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MARS 20.

XX. JOUR DE MAR S. SAINT CUTHBERT,

ÉVÉQUE DE LINDISFARNE.
Tité de la Vie écrite par Bede , & de l'histoire

Ecclésiastique du même Auteur, 1. 4. depuis le 27
chapitre , jusqu'au 32. de l'Histoire de Durham
continuée par Turgor, jusqu'à Pan 1104. &

par
Simeon, jusqu'en 1161 (elle a été publiée par
Bedford); d'une ancienne Hymne MS. de Saint
Cuthbert in Bibl. Coton. n. 41, apud Wanley,
p. 184. de quatre prieres latines composées en
l'honneur du même Saint , qu'on trouve dans un
Ms, de la Bibliotheque de l'Eglise de Durham,
no.190. Voyez aulli Wanley, Catal. T. 2.p.297
& Harpsfield, Sec. 7: 4: 34 )
Ľ' A N 6876

yuborio

sic' Les Northumbres ayant embraffé la Foi, fous le regne du pieux Olwald, le saint Evêque Aïdan fonda deux Monafteres, l'un à Mailros sur la Tweed , & l'autre dans lille de Lindisfarne (a). Il les soumit tous deux à la Regle de saint Colomb, & choisit le dernier pour le principal lieu de la résidence. Ce fut dans le voisinage de MailTos, que naquit saint Cuthbert (6). La premiere occupation de fa jeunesse fut de garder les troue

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(a) Cette ille a depuis été | milles de Berwick. appellée Holy fandi, c'est-à- (6) Cuthbert fignifie, lla dire , ifle Cainte, a saurs du lujire par la science. On dit autti grand nombre de Saints qui Guthbert, qui signifie digne, da y ont vécu. Elle et à quatre Dielto.

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peaux de son pere sur les montagnes. La vie. MARS 20. édifiante des Moines de Mailros fit sur lui la plus vive impression ; & il réfolut de les imiter , en

; retraçant leurs pieuses pratiques, autant que cela lui feroit possible. Une nuit, que selon fa coutume , il prioit auprès de son troupeau , il vit monter au ciel au milieu des Anges , lame de saint Aïdan, qui venoit de mourir dans l'isle de Lindisfarne. De profondes réflexions sur la gloire que Dieu réserve à ses serviteurs, le détacherent entiérement du monde. Il alla prendre l'habit dans le Monastere de Mailros, dont faint Eate étoit Abbé , & faint Boisil Prieur. Il étudia , sous le dernier , l'Écriture Sainte , dont il acquit une parfaite connoissance. Ses progrès dans la perfection furent très-rapides, & il devint bientôt digne d'être proposé pour modele à tous les Freres.

Lorsqu'Eate alla prendre la conduite du Mo. nastere de Rippon, fondé par le Roi Alcfrid , il amena saint Cuthbert avec lui, & le chargea du soin de recevoir les hôtés. On fait que de tous les emplois monaftiques, c'est-là un des plus dangereux: Cuthbert s'en acquitra avec les plus saintes dispositions. Il lavoit les pieds aux étrangers, qu'il fervoit enfuite avec une humilité & une douceur admirables , persuadé qu’on sert JesusChrist en fervant fes membres. Mais il n'étoit pas de ces hommes que les occupations extérieures dissipent ; son ame étoit toujours unie à Dieu par un parfait recueillement. Le gouvernement de l'Abbaye de Rippon ayant été confié à faint Wilfrid, Cuthbert retourna à Mailros avec faint Eate, & succéda dans la charge de Prieur , à saint Boisil, qui mourut de la peste en 663.

Non content de former les Moines à la pers fection de leur état , & par ses discours, & par

ses exemples, il travailloit encore à détruire les restes de superstition que le peuple tenoit de ses MARS 20. peres. Il fortoit du Monaftere , dit le vénérable Bede, quelquefois à cheval , plus souvent à pied, pour ramener dans la voie du falut une multitude de malheureux, qu'il regardoit comme des brebis égarées. Les paysans vivoient alors dans une ignorance profonde des vérités de la Foi, parce qu'il y avoit peu d'Eglises paroissiales à la campagne. Mais quand ils savoient qu'un Prêtre faisoit des Instructions dans quelque village , ils y couroient en foule ; & le Ministre du Seigneur avoit la confolation de les voir écouter ses discours avec attention , & conformer leur vie aux maximes évangéliques qu'il leur annonçoit. Ce fut ce que Cuthbert éprouva. Aussi avoit-il tout ce qu'il faut pour opérer des conversions. Son éloquence étoit des plus persuasives & des plus touchantes : ce qui , joint à un certain éclat qui se répandoit sur son visage, donnoit à ses Sermons une force merveilleuse. Personne ne pouvoit lui résister. Tous fes auditeurs le regardoient comme un Ange envoyé du Ciel pour leur enseigner la voie du salut; ils se feroient reprochés la moindre réserve dans leur confiance ; ils alloient se jetter à ses pieds , afin d'y faire l'aveu de leurs fautes , & d'apprena dre la maniere de les expier.

Le Saint visitoit par préférence les villages & les hameaux fitués sur des montagnes escarpées, dorit les habitants à demi-fauvages languissoient dans les ombres de la mort, faute de prédicateurs qui allafsent les instruire.

Il y avoit plusieurs années que Cuthbert édifioit ses freres par le spectacle de toutes les vertus , lorsque faint Eate, qui étoit tout à la fois Abbé de Mailros & de Lindisfarne , l'envoya dans le

dernier de ces Monafteres , avec la qualité de MARS 20. Prieur. Il y continua son genre de vie ordinaire.

C'étoit toujours la même affiduité aux exercices de la mortification & de la priere. Il possédoit fi éminemment l'esprit de contemplation, qu'on l'eût pris moins pour un homme que pour un Ange. Souvent il pafsoit les nuits entieres en oraison ; quelquefois il travailloit ou se promenoit , de

peur que le sommeil ne l'empêchât de s'entretenir avec Dieu. Si quelqu'un fe plaignoit en la présence de ce qu'on avoit interrompu fon sommeil, il disoit ordinairement: « Que je faurois bon gré à celui » qui m'éveilleroit, puisque par-là, il me fourni» roit l'occasion de chanter les louanges de mon » Créateur , & de procurer sa gloire » ! La vue seule de son extérieur inspiroit l'amour de la vertus Son coeur étoit tellement pénétré de componction, qu'il ne pouvoit célébrer la sainte Mesle sans pleurer. Plus d'une fois les larmes abondantes qu'il versoit dans le tribunal de la pénitence, en arra, cherent aux pécheurs les plus endurcis,

Cuthbert, qui vouloit vivre dans une union encore plus intime avec Dieu , quitta fon Monastere, avec la permission de fon Abbé, & fe retira dans la petite ifle de Farne , qui en eft éloignée de neuf milles. C'étoit une solitude af. freuse, où il n'y avoit ni cau , ni arbres, ni bled. Le Saint s'y bâtit un Hermitage, qu'il environna d'un fossé, & l'on dit qu'il mérita par la ferveur de ses prieres que Dieu lui fît trouver de l'eau dans sa propre cellule. Comme il avoit apporté avec lui des instruments propres au labourage, il fema d'abord du bled qui ne vint point, puis de l'orge, qui , quoique semée hors de faifon , ren. dit une abondante récolte. Il fit construire une maison à l'entrée de l'ille, & du côté de Lindis

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farne , afin d'y loger les Freres qui le venoient
voir. Il alloit les y trouver , pour les entretenir MARS 204
sur des matieres fpirituelles. Il prit ensuite la ré-
solution de ne plus sortir de la cellule, le contena
tant d'instruire par la fenêtre ceux qui le visitoient,
Il consentit pourtant à avoir une entrevue avec
une fainte Abbefle, nommée Elfede. Elle étoit
fille du Roi Ofwi, & avoit été consacrée à Dieu
dès sa naissance. En 680, elle succéda à fainte
Hilde , dans le gouvernement de l'Abbaye de
Whitby. L'entrevue le pasla dans l’ille de Cocket,
alors remplie de saints Anachoretes.,

Cuthbert fut élu Evêque de Lindisfarne, dans
un Synode, tenu par saint Théodore , à Twiford
sur l'Alne, au royaume de Northumberland. Mais
quand il fallut obtenir son consentement, on
éprouva de grandes difficultés de la part. On ne
put l'arracher de la solitude , malgré. les lettres
qu'on lui écrivit , & les Députés qu'on lui envoya.
Enfin le Roi Egfrid,, qui avoit assisté au Synode,
l'alla trouver en personne avec le saint Evêque
Trumwin, & plusieurs autres personnes respecta,
bles par leur vertu. Tous ensemble se jetterent
à ses pieds, & le conjurerent par les plus pref-
fants motifs , d'accepter une place où il pourroit
procurer à Dieu une fi grande gloire. Il se rendit
à la fin , & sortit de la cellule, mais en versant
un torrent de larmes. Il fut facré à Yorck, le
jour de Pâque, par faint Théodore , aslisté de fix

· Evêques,

Le Saint , pour avoir changé d'état, ne diminua rien de ses austérités ordinaires. Il se regarda comme un homme dévoué au salut du prochain, & ne pensa plus qu'à travailler à la fanétification du troupeau qui avait été confié à ses soins. Il avoit une tendre charité pour les pauvres , &

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