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mêlée de prose et de vers, écrite, à ce qu'il paroît, currente calamo, et adressée à madame Du Perche de Tours. Cette piece, publiée pour la premiere fois dans sa vie écrite par le P. Daire, bibliothécaire des Célestins, ris, 1779, in-12, a été insérée dans toutes les éditions de ses oeuvres faites depuis une quinzaine d'années. Il écrivit au provincial, ne reçut point de réponse satisfaisante; enfin, n'y pouvant tenir, il.demanda sa sortie des jésuites, leur fit des adieux généreux et poétiques, et rentra dans le monde, en 1735. Ces adieux aux jésuites lui attirerent deux réponses, dont l'une est plate et indécente; et toutes deux sont maintenant oubliées.

Il étoit encore attaché à cette Société, lorsqu'il publia à Blois, en 1734, un recueil de ses poésies, dans lequel on trouve une imitation libre des six premieres églogues de Virgile; il ajouta les quatre autres dans une seconde édition faite à Amsterdam, en 1741.

Cette traduction des bucoliques n'est pas un des titres poétiques de Gresset; mais s'il

n'a

pas tiré des sons assez heureux du pipeau de Virgile, il avoit bien tracé les caracteres de cette sorte de poésie dans son ode à Virgile, et mieux encore dans son Siecle Pastoral, idylle qui est un chef-d'œuvre dans ce genre. Gresset, admiré par Jean-Baptiste Rousseau, ne le fut pas moins par l'homme célebre qui depuis porta le même nom avec des talents d'une nature bien différente. J.-J. Rousseau aimoit passionnément l'idylle du Siecle pastoral; il l'a mise en musique, et y a ajouté six strophes qu'on trouvera dans cette édition. Après Ver-Vert parurent, aussi en 1734, deux ouvrages d'un genre plus analogue à ce poëme; le Carême in-promptu et le Lutrin vivant, réimprimés l'année d'après. On ne donne pas à ces deux bagatelles le titre de poëme, qui a même été disputé à Ver-Vert; ce ne sont que des contes, mais le badinage en est très ingénieux; et leur moindre mérite est celui de la difficulté vaincue, tout embarrassant qu'il ait pu être de rendre avec décence et clarté la scene grotesque du Lutrin. A la

fin du Lutrin vivant Gresset fait un grand éloge de Du Cerceau ; il y a cependant loin de son badinage, souvent gêné et apprêté, à celui de Gresset, dont le naturel, l'aisance sont le mérite caractéristique; et il lui fait trop d'honneur en le nommant son modele.

Si Gresset avoit, au jugement de J.-B. Rousseau, effacé Chapelle dans son Ver-Vert, il surpassa de beaucoup Chaulieu dans sa Chartreuse, qui parut en 1735: il composa cette piece dans le bosquet de Minerve du jardin de Chaulnes, qu'il a célébré depuis dans l'épître au P. Bougeant. A la vue des richesses poétiques et philosophiques prodiguées dans cette épître avec une si aimable facilité : « Quel prodige! s'écria J.-B. Rousseau; quel désespoir pour tous les prétendus beaux esprits modernes »>! Il préféroit cette épître à Ver-Vert, comme étant d'un ordre de poésie et de talent au-dessus du récit des aventures d'un perroquet.

En 1736 Gresset publia l'épître à sa Muse; c'est le plan de conduite qu'il se proposa lui

même dans la littérature et dans le monde. Cette piece a bien quelques longueurs ; mais elle devroit être, pour tout jeune poëte, ce que le serment d'Hippocrate est pour un nouveau médecin.

Gresset, en sortant des jésuites, étoit resté attaché à ce qu'il y avoit de plus illustre parmi eux: ses amis étoient les PP. Rouillé, auteur, avec le P. Catrou, d'une Histoire romaine que celle de Rollin a fait oublier; Brumoy, le savant traducteur du théâtre des Grecs; Bougeant, auteur du traité de Westphalie. Mais ces hommes de mérite attiroient trop l'attention publique, et ils avoient des désagréments même dans leur compagnie. Ce qui arriva aux deux derniers réveilla dans Gresset sa rancune contre le séjour de La Fleche : le P. Bougeant avoit été, comme lui, exilé dans ce collége, pour avoir publié un badinage innocent sous le titre d'Amusement philosophique sur le langage des bêtes. En 1735 il fut cependant rappelé au collège de Louis-le-Grand; et à l'occasion de son retour Gresset lui écrivit

une lettre charmante, publiée pour la premiere fois par le P. Daire, auquel on doit savoir gré de l'avoir conservée; elle est dans notre édition et dans plusieurs autres, mais sans ce commencement en prose, rapporté par le même P. Daire.1

En 1737, Gresset célébra la premiere exposition des tableaux, faite cette année au Louvre. La piece pourroit être meilleure; on l'a cependant conservée dans cette édition comme un hommage rendu aux arts, et comme la consécration poétique d'une époque remarquable dans l'histoire de l'école françoise.

Son épître au P. Bougeant fut composée à

(1) « J'imagine que quelque vénérable espion, reste de la lignée des Aubins, gens de décachetante et interceptante mémoire, aura supprimé ma petite épître; mais vous êtes heureusement arrivé, et c'est bien tout ce qu'on peut faire que de rapporter sa pauvre vie de cette métropole des caveaux et des catacombes de la Société. Vous voilà ressuscité, et nos amis peuvent aller à la côte sans craindre les partis ennemis ( les espions qui interceptoient ses lettres au P. Bougeant).

Or, au sortir du monument, etc. »

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