Images de page
PDF
ePub

1

Lettres qui s'addonnoient à la Poëfie Testa
dans l Italie, & comme ils s'étudioient
particulierement à gagner les perfonnes
les plus diftinguées, ils oferent publier
que le Pape Urbain VIII. étoit entré
dans leur parti. Mais il paroît aujour
d'huy que c'étoit fimplement pour fe
faire honneur qu'ils en ufoient ainsi,
car nous ne trouvons rien dans les
Poëfies de ce Pape qui fe fente de ces
affectations nouvelles.

Au refte les Sectateurs du Tefti ne fu-
rent pas auffi heureux que luy. Ils purent
bien imiter fes défauts ; mais ils ne pu-
rent paffer plus loin, ni'atteindre à ce
point d'excellence qui faifoit tout fon
merite; de forte que quelque efprit
qu'il paroiffe dans leurs ouvrages-ils
n'ont jamais été dans l'approbation pu-
blique au lieu que les Ouvrages du
Tefti fe font encore admirer aujour-
d'huy : & on les lit avec autant de plais·
fir qu'on ait jamais fait, parce que tou-
res fes affctations & fes irrégularitez
font comme cachées fous diveries beau-
tez, & qu'il y a une veritable grandeur
fous fon air faftueux..

Ce qu'il y a encore de remarquable dans les Poëfies du Tefti, c'eft que les fujets ferieux y font traittez d'une ma

Hugon.

niere plaifante & fort agreable, & qu'au contraire les matieres joieufes & ga lantes s'y trouvent menagées avec quelque forte de grávité, & dans un air de majefté qui eft capable de furprendre un Lecteur qui s'imagineroit qu'il n'y a que la maniere fimple & groffiere de debiter une galanterie qui pourroit luy faire du tort.

1 Lorenzo Craffo tom. 1. Elog. d'Huom. Letterat. pag. 386,387.

2 Jan. Nicius Erythraei Pinacothec. 3. um. 57. pag. 213, 214, 215.

M. CCCCXIV.

HERMAN HUGUES

ou HUGON

Jefuite, né à Bruxelles, l'an 1588. mort de pefte à Rhinberg, le 10. Septembre de l'an 1629. âgé de 41. ans,

Poëte Latin.

Et Auteur eft plus connu par le peCtit volume de les vers, que par le grand nombre des autres Ouvrages qu'il a faits en Profe, quoiqu'il y en ait parmi

ees derniers qui luy ont acquis la répu- Hugon

tation de bon Ecrivain.

Nous avons fes vers fous le titre de Pieux Defirs, divifez en trois livres, dont le premier 'contient les gemiffemens de l'ame Penitente, le fecond les Vœux de l'ame fainte, le troifieme les Soupirs de l'ame Amante. L'ouvrage eft accompagné d'Emblemes affez ingenieufes & de reflexions touchantes des Peres de l'Eglife.

Ce font des vers Elegiaques pleins de pieté & de tendreffe, & l'ouvrage pourroit peut-être fervir d'objection aux maximes de nos pretendus Maîtres de l'Art Poëtique qui veulent nous perfuader qu'il n'y a que l'amour profane ou de la creature qui puiffe entrer dans la belle Poëfie, & y dominer.

La verfification y eft affez heureuse: on y remarque de la facilité & de l'abondance qui peut aider principalement les jeunes gens à amplifier les fujets qu'ils ont à traitter; (1) les frequentes digreffions y font une varieté agreable, & le ftile en eft affez rond & affez plein; mais le tour des vers n'eft pas toûjours naturel, l'expreffion n'y eft pas égale,tantôt il eft élevé & tantôt il tombe & rampe fort bas, ce qui ne s'acorde

pas

bien avec le caractere de la matiere qu'il a choifie & qui veut être toûjours exprimée noblement.

On juge auffi qu'il a fait trop d'honneur aux Divinitcz & aux perfonnages de la Fable Païenne de les representer quelquefois foit dans fes vers, foit dans fes Emblemes fous pretexte d'embellir fon fujet.

Ol. Borrich. Differt. de Poët. Lat. 5/ n. 161. pag. 144. & alii paffim.'

Morin,

M. CCCCXV.

M. MOTI N

Poëte François, du temps de" Malherbe & du Satyrique Regnier.

Otin n'étoit un Poëte tout

Ma fait méprifable, mais il avoit

un peu trop de flegme & trop peu de feu. M. Defpreaux en parle comme d'un Poëre froid & morfondu en ces termes. (1)

Un froid Ecrivain ne fçait rien Motin. qu'ennuier.

Faime mieux Bergerac, fa burlesque
audace

Qué ces
ces vers où Motin fe morfond & nous
glace,

Ce paffage me fait fonger à ce que
M. Bayle a dit quelque part (2) du fel de
la fatyre qui demande qu'on ne s'expli-
fa
que pas toujours clairement. Les allu- «
fions un peu cachées, dit-il, y ont une e
grace merveilleufe pour les Gens d'ef"
prit. En effet, qui auroit crû que M. Def-
preaux en voulant defigner un Poëte
vivant de fon temps ait rencontré G
fort à propos par le changement d'un
C. en une M. un autre Poëte dans
la même langue, dans le même fie-
cle, & peut-être dans le befoin de
fubir un jugement femblable. Cepen-
dant le myftere fera caufe un jour que
le veritable Motin pourra paffer pour un
autre, fi l'on ne le revele, auffi-bien que
les autres de la même nature, dont M.
Defpreaux à voulu remplir une partie de
fes Satyres, c'eft ce qui a fait fouhaiter à
quelques-uns d'y voir des commentaires
du vivant de l'Auteur, & de fa main mê

« PrécédentContinuer »