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à manger avec opiniâtreté, enfin la digestion reprend bientôt son énergie. D'après son siége, la colique est dite ombilicale, épigastrique, rénale, etc.; d'après son intensité, sa durée, légère, modérée, violente, aiguë, chronique. Elle peut se compliquer de gastrite, d'ictère, de dyssenterie, de péritonite, de fièvre typhoïde, et enfin des autres formes saturnines. Sur un relevé de mille deux cent dix-sept cas, elle a coïncidé cinq cent vingt-cinq fois avec l'anthralgie, quarante-quatre avec la paralysie et trente-cinq avec l'encéphalopathie.

Diagnostic différentiel. La colique saturnine peut être confondue avec toute autre colique métallique, la mercurielle, l'arsenicale, et surtout avec la colique de cuivre. Celle-ci, d'après M. Tanquerel des Planches, s'en distingue aux caractères suivants. La douleur embrasse tout le ventre et ne s'étend pas au delà; elle est continue, exacerbante, augmente par la pression; le ventre est plus volumineux, non contracté; il y a diarrhée, les selles sont verdâtres, fréquentes, répétées avec épreintes. Le goût cuivreux se manifeste quelquefois, l'haleine. n'est point fétide. Sa marche est plus régulière, plus successive; elle n'offre pas enfin le cachet particulier de la colique de plomb, ne s'accompagne pas de névralgie, de cystalgie. Cependant M. Blandet, qui, tout récemment, a observé plusieurs coliques de cuivre, dit que d'abord la colique est assez violente pour obliger les malades de se courber en deux, de se serrer le ventre avec les mains; qu'elle présente des exacerbations et des rémissions, se montre par accès de une, deux, trois heures et plus; qu'il y a tantôt constipation, tantôt diarrhée, et presque toujours céphalalgie assez vive, de la courbature, des nausées, des vomissements bilieux, des évacuations verdâtres et quelquefois sanguinolentes, offrant les réactions du cuivre à l'analyse. La fièvre est rare. D'après cet auteur, elle offrirait donc plus d'analogie symptomatique avec la colique de plomb que ne semblerait l'admettre M. Tanquerel. La colique cuivreuse se déclare chez les ouvriers qui manient ou travaillent. le cuivre, les fondeurs, les tourneurs, les chaudronniers, etc., surtout quand ils n'ont pas les soins de propreté convenables.

Elle attaque principalement ceux qui travaillent le cuivre pour la première fois, par conséquent les apprentis; elle est sans gravité et ne nécessite pas même l'entrée des malades dans les bôpitaux. Les moyens préservatifs sont la propreté, la disposition convenable des ateliers, et, ajoute M. Blandet, l'usage du lait, de l'eau albumineuse.

· Certains fruits acides, les boissons acides, le cidre, le poiré, etc., peuvent donner lien à la colique dite végétale, qui, sous les noms de colique de Poitou, de Madrid, de Dewonshire, de mal des Barbiers, de Beriberie dans l'Inde, a été prise ou confondue avec celle de plomb. Plusieurs auteurs admettent même que, dans plusieurs de ces cas, on a eu affaire à la colique de plomb, sans contester toutefois la colique végétale. Gelle-ci s'en distingue en ce que le ventre, ordinairement ballonné, résonne à la pression. Les douleurs sont très-vives et augmentent par la pression, occupent tout le ventre et n'offrent pas de paroxysmes bien marqués. Il y a tantôt diarrhée, tantôt selles cholériques et sanguinolentes. Il est bon de remarquer cependant que lorsque ces boissons auront séjourné dans des vases en plomb, la colique offrira alors des caractères mixtes ou même les caractères de la colique plombique (voyez faits pratiques). Comme notre intention n'est pas de faire un traité spécial sur l'affection saturnine, nous donnerons seulement les traits principaux des autres formes de cette maladie.

ANTRHALGIE SATURNINE. RHUMATISME MÉTALLIQUE DE SAUVAGES. Caract risée par une exaltation de la sensibilité et la perversion de la contractilité des parties qui sont sous la dépendance des nerfs de la vie de relation, elle est ordinairement récédée d'engourdissement, de lassitudes dans les parties qu'elle doit envahir,' pendant plusieurs jours, pendant plusieurs mois, ou débute brusquement, et, le plus souvent, fa nuit. Sur sept cent cinquante-cinq cas, elle a été précédée par la colique deux cent cinq fois, par la paralysie cinq, par l'encéphalopathie une. Son siege est, le plus souvent, sur les membres supérieurs, puis, et dans l'ordre de sa plus grande fréquence, sur les membres inférieurs, les lombes, les parties thorachiques,

le dos et la tête, ou simultanément sur ces parties. La douleur qui en forme le caractère dominant, existe sans rougeur ni inflammation, ne suit pas exactement le trajet anatomique des cordons nerveux, siége principalement dans le sens de la flexion, plus souvent dans les grandes articulations que dans la continuité des membres. M. Tanquerel ne l'a pas observée le long du rachis comme M. Ollivier d'Angers, mais sur les côtés. Très-vive et très-variable dans ses limites, son intensité, ses caractères, elle devient plus aiguë par accès, diminue par la pression, augmente par le mouvement, s'accompagne de divers troubles de la motilité, tels que crampes, dureté, tension des parties; elle est dilacerante, convulsive, se manifeste par élancements brusques, rapides, électriques, diminue par l'application des corps froids, par la compression. Les paroxysmes se succèdent à des intervalles de quelques minutes, d'une heure, etc. Dans les antrhalgies violentes, les muscles sont affectés de crampes, de rigidité tétanique, de tremblements, de frémissements, forment des tumeurs inégales, les mouvements sont in complets, irréguliers. Le siége de la douleur peut être dans la peau, les muscles, les os simultanément, ou borné à l'une de ces parties. Les dérangements fonctionnels sont en rapport avee les rôles organiques des parties affectées; si c'est à la face, celle-ci est grippée, grimacière; si c'est au con, il y a torti colis; si c'est aux lombes, les malades ne peuvent ni se baisser ni se ployer sans augmenter la douleur. Lorsqu'elle siége à la fois sur les diverses parties d'un membre, elle n'offre pas éga lement dans toutes ses parties le même caractère, ni la même, intensité; elle est changeante, mobile, sans cependant sauter d'un membre à un autre. L'antrhalgie ne diffère enfin de la colique saturnine que par son siége elle offre, comme elle, la même inconstance, la même diversité dans ses symptômes, sag marche, sa durée, ses récidives, ses rechutes, sa terminaisons L'influence de l'âge, du sexe, du climat, des saisons sur sa production, n'est pas mieux connue. Traitée convenablement; elle peut guérir en trois ou six jours, même spontanément, et ne devient mortelle qu'en passant à une autre forme. M. Tan

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querel n'en cite qu'un seul cas. En l'absence d'altérations thologiques, il la considère comme une névralgie saturnine, siégeant sur les filets nerveux de la vie de relation, ou provenant de cette partie de la moelle qui préside à la sensibilité. Dans le rhumatisme aigu, il y a gonflement, rougeur, douleur à la pression, réaction fébrile, etc.; dans le rhumatisme chronique, la douleur est erratique, saute facilement d'un membre à un autre ; dans la névralgie idiopathique la douleur siége et suit seulement le trajet des cordons nerveux, n'est pas aussi mobile, etc.; dans la courbature, la douleur est vague, générale ou partielle. Ces caractères et surtout les circonstances antérieures, sa coïncidence avec d'autres formes saturnines, ne permettent pas de confondre l'anthralgie avec ces maladies.

PARALYSIE et ANESTHÉNÉSIE SATURNINES. La première consiste dans l'abolition du mouvement volontaire, la seconde dans celle du sentiment. Différentes l'une de l'autre, ces deux affections peuvent exister isolément ou simultanément. Elles se développent sous les mêmes influences que la colique, et surtout chez les personnes exposées pendant longtemps aux émanations plombiques; aussi sont-elles précédées de caractères prodromiques très-marqués.

La paralysie peut affecter les divers muscles de la vie de relation. Sur cent deux cas, M. Tanquerel l'a observée quatre-vingt-dix-sept fois sur les membres supérieurs, quinze sur les inférieurs, deux sur les muscles intercostaux, un sur les muscles sterno-mastoïdien, pectoraux et grand dorsal. Chez ces individus, l'aphonie s'est manifestée seize fois et le bégaiement ou difficulté de la parole treize. Elle siége sur les muscles extenseurs et s'annonce par des lassitudes, un sentiment de pesanteur, de froid, d'engourdissement, de faiblesse, de brisure, par un tremblement léger des parties qu'elle doit envahir. Trèsrarement elle débute brusquement. Sur deux cents cas, elle a été précédée quatorze fois de coliques. Quand elle est déclarée, les malades éprouvent un sentiment de lourdeur, de fatigue des parties paralysées, surtout dans les circulations où passent les muscles affectés, quelquefois la sensation d'un froid glacial ap

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préciable au toucher. La sensibilité persiste, est abolie ou affai blie. Les lésions fonctionnelles des mouvements sont en rapport avec celles des muscles affectés. Sa marche est ordinairement lente, progressive; elle peut mettre depuis quelques heures jusqu'à quinze jours à se dessiner, puis rester stationnaire, diminuer ensuite insensiblement ou durer des jours, des années et même toute la vie. Elle est d'autant plus facile à guérir qu'elle est moins étendue, plus récente, l'individu plus jeune, et a eu moins d'attaques. Elle peut guérir spontanément, quoique rarement. Musgrave cite un càs de guérison après dix ans. La mort est due, le plus souvent, à des complications, si ce n'est dans la paralysie des muscles intercostaux, qui est promptement mortelle. L'aphonie et même la perte de la parole ne doivent pas inspirer de vives inquiétudes. Elles suivent ordinairement la marche de la paralysie des membres, qu'elles accompagnent assez souvent et dont elles n'aggravent pas le pronostic. Lorsque la maladie se prolonge, le pouls devient faible, mou, lent, le sang séreux, peu riche en fibrine, les parties paralysées flasques, flétries, émaciées, la peau pà!e, livide, jaune, terreuse, rude au toucher; l'épiderme s'écaille; les muscles diminuent de volume, se relâchent, s'atrophient et contrastent d'une manière très-marquée avec le relief des muscles voisins non affectés; car la paralysie peut être partielle ou bornéc seulement à un système de muscles. Enfin surviennent le marasme général, des infiltrations partielles ou générales, etc. Elle est considérée par Boerhaave, Baglivi, Broussais, comme sympathique de la colique saturnine; par Astruc, Bordeu, comme siégeant à l'origine des nerfs; par M. Tanquerel des Planches, s en l'absence d'altérations pathologiques, comme une maladie nerveuse plombique, ayant son siége dans les cordons posté→ rieurs de la moelle, origine des nerfs des muscles du mouvement. On n'a trouvé qu'une plus grande quantité de sérosité dans le canal rachidien, et les muscles, flétris, atrophiés, décolorés, ont donné du plomb (Devergie). D'après les membres et les parties affectées, M. Tanquerel établit plusieurs variétés de paralysie saturnine.

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