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Roses, pourquoi vous presser de fleurir!
Pourquoi, Philomèle plaintive,

De tes chants sitôt m'attendrir?
Sérénité des cieux, verdure trop hâtive,
Précoces fleurs qui naissez sous mes pas,
Non, non, toujours vous n'êtes pas

D'un hiver expiré des signes manifestes.....
Cessez d'exciter dans mon cœur

Mille doutes affreux, mille craintes funestes ;
De mon amant, las! épargnez l'honneur.
S. G. L. DE SAINT-LÉGIER (1), ancien
officier d'infanterie.

SUR CINTRA,

APPELÉ LE PARADIS DU PORTUGAL.

Imitation d'une Modigna, ou chanson portugaise.

TES montagnes, Cinfra, semblent toucher les cieux;
Ton vallon est paré d'une aimable verdure ;
Tes bosquets variés font le plaisir des yeux;
Tes grottes sont un jeu de la riche nature.

1

Qui n'aime ces ruisseaux qu'on ne voit point tarir,
Même lorsque Phébus vient embraser le monde ;
Ces parfums que les vents au loin nous font sentir,
Et ces fruits suspendus se retraçant dans l'onde?
La fleur s'offre au baiser du zéphyr amoureux;
Mille oiseaux différens, par leur chant vif ou tendre,
Vont réveiller l'écho qui gazouille après eux;

L'Amour, toute la nuit, se plaît à les entendre.

PH. DE P.....

(1) Auteur des jolies stances sur la Sensitive, insérées dans le Mercure du 23 thermidor dernier.

Ne me borne donc

ENIGM E.

JE puis te rendre heureux, pouvant te rendre sage;
pas au seul amusement,
Lorsqu'on veut bien me faire avec discernement;
Des faveurs de Plutus j'apprends à faire usage,
De ses rigueurs aussi, je console aisément;
L'ennui, je le bannis; les maux, je les soulage,
Et si j'égare quelques fois,

C'est parce qu'on me fait sans choix,

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QUOIQUE objet très-commun, ami, je te déclare,
Que je suis dans le fait une chose bien rare;
Sans tête; assez souvent, je suis harmonieux;
Sans cœur, je puis t'offrir un vin délicieux;

Sans queue, et toutefois mon cœur changeant de place,
Je deviens un pronom de la seconde classe,
Transpose tête et queue, alors en Orient,
Mon être, jusqu'aux cieux, porte un front menaçant;
Enfin, la tête au cœur, et le cœur à la tête,

Je procure à l'Amour mainte et mainte conquête.
Eh bien ! me connais-tu ?... Quoi, je te vois rêver!.....
Je suis, ami.......... Mais, chut; tâche de me trouver.

Par P. ROQUE (de Brives).

CHARADE.

FAUTE de mon premier, on n'a pas mon second,
Et mon tout est sujet à perdre la raison.

Le mot de l'Enigme du dernier numéro est Philosophe, Celui du Logogriphe est Page, où l'on trouve dgc. Celui de la Charade est Chou-croûte,

Essai sur l'influence de la Réformation de Luther, par M. Villers.

1.

IL semble que tout soit dit sur l'ouvrage de M. Villers, et qu'il ne reste plus rien à discuter dans sa doctrine. Tout le monde l'envisage actuellement sous un point de vue qui est affreux. Les honnêtes gens le regardent comme une espèce de bréviaire philosophique et révolutionnaire que Robespierre aurait couronné. Enfin, on l'a rendu si odieux, que M. Villers pourrait bien demander par grace qu'on le rendît ridicule, afin de détourner l'indignation générale. Je n'ose me flatter de pouvoir lui rendre ce petit service. Il me reste trop de scrupules dont je ne puis me défaire. Je me demande souvent s'il est bien possible que l'Institut de France ait couronné publiquement un livre aussi mal pensé que mal écrit, et qui n'est français, ni par les sentimens, ni par le style. Ne doit-on pas supposer que ce mauvais livre a quelque côté charmant qui aura séduit ses juges, et qui a échappé jusqu'ici à tout le monde? Tout dépend en effet de la manière dont on prend les choses. Par exemple, on est révolté d'entendre dire à cet écrivain que les révolutions sont très-utiles, et qu'elles ont de beaux effets. Je conviens que cela est dur à digérér, trèsdur; mais M. Villers pouvait en juger avec plus de sang froid. Les grands hommes ne s'embarrassent pas des malheurs particuliers; ils ne considèrent que le perfectionnement général; et, en vérité, il faut s'être bien mal tiré de cette révolution, il faut avoir fait bien peu d'usage de son esprit, pour ne pas voir, clair comme le jour, que l'espèce hu

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maine s'est prodigicusement perfectionnée depuis dix ans.

Il y a des personnes d'une délicatesse ridicule qui trouvent mauvais que M. Villers fasse consister la principale beauté d'une révolution dans le déplacement des propriétés. Cela marque, au contraire, une grande connaissance du monde, et une véritable philosophie pratique. Cet homme-là ne s'amuse point au beau idéal. Il ne fait pas de l'univers une Arcadie. Il va droit au solide; mais il importe extrêmement de bien entendre sa théorie sur un point si délicat ; car, dans cette matière, sa philosophie touche de si près à celle qui fournit l'état d'excellens rameurs, qu'il serait dangereux de s'y inéprendre. Voici donc positivement ce qu'enseigne ce savant homme à ce sujet. Après avoir parlé du bouleversement des fortunes et des propriétés, qui est la suite ordinaire des révolu tions, c'est là, dit-il, un des plus beaux effets de ces commotions terribles qui, déplaçant toutes les propriétés, fruits des institutions sociales, ne laissent à leur place que la grandeur d'ame, les vertus et les talens, fruits de la seule nature. (Pag. 126.)

N'est-il pas charmant cé M. Villers! Qu'on est heureux d'avoir à faire à lui! s'il vous ôte vos propriétés, vous voyez que c'est pour épurer vos vertus. Il vous débarrasse de ces viles richesses, qui sont les fruits de la société, pour vous mettre dans l'état de la pure nature, où vous ne vivrez plus que de grandeur d'ame.

Il est vrai que pour mettre cette théorie en pratique dans un état, il faut quelquefois massacrer cinq ou six mille familles, qui ont le mauvais esprit de tenir à leurs propriétés et aux institutions sociales. M. Villers ne se dissimule pas que c'est cette petite difficulté qui a empêché quelques esprits

faibles d'aimer la révolution. Mais il a une manière si sentimentale de résoudre cette objection! Il vous fait si bien voir, dans l'effusion de son ame, qu'un siècle et demi de guerres et de malheurs n'empêche pas la perfectibilité de l'espèce ! Il est si touchant, quand il parle du bilan définitif, et qu'il vous prouve par A plus B multiplié par X, et divisé par Z, que deux ou trois inillions d'hommes de moins ne contre-balancent pas l'avantage de deux ou trois principes révolutionnaires bien établis tout cela est si attendrissant, si honnête; et si philosophique, que je ne m'étonne pas qu'il ait enlevé tous les cœurs sensibles.

Mais ce qui me ravit, c'est que M. Villers est encore plus étonnant en littérature qu'en politique. Dans cette dernière science, il a été puissamment secondé par les grands génies qui ont ouvert la carrière depuis douze ans. Mais, dans l'autre, il est absolument neuf, soit pour les conceptions, soit pour le style.

Il a entrepris de prouver que, dans les pays où règne la croyance de Luther, les lettres ont fait infiniment plus de progrès que dans les pays catholiques. Il s'agissoit donc de trouver dans quelques cantons luthériens des hommes plus renommés en littérature que ceux que la France et l'Italie ont produits. Or, croyez-vous que cela fut si aisé? Etait-ce une chose si facile, à votre avis, que de trouver des noms dignes d'être opposés à ceux des Galilée, des le Tasse, des Descartes, des Pascal, des Fénélon, des Bossuet, des Corneille, des Ra cine, etc. etc. Eh! bien, M. Villers a déterré, dans le fond de la basse Saxe, des gens qui s'appellent Hemsterhuys, Schüttz, Voss, Heeren, Schroeck, Morhoff, Seckendorf. Sont-ce là des gens célèbres! Y a-t-il rien de plus connu et de plus répanda que leurs ouvrages? Ils traitent de l'exégèse, de

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