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à vos points et aisément, comme on dit, et quelquefois même ne me faire aucune réponse, sans que jamais je m'offense, &c.

M. de Coulanges à Madame de Simiane.

Ma main ne vous écrit point, parceque je suis dans mon lit; mais mon cœur vous dit que je vous aimerai toute ma vie, autant que je vous admirerai, &c. Voltaire.

Une maladie de quinze jours, suivie d'un abattement extraordinaire, m'a empêché jusqu'ici de répondre à la lettre que vous n'avez fait l'honneur de m'écrire, &c. Rousseau.

Je vous demande pardon, mon cher confrère, d'un si long silence. J'ai fait de petits voyages; mais comme on ne gague jamais rien de bon à voyager, je suis revenu ici avec un gros rhume, un peu de fièvre et un peu de Goutte. Je n'ai point voulu vous écrire quand j'étais de mauvaise humeur.

Le Cardinal de Bernis à Voltaire.

Je vous avoue que le malentendu qui retient mes lettres me donne une violente inquiétude. J'en ai bien importuné le pauvre d'Hacqueville, et vous-même, ma fille. Je m'en repens, et voudrais bien ne l'avoir pas fait; mais je suis naturelle, et quand mon cœur est en presse, je ne puis m'empêcher de me plaindre à ceux que j'aime bien. Il faut pardonner ces sortes de faiblesses, comme disait un jour Madame de la Fayette. A-t-on gagné d'être parfaite? Non, assurément; et si j'avais fait cette gageure j'y aurais bien perdu mon argent. Madame de Sévigné.

Je vous demande pardon, madame, de ne vous avoir pas parlé de votre digne et aimable fils. Mais ce qui est dans le cœur n'est pas toujours au bout de la plume, surtout quand on écrit vite, et qu'on est malade. Voltaire.

Votre lettre et votre procédé généreux, monsieur, sont des preuves que vous n'êtes pas mon ennemi, et votre livre vous faisait soupçonner de l'être. J'aime bien mieux en croire votre lettre que votre livre.C'est de cette retraite que je vous dis sincèrement ;-que je vous pardonne très-cordialement de m'avoir pincé; que je suis fâché de vous avoir donné quelques coups d'épingle; que votre procédé me désarme pour jamais; que bonhomie vaut mieux que raillerie; et que je suis de tout mon cœur, &c. Le même à l'Abbé Trublet.

DES LETTRES DE RECOMMANDATION.

INSTRUCTION.

Les lettres de recommandation sont subordonnées aux circonstances. Elles roulent en général sur le mérite de celui qui en est le

VOL. II.

porteur, sur le degré d'intérêt que l'on prend à sa personne, sur la nature des services que l'on sollicite pour lui, sur la reconnaissance que l'on conservera soi-même des bontés dont il aura été l'objet.

Quand la simple politesse les prescrit, elles demandent beaucoup de briéveté: elles doivent être plus détaillées quand c'est le sentiment qui les écrit; et l'on appuye alors sur ce mot de Cicéron :— Faites qu'il s'apperçoive, à la manière dont il sera reçu de vous, que ma recommandation n'a rien de vulgaire.

On peut ranger parmi les lettres dont nous parlons, celles qui ont pour objet de recommander une affaire, un procès, puisqu'elles ont moins pour motif l'intérêt qu'on prend à la chose, que celui qu'on prend à la personne. Sous ce rapport, le nom qui leur convient le mieux serait celui de lettre de sollicitation; mais n'oubliez pas qu'elles demandent beaucoup de ménagement et de mesure, pour que vous ne paraissiez pas vouloir compromettre la délicatesse ou la justice de celui, à qui elles sont adressées.

MODÈLES.

Lettre de Madame de Sévigné à M. le Comte de Grignan.

Si l'occasion vous vient de rendre quelque service à un gentilhomme de votre pays, qui s'appelle * * *, je vous conjure de le faire; vous ne sauriez me donner une marque plus agréable de votre amitié. Vous m'avez promis un canonicat pour son frère; vous connaissez toute sa famille. Ce pauvre garçon était attaché à M. Fouquet: il a été convaincu d'avoir servi à faire tenir à Madame Fouquet une lettre de son mari: sur cela il a été condamné aux galères pour cinq ans: c'est une chose un peu extraordinaire. Vous savez que c'est un des plus honnêtes garçons qu'on puisse voir, et propre aux galères, comme à prendre la lune avec les dents.

Lettre de Fléchier à M

Un de nos bons marchands de Nîmes, monsieur, a une affaire devant vous qu'il croit juste, et qui lui est de conséquence. Comme il sait l'amitié que vous avez pour moi, il croit que ma recommandation auprès de vous ne lui sera pas inutile. Je vous prie, monsieur, de lui rendre la justice qu'il vous demande, et de lui faire les grâces qui accompagnent le bon droit, s'il l'a: je vous en serai très-obligé. Je suis, monsieur, &c.

Lettre de M. d'Ussé à J. B. Rousseau.

Le Sieur Leroux-Durant m'écrit pour me prier de vous le reco. ́mmander, monsieur. Il prétend que j'ai beaucoup de crédit sur vous;

e ne sais s'il ne se trompe pas. Quoiqu'il en soit, je fais ce qu'il souhaite de moi, et je vous prie de vouloir bien lui être favorable en ce qui peut lui être utile. Il a du génie et du talent pour plu sieurs choses; je l'ai expérimenté à Ussé, où il a été avec moi assez long-temps pour pouvoir en juger. Je vous serai obligé, monsieur, de l'attention que vous voudrez bien avoir à lui procurer quelque emploi qui le mette plus à son aise qu'il n'est. Je suis persuadé qu'il s'acquittera bien des choses dont vous le chargerez.

Je suis, &c.

Lettre de M. d'Alembert à Voltaire.

Mon cher et illustre confrère, voilà M. le Comte de Valbelle, que vous connaissiez déjà par ses lettres, et que vous serez charmé de connaître par sa personne. Une heure de conversation avec lui vous en dira plus en sa faveur que je ne pourrais vous en écrire. Il a voulu absolument que je lui donnasse une lettre pour vous, quoiqu' assurément il n'en ait pas besoin.

Je vous embrasse de tout mon cœur, et j'envie bien à M. de Valbelle le plaisir qu'il aura de vous voir.

Lettre du même au même.

Cette lettre, mon cher et illustre confrère, vous sera remise par M. Desmarets, homme de mérite et bon philosophe, qui désire de vous rendre hommage en allant en Italie, où il se propose de faire des observations d'histoire naturelle.

Je vous prie de le recevoir et de l'accueillir comme un savant plein de lumières, et qui est aussi digne qu'empressé de vous voir. Adieu, mon cher et illustre confrère, je vous embrasse de tout mon cœur, et je voudrais bien partager avec M. Desmarets le plaisir qu'il aura de se trouver avec vous.

Lettre de Madame de Simiane à M *

Vous avez eu la bonté, monsieur, de faire espérer l'honneur de votre protection au Sieur Ferrand qui se présente à vous aujourd'hui. Il a une grosse famille de jeunes, jolies, et sages filles; tout cela demande un peu de bien, et il n'en a point: un petit emploi pourvoirait à tout; je vous le demande pour lui, et je joins mes prières à celles de M. B. * * *. C'est la mouche du coche, mais n'importe; ma reconnaissance n'en perdra rien de sa force, non plus que tous les sentimens que vous me connaissez pour vous, et que je vous ai voués pour toute ma vie.

Lettre de Madame de Sévigné à sa Fille.

Je vous écris tous les jours: c'est une joie qui me rend très-favoIls veulent en rable à tous ceux qui me demandent des lettres. avoir pour paraître devant vous, et moi je ne demande pas mieux, je veux mourir si je sais Celle-ci vous sera rendue par M. de * * son nom, mais enfin c'est un fort honnête homme qui me paraît avoir de l'esprit, et que nous avons vu ici ensemble. Son visage vous est connu. Pour moi, je n'ai pas eu l'esprit d'appliquer son nom dessus.

Lettre de Voltaire au Cardinal de Bernis.

Je prends la liberté, mouseigneur, de vous présenter un voyageur Genevois digne de toutes les bontés de votre éminence, tout buguenot qu'il est. Sa famille est une des plus anciennes de ce pays, et sa personne une des plus aimables. Il s'appelle M. de Saussure. C'est Sa modestie est égale à un des meilleurs physiciens de l'Europe. son savoir. Il mérite de vous être présenté d'une meilleure main que la mienne. Je nic tiens trop heureux de saisir cette occasion de vous renouveler mes hommages et le respect avec lequel j'ai l'honneur d'être,-Monseigneur, de votre éminence, le très-humble, &c.

Lettre de M. le Cardinal de Bernis à Voltaire.

Je ne saurais refuser cette lettre, mon cher et illustre confrère, à deux jeunes officiers Suédois qui ont fait le voyage d'Italie, avec beaucoup d'application et d'intelligence, et qui croiraient n'avoir rien vu si, en retournant dans leur patrie, ils n'avaient pu, au moins un moment, voir et entendre le grand homme de notre siècle. Ils ont cru qu'une lettre de moi serait un passeport pour arriver jusqu'à vous. Je vous prie donc de ne pas vous refuser à leur curiosité, et au désir qu'ils ont de vous présenter un hommage qui n'est pas celui de la flatterie.

Il y a bien long-temps que je n'ai eu de vos nouvelles ; je n'en sais que par la renommée: ce n'est pas assez pour mon cœur,

Ne doutez jamais, mon cher confrère, de l'intérêt que je prends à votre santé, à votre conservation, à votre bonheur: je n'ai plus de vœux à faire pour votre gloire. Mon attachement pour vous durera autant que ma vie.

DES LETTRES DE FÉLICITATION.

INSTRUCTION.

Est-il quelqu'un qui ne tienne pas à quelqu'autre par les liens de .a parenté, de l'amitié, des services, d'une association quelconque,

du voisinage même ? Peut-on alors être ou paraître indifférent à ce qui arrive soit d'heureux, soit d'agréable, soit de fâcheux, aux personnes dont quelqu'une de ces liaisons nous rapproche? La satisfaction et la joie doivent se manifester dans ces sortes de lettres; il faut y peindre ou y feindre le sentiment. Le cœur se fait un plaisir de l'un; la politesse fait un devoir de l'autre. La moindre teinte de jalousie ou de froideur serait dans ces occasions, une circonstance impardonnable. Rien ne doit donc atténuer la félicitation: l'amourpropre est ainsi fait qu'il veut tout ou rien, et qu'un demi-compliment lui paraît une injure. Il faut même pour lui plaire que le Il est facile compliment ait l'air s'il se peut de n'en être pas un. d'imaginer des tournures pour ôter à un compliment ce qu'il a de commun et de banal. Mais quelle que soit celle qu'on emploie, on doit éviter avec soin qu'à force d'être exagéré, il ne prenne la couleur de l'ironie. Car, dit Madame de Sévigné: C'est là qu'il est dangereux de passer le but. Qui passe perd; et les louanges sont des satires quand elles peuvent étre soupçonnées de n'être pas sincères: toutes les choses du monde sont à facettes.

MODÈLES.

Lettre de Madame de Sévigné à M. de Bussy-Rabutin.

Je pense que je suis folle de ne vous avoir pas encore écrit sur le Mon fils mariage de ma nièce; mais je suis en vérité comme folle. s'en va dans trois jours à l'armée; ma fille, dans peu d'autres, eu Provence: il ne faut pas croire qu'avec de telles séparations, je puisse conserver ce que j'ai de bon sens.

J'approuve extrêmement l'alliance de M. de Coligny; c'est un établissement, pour ma nièce qui me paraît solide, et pour la peinture du cavalier, j'en suis contente sur votre parole. Je vous fais donc mes complimens à tous deux, et quasi à tous trois, car je m'imagine qu'à présent vous n'êtes pas loin les uns des autres. Adieu, mon cher cousin; adieu, ma chère nièce.

Lettre de Madame de Maintenon à Mademoiselle d'Osmond.

Je suis ravie de votre établissement, mademoiselle. Celui qui vous épouse est bien estimable; il préfère votre vertu aux richesses qu'il aurait pu trouver; et vous, vous préférez la sienne aux biens que vous allez partager avec lui. Avec de tels sentimens, un mariage ne peut être qu'heureux: Dieu bénira deux époux dont la piété est le lien. Je ne cesserai jamais de vous aimer, et de me souvenir que je suis aimée de vous.

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