Images de page
PDF
ePub

ajoute que ces belles récoltes lui ont permis de doubler au moins le nombre des bestiaux sur sa ferme ; d'y faire de nombreux engrais pour la boucherie, etc., avantages immenses dans une grande exploitation rurale, et surtout pour un pays de grande population comme le nôtre.

Enfin, Messieurs, je tiens encore d'agronomes, bons praticiens, que l'état du fumier et son espèce influent sur la bonté comme sur la beauté des froments. Ils croient que la paille de blé, d'avoine, simplement humectée ou empreinte d'excréments d'animaux herbivores, est le meilleur compost, employé frais, pour amender les terres fortes ou à fonds argileux, destinées à la culture du blé. Je me range volontiers de leur opinion: plus tard j'en déduirai les motifs.

Mais on ne peut trop se hâter de publier les expériences de M. Gazzéri et de M. le colonel de la Piconnerie, expériences dont les résultats tendent à doubler les produits de la terre. D'ailleurs leur théorie et leur pratique semblent d'accord avec les principes qui constituent une bonne agriculture. Par ces motifs, Messieurs, j'ose vous recommander l'essai de cette autre méthode, l'emploi de fumiers frais, sur des sols divers, ne fût-ce que comme objet de curiosité ou de comparaison avec l'ancienne; c'est ainsi qu'on s'éclaire et qu'on peut faire faire des progrès à la plus utile des sciences, à l'agriculture.

Je vais traiter une autre partie d'économie rurale.

Nourriture et engrais du bétail par de nouvelles méthodes.

On sait depuis long-temps que les beaux et vigoureux chevaux espagnols sont nourris spécialement de paille hachée, écrasée, mêlée d'orge, ou de quelques autres graines analogues. Mais cette antique méthode a reçu de nos jours une grande extension. Main

[ocr errors][ocr errors][merged small][ocr errors]

tenant ce n'est plus la paille seule qu'on donne préparée pour l'alimentation des animaux de trait et pour engraisser ceux destinés à la boucherie, mais bien toutes sortes de plantes à fourrages. On a également adopté le bon usage de donner aux animaux l'avoine, l'orge, les féveroles, et autres graines concassées.

Des avantages immenses paraissent résulter de ces nouvelles méthodes : par exemple, on a remarqué que trois mesures d'avoine concassée et humectée avant la pourvende, équivalaient, comme aliment, à quatre mesure de cette même semence donnée en grain.

On a observé aussi que quatre parties en poids de fourrages assortis, hachés grossièrement, puis époudrés, nourrissaient autant que cinq parties de ces mêmes fourrages pris entiers et isolément. On croit, aujourd'hui, pouvoir expliquer les causes de ces différents résultats d'alimentation; mais il serait encore trop long de vous entretenir des détails qu'une pareille dissertation comporte; seulement on peut affirmer la bonté de ces méthodes pour nourrir le bétail, et comme des faits, pour les appuyer, persuadent toujours mieux que les arguments, surtout en économie rurale, nous allons en citer.

Plusieurs fois, depuis six ans, j'ai visité le bel établissement de M. Payen, où se préparent, à Paris, les fourrages et les graines pour la nourriture des chevaux. Ces plantes mêlées, consistent assez généralement en trèfle, paille, luzerne, farouch, etc. Elle sont hachées de manière que le bétail est forcé de les broyer et d'en faire la mastication, comme si elles étaient mangées entières.

Le mélange des végétaux qu'on regarde comme le plus substantiel et le plus propre aux chevaux de trait, se compose de parties égales de bonne paille, de trèfle et de foin ordinaire. On croit encore que l'avoine et

[ocr errors]

l'orge, concassées et prises ensemble, font plus d'effet que mangées chacune en particulier.

J'ai examiné les chevaux de M. Payen, et, quoique nourris par la nouvelle méthode, jepuis affirmer qu'ils étaient beaux et vigoureux, malgré un travail de dix à douze heures chaque jour, pour mettre en activité les manéges employés dans cette vaste usine pour la préparation des fourrages.

J'ai vụ également, à Orléans, en 1825, les atelages d'un entrepreneur de voitures publiques (M. Sevin ); les chevaux dont il se servait étaient spécialement nourris de bonne paille hachée, mêlée d'environ un cinquième de trèfle ou de luzerne, et parfois d'un peu de foin. Ces animaux, ainsi nourris, étaient, comme ceux de M. Payen, gras, vigoureux et à toute épreuve ; on leur donnait aussi de l'orge ou de l'avoine concassée, préalablement mouillée.

Les fourrages hachés sont offerts au bétail dans des mangeoires assez profondes pour qu'il n'en perde pas, Souvent on mêle l'avoine à ces fourrages, surtout dans la dernière portion que les chevaux en prennent avant le travail. L'un et l'autre de ces entrepreneurs m'assurèrent qu'il y avait un cinquième d'économie, au moins, à nourrir leurs chevaux par cette méthode, et que ces animaux se portaient mieux et duraient plus long-temps au travail que ceux qui mangent les fourrages sans préparation.

Enfin, Messieurs, l'administration d'une des entreprises les plus colossales qu'on ait peut-être jamais vue à Paris, celle dite des Omnibus, vient aussi d'adopter, en juin dernier, ce nouveau genre d'alimentation pour nourrir les cinq à six cents chevaux employés journellement à cette vaste entreprise.

Si je ne craignais d'abuser de vos moments, je citerais d'autres exemples pris dans les journaux régni

coles et étrangers, sur l'avantage des fourrages choisis et hachés, mêlés aux racines azotées, pour la nourriture et l'engrais des animaux; mais je dirai seulement, d'après MM. Cordier et Walter Scott, que le turneps, ou gros navet de Suède, paraît le mieux convenir à cet égard, surtout étant mêlé aux plantes à tiges culmifères, coupées menu, etc. (1),

(1) M. Cordier est l'auteur d'un bon traité sur l'agriculture flamande, dans lequel on trouve les renseignements les plus précieux concernant l'alimentation du bétail par les nouvelles méthodes, et encore sur l'engraissement des animaux destinés à la boucherie.

Walter Scott traite spécialement de l'engrai des animaux par l'emploi des racines végéto-animales ( turneps, rutabagas, raves, etc.), mêlées à la balle de blé, d'avoine, ou à des plantes culmifères hachées. (Voir le 8e cahier des Annales scientifiques de l'agriculture française, 1829.) Dans son ouvrage, Walter Scott ne balance pas à dire que le turneps, les de terre et la soupe pommes blanche, sont les principales causes auxquelles l'Angleterre doit ses belles races de bestiaux, même ses beaux moutons à laine fine. C'est encore par ce genre d'alimentation que les Irlandais engraissent ces monstrueux bœufs, pour la boucherie et pour les salaisons, dont le poids dépasse souvent d'un tiers ceux de France. Cette méthode est également suivie dans le Brabant hollandais, dans les -États-Unis de l'Amérique, etc.

On appelle soupe blanche un mélange de grosse farine d'orge, de seigle ou de fèves, de pain d'huile en poudre, de sel et d'eau. Voici la composition de cette prétendue soupe :

Prenez un seau d'eau (12 litres), une livre (ou 16 onces) d'une des farines qu'on vient de citer, 8 onces de marc de graine huileuse, et a cuillerées de sel. On délaye bien le tout ensemble, en agitant le mélange pendant cinq à six minutes. Cette dose est pour un jour, pour un bœuf ordinaire : on la donne tiède, spécialement en hiver; à cet effet on la prépare la veille, dans l'étable où les animaux sont mis

En définitif, on peut résumer par ce peu de mots tous les avantages de ces méthodes sur l'ancienne :

« Economie de fourrages surcroît de bétail dans <«<les fermes, plus d'animaux à l'engrais pour la bou«cherie, et enfin plus de fumier pour l'amendement a des terres »

Je ne charge point de tableau, Messieurs : je le présente tel qu'on le voit chez les nations voisines et dans quelques parties de la France; mais il est bien à désirer que ces nouvelles pratiques s'introduisent dans les départements de l'ouest du royaume, où elles n'existent pas ou sont peu connues surtout dans le populeux et riche département de la Seine-Inférieure.

[ocr errors]

Je termine ce discours par de courtes observations concernant les machines à battre le blé, et sur les villiotes ou moyettes employées à la récolte des plantes fromentacées.

Machines à battre le blé.

Ce n'est guère que depuis douze à quinze ans que ces machines se sont multipliées en France; mais on voit à regret qu'elles n'ont pas encore atteint tout le dégré de perfection dont on les croit susceptibles; c'est, du moins, ce qui résulte d'un long rapport imprimé, en 1827, dans les deux volumes publiés par la société royale et centrale d'agriculture du département de la Seine, ouvrage dans lequel les défauts de ces machines sont signalés avec impartialité et discernement. Néanmoins il appert de ce rapport que ces machines à battre les grains ont déjà un avantage bien marqué sur le fléau et sur le piétinement des animaux, pour extraire

à l'engrais. On conçoit qu'on peut rendre ce mélange plus nutritif en augmentant la dose de farine.

« PrécédentContinuer »