens que le Christ a dit : « Abraham, votre père, a tressailli pour voir mon jour. » Lorsque les Gentils nous interpellent en disant : Pourquoi est-il venu dans les derniers temps pour opérer notre salut, après nous avoir négligés si longtemps? nous leur répondons qu'il était auparavant dans le monde, pourvoyant à ses œuvres, et connu de tous ceux qui en étaient dignes; que si le monde ne l'a pas connu, cependant ceux dont le monde n'était pas digne (2) l'ont connu. En disant : Le monde ne l'a pas connu, il a exprimé rapidement la cause de cette ignorance en appelant monde ceux qui ne sont attachés qu'au monde et qui ne savent que ce qui est du monde. Il n'y a rien qui trouble autant l'àme que de se laisser dissoudre dans l'amour des choses présentes.

(1) Le grec roketsuuz veut dire société civile, et c'est dans ce sens que le même apôtre nous appelle des concitoyens des saints et des serviteurs de Dieu (Ephes., 2, v. 19). (2) Allusion aux paroles de l'apôtre (Hebr., 11, v. 37).

nia undique testimonium perhibnerunt. Sed | etiam ante corporalem præsentiam (sive adqui non cognoverunt eum? Qui amando mundum dicti sunt mundus: amando enim mundum habitamus corde in mundo: nam qui non diligunt mundum, carne versantur in mundo, sed corde inhabitant cœlum; sicut Apostolus dicit (ad Philip., 3): Nostra conversatio in cœlis est. Amando igitur mundum, hoc appellari meruerunt ubi habitant quomodo enim cum dicimus: Mala est illa domus aut bona, non parietes accusamus aut laudamus, sed inhabitantes; sic et mundum dicimus qui inhabitant mundum amando. CHRYS. (hom. 7, in Joan.). Qui autem Dei erant amici, eum cognoverunt

ventum in hunc mundum : unde et Christus ait (Joan., 3): Abraham pater vester exultavit ut videret diem meum. Cum ergo nos interpellant Gentiles dicentes : Quid est quod in ultimo tempore venit nostram operaturus salutem, tanto tempore negligens nos? Dicimus quoniam et ante hoc in mundo erat, et providebat operibus suis, et omnibus dignis cognitus erat: etsi eum mundus non cognovit, hi tamen quibus mundus non erat dignus, eum cognoverunt. Dicens autem: Mundus eum non cognovit, breviter causam ignorantiæ posuit: mundum enim vocat homines, qui soli mundo

Il est venu chez soi, et les siens ne l'ont point reçu. Mais il a donné à tous ceux qui l'ont reçu le pouvoir d'être faits enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom, qui ne sont point nés du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme, mais de Dieu même.

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S. CHRYS. Il dit que le monde ne l'a pas connu, en parlant des temps antérieurs. Dans ce qui reste, il passe aux temps contemporains de sa contemplation, et il dit : « Il vint chez soi. »S. AUG. -Parce que toutes choses ont été faites par lui-même, ou bien par ces mots chez soi, il entend le monde, ou bien la Judée qu'il avait choisie pour héritage S. CHRYS. Il vint chez soi, non par l'effet d'une gràce nécessaire, mais par une faveur toute gratuite envers ses enfants. Mais d'où vint-il? Celui qui remplit toutes choses est présent partout. Il vint par la condescendance qu'il eut pour nous; et parce qu'étant dans le monde qui ne pensait pas qu'il y fût, il n'en était pas encore connu, il daigna se revêtir d'un corps. Il appelle présence ou avénement cette manifestation et cette condescendance. Dieu miséricordieux (1) a fait toutes choses afin que nous soyons revêtus de la splendeur de sa vertu. C'est pourquoi il n'entraîna personne par violence ni par nécessité; mais il attira à lui, par la persuasion et par les bienfaits, ceux qui voulurent se rendre. Quelquesuns le reçurent lorsqu'il vint, et d'autres ne le reçurent pas. Il ne veut pas avoir de serviteur qui le soit malgré lui, et par force. Etre entraîné malgré soi, c'est tout-à-fait la même chose que de ne pas servir. « Et

(1) Le grec, un peu interverti en cet endroit, porte o páv‡pwños xxi évsрysTIXÒS,

aimant les hommes et bienfaisant.

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Quia scilicet omnia per ipsum facta sunt. THEOPH. Vel per propria mundum intelligit: sive Judæam, quam pro hæreditate elegerat. CHRYS. (hom. 9, in Joan.). In propria ergo venit, non gratia suæ necessitatis, sed gratia beneficii suorum. Sed unde venit qui omnia implet, et ubique adest? Ea quidem quæ ad nos condescensione hoc operatus est: quia enim in mundo existens non putabatur adesse, eo quod nondum co. gnoscebatur, dignatus est induere carnem. Manifestationem vero hanc et condescensionem, præsentiam vocat (sive adventum, ut jam sup.). Misericors autem existens Deus omnia facit, ut nos secundum virtutem splendeamus: et propter hoc quidem

les siens ne le reçurent pas. » Ce sont les Juifs qu'il appelle siens, comme étant son peuple particulier, ainsi que tous les hommes qui ont été créés par lui; comme plus haut il avait dit, en rougissant pour toute la nature humaine, «que le monde fait par lui n'avait pas connu son créateur. » Aussi, en ce passage, indigné de l'ingratitude (1) des Juifs, il éclate en une accusation grave, et dit : « Et les siens ne l'ont pas reçu.» S. AUG. Or, si personne ne le reçoit, personne n'est sauvé; car personne ne sera sauvé, si ce n'est celui qui aura reçu le Christ. Et c'est pour cela qu'il ajoute : « Tous ceux qui l'auront reçu.»> -S. AUG. Soit qu'ils soient esclaves, soit qu'ils soient libres, soit grecs, soit barbares, soit savants, soit illettrés, soit femmes, soit hommes, soit enfants, soit vieillards, tous ont été rendus dignes du même honneur dont il est dit : « Il leur donna le pouvoir d'être faits. enfants de Dieu.»S, AUG.- Par une grande bienveillance, celui qui est né Fils unique n'a pas voulu rester seul; il n'a pas craint d'avoir des cohéritiers, car son héritage n'est point diminué par la participation qu'il en donne. S. CHRYS. — Il ne dit pas qu'il les fit devenir enfants de Dieu, mais qu'il leur donna le pouvoir de devenir enfants de Dieu, nous apprenant par là que nous avons besoin de beaucoup de soins pour conserver toujours sans tache cette image de l'adoption qui a été imprimée et formée en nous par le baptême. Il nous montre aussi par là que personne ne pourra nous enlever ce pouvoir, à moins que nous ne nous l'enlevions à nous-mêmes. Ainsi que, parmi les

-

[1] Auparavant il y avait dans l'édition de Paris : Judæorum anxius in devotione, et dans celle d'Anvers : Pro Judæis antius in devotione. Nous avons rétabli le sens d'après le Στο άγνωμοσυνη δυσανασχετών.

nullum violentia neque necessitate, suasione vero et beneficiis volentes ad se attrahit; et propterea venientem eum alii quidem susceperunt, alii vero non receperunt: nullum enim vult invitum neque coactum habere famulum: invitum enim trahi, par est ac totaliter non servire : unde sequitur: Et sui eum non receperunt. IDEM, hom. 8. Judæos nunc suos dicit, ut populum peculiarem; sed et omnes homines, ut ab ipso factos; et sicut superius pro communi verecundatus natura dicebat quoniam mundus per ipsum factus conditorem non cognovit; ita et hic rursus pro Judæorum ingratitudine indignatus in graviorem prorumpit accusationem, dicens: Et sui eum non receperunt.

AUG. (ut sup.). Si autem omnino nullus accepit, nullus ergo salvus factus est: nemo enim salvus fiet, nisi qui Christum receperit venientem : et ideo addidit : Quotquot autem receperunt eum. CHRYS. (hom. 9, in Joan.). Sive sint servi, sive liberi; sive Græci, sive barbari; sive insipientes, sive sapientes; sive mulieres, sive viri; sive pueri, sive senes: omnes eodem digni facti sunt honore, de quo sequitur : Dedit eis potestatem filios Dei fieri. AUG. (ut supra). Magna benevolentia: unicus natus est, et noluit manere unus; non timuit habere cohæredes, quia hæreditas ejus non fit angusta, si eam possederint. CHRYS. (hom. 9, ut sup.). Non autem dixit quoniam fecit eos filios Dei fieri, sed dedit eis

hommes, ceux qui reçoivent le domaine d'une chose la possèdent presque autant que ceux qui la leur ont donnée; à plus forte raison, nous qui avons reçu cet honneur de Dieu. Il a voulu nous montrer aussi que cette grâce arrive à ceux qui la désirent et qui la cherchent. Il est au pouvoir de notre liberté et du ressort de la gràce (1) de devenir enfants de Dieu.

THEOPH. Dans la résurrection, nous serons faits enfants de Dieu d'une manière parfaite, d'après ce que l'Apôtre nous dit : « Attendant l'adoption des enfants de Dieu la rédemption de notre corps. » Il nous donne le pouvoir de devenir enfants de Dieu, c'est-à-dire d'acquérir cette grâce dans la vie future.

S. CHRYS. Et parce que, dans ses biens ineffables, il appartient à Dieu de donner sa gràce et à l'homme de présenter sa foi, il ajoute : « A ceux qui croient en son nom. » Que nous dites-vous là, ô Jean? quel sera le supplice de ceux qui ne l'auront pas reçu?» Est-ce que leur supplice n'en sera pas plus grand pour avoir eu le pouvoir de devenir enfants de Dieu et pour s'être privés volontairement eux-mêmes d'un si grand honneur? Un feu inextinguible les recevra, ainsi que cela sera dit plus clairement ensuite par l'évangéliste (2).

S. AUG. Nous croyons donc que l'on devient enfants de Dieu et l'on naît frères du Christ. Si les enfants ne naissent pas, comment

que

(1) Ce membre de phrase ne se trouve pas dans saint Chrysostôme, mais il est la conséquence de ce qui précède. Il est dans la Glose.

(2) Le grec zxzıdvfs est au prétérit, il a déclaré. C'est une allusion à ce que dit cet Evangile au chapitre 3, sur la colère qui attend les incrédules.

poris nostri. Dedit ergo potestatem filios Dei fieri, id est, hanc gratiam in futura gratia consequendi.

potestatem filios Dei fieri, ostendens quoniam multo opus est studio, ut eam quæ in baptismo nobis impressa et formata est, adoptionis imaginem incontaminatam sem- CHRYS. (hom. 9, ut sup.). Et quia in per custodiamus. Simul autem et ostendens his ipsis ineffabilibus bonis, hoc quidem quoniam potestatem hanc nullus nobis au- est Dei (scilicet dare gratiam), illud vero ferre poterit, nisi nos ipsi auferamus: si hominis, id est, præbere fidem, subjunenim qui ab hominibus dominium aliqua-git: His qui credunt nomine ejus. Quid rum rerum suscipiunt, tantum habent ro- igitur non dicis nobis, o Joannes! quod bur quantum fere hi qui dederunt, multo eorum sit supplicium qui eum non recepemagis nos, qui a Deo potimur hoc honore.runt? Quia nunquid isto supplicio fiet maSimul autem ostendere vult quoniam hæc jus, quando præjacente eis potestate filios gratia advenit volentibus et studentibus: Dei fieri, non fiunt, sed volentes seipsos etenim in potestate est liberi arbitrii, et tanto privant honore? Sed etiam inextingratiæ operatione, filios Dei fieri. THEOPH. guibilis eos suscipiet ignis: quod postea Vel quia in resurrectione filiationem per-manifestius revelavit. fectissimam consequemur; secundum quod AUG. (ut supra). Credentes ergo quis Apostolus dicit (ad Rom., 8): Adoptionem | Filii Dei fiunt, et fratres Christi utique filiorum Dei expectantes redemptionem cor-nascuntur. Nam si non nascuntur filii, quo

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