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gneuse analyse, encore qu'il n'en rapporte aucun commentaire; c'est-à-dire, que sous le nom des commentateurs, il a parlé de qui il lui a plu : que sous le titre de leur histoire il traite les questions qu'il a en tête en un mot, qu'il dit ce qu'il veut, sans que son livre se puisse réduire à aucun dessein régulier; et si je voulois exprimer naturellement ce qui en résulte, je dirois qu'on y apprend parfaitement les expositions des sociniens, les livres où l'on peut s'instruire de leur doctrine, le bon sens et l'habileté de ces curieux commentateurs, ainsi que de Pélage, chef de la secte des pélagiens, et de tous les autres auteurs, ou hérétiques ou suspects, et qu'on y apprend plus que tout cela comment il faut affoiblir la foi des plus hauts mystères, avec les fautes des Pères (c'est-à-dire, celles que M. Simon leur impute), et en particulier celles de saint Augustin, principalement sur les matières de la grâce, dont notre auteur nous découvre le véritable systême, et fait bien voir à saint Augustin ce qu'il devoit dire pour confondre les pélagiens; en sorte, si Dieu le permet, que ce ne sera plus ce docte Père, mais M. Simon qui en sera le vainqueur. En un mot, ce qu'il apprend parfaitement bien, c'est à estimer les hérétiques et à blâmer les saints Pères, sans en excepter aucun, pas même ceux qu'il fait semblant de vouloir louer. Et voilà, après avoir lu et relu son livre, ce qui en reste dans l'esprit, et le fruit qu'on peut recueillir de son travail.

Si cela paroît incroyable à cause qu'il est insensé, je proteste néanmoins devant Dieu que je n'exagère

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rien. Tout paroîtra dans la suite; et pour procéder plus nettement dans cet examen, je me propose de faire deux choses: la première, de découvrir les erreurs expresses de notre auteur sur les matières de la tradition et de l'Eglise, et ce qui tend à la même fin, le mépris qu'il a pour les Pères, avec les moyens indirects par lesquels, en affoiblissant la foi de la Trinité et de l'incarnation, il met en honneur les ennemis de ces mystères : la seconde, d'expliquer en particulier les erreurs qui regardent le péché originel et la grâce, parce que c'est à ces mystères qu'il s'est particulièrement attaché.

DE LA TRADITION

ET DES SAINTS PÈRES.

PREMIÈRE PARTIE,

Où l'on découvre les erreurs expresses sur la Tradition et sur l'Eglise, le mépris des Pères, avec l'affoiblissement de la Foi, de la Trinité et de l'Incarnation, et la pente vers les ennemis de ces mystères.

LIVRE PREMIER.

ERREURS SUR LA TRADITION ET L'INFAILLIBILITÉ
DE L'ÉGLISE.

CHAPITRE PREMIER.

La Tradition attaquée ouvertement en la personne de saint Augustin.

Pour commencer par où il commence lui-même, c'est-à-dire, par saint Augustin, il l'attaque sans déguisement, comme sans mesure, dès les premiers mots de sa préface, et il l'attaque sur la matière où il a le plus excellé, qui est celle de la grâce: ce que je remarque ici, non dans le dessein d'entamer ce

sujet, que je viens de réserver pour la fin de cet ouvrage, mais seulement pour montrer dans le procédé de l'auteur un mépris manifeste de la tradition qu'il fait semblant de vouloir défendre. Je dis donc avant toutes choses que M. Simon ne craint point d'accuser saint Augustin sur cette matière (1), d'être l'auteur d'un nouveau systéme, de s'étre éloigné des anciens commentateurs, et d'avoir inventé des explications dont on n'avoit point entendu parler auparavant.

Voilà comme il traite celui qu'il appelle en même temps le docteur de l'Occident, et il semble qu'il ne le relève que pour avoir plus de gloire à l'attérer. Son ignorance est extrême, aussi bien que sa témérité. S'il avoit lu seulement avec une médiocre attention les livres de ce saint docteur, il l'auroit toujours vu attaché à la doctrine qu'il avoit trouvée, comme il dit lui-même, très-fondée et trèsétablie dans toute l'Eglise. Il n'y a aucune partie de son systême, puisqu'il plaît à notre auteur de parler ainsi, que ce grand homme n'ait appuyée par le témoignage des Pères, ses prédécesseurs, et des Grecs comme des Latins, où il ne les suive, pour ainsi dire, pas à pas, et qu'il ne trouve très-solidement et très-invinciblement établie dans les sacremens de l'Eglise et dans toutes les prieres de son sacrifice.

M. Simon cependant l'accuse d'être un novateur: c'est ce qu'il avance dans sa préface : c'est ce qu'il soutient dans tout son livre, où, à vrai dire, il n'a en butte que saint Augustin. Il en revient à toutes

(1) Préf.

les pages aux nouveautés de ce Père, à ses opinions particulières auxquelles il accommode le texte sacré. Il ne songe qu'à le rendre auteur des sentimens les plus odieux, comme de ceux de Luther et de Calvin. Il affecte de dire partout que ces impies, qui font Dieu cause du péché, et Wiclef qui est l'auteur de ce blasphême, regardoient saint Augustin comme leur guide, sans avoir pris aucun soin de leur montrer qu'ils se trompent, et même sans l'avoir dit une seule fois; en sorte que nous pouvons dire que tout son ouvrage est écrit directement

contre ce saint.

CHAPITRE II.

Que M. Simon se condamne lui-méme, en avouant que saint Augustin, qu'il accuse d'étre novateur, a été suivi de tout l'Occident.

Il ne sera pas malaisé de le réfuter; mais en attendant que j'entreprenne une si facile et si nécessaire réfutation, il est bon de faire voir, en un mot, que ce téméraire censeur se réfute lui-même le premier. Car en attaquant si hardiment ce saint docteur (1), il est forcé d'avouer en même temps qu'il est le docteur de l'Occident, et que c'est à sa doctrine que les théologiens latins se sont principalement attachés ; ce qui s'entend, de son aveu propre, de ce qu'il a enseigné sur la matière de la grâce, plus encore, sans comparaison, que de tout le reste; car c'est à

(1) Préf.

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