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BIBLIOTHEQUE
DES ROMANS,

Dans laquelle on donne l'analyse raisonnée des
Romans anciens et modernes, français, et traduits
dans notre langue, avec des Anecdotes, des
Notices historiques et critiques concernant leurs
auteurs ou leurs ouvrages, ainsi que les mœurs,
les usages du tems, les circonstances particulières
et relatives; enfin, les personnages connus, déguisés
et emblématiques.

Par une Société de gens de lettres.

CINQUIEME ANNÉE.

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Saint-André-des-Arcs, No 16.

AN XI.--1803.

#4717

Lit 2020.2

HARVAT

JUL 26 1895
LIBRARY

Minot fund.

SIGRIDE,

. OU L'AMOUR, RÉCOMPENSE DE LA VALEUR.

Imité du danois de P. FRÉDÉRIC SUHΜ.

SIGRIDE est le premier roman qu'ait écrit M. Suhm: il le composa en 1771, et le donna au public, sans nom d'auteur, dans le dixième cahier d'un ouvrage publié à Copenhague, sous le titre d'Essai sur les Lettres et les Sciences. La société des Belles-Lettres de cette ville, le couronna; et il obtint également l'aprobation des gens du monde, et celle des savans: on parla même long-tems, dans tous les cercles, de l'auteur de Sigride, sans le connaître. Ce roman se trouve, aujourd'hui, dans la seconde partie des œuvres de Suhm. Le sujet, et la plupart même des détails, sont histoLe d. Kans, V. ANNÉE. T. XVI.

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riques. On peut consulter, entr'autres, l'Histoire de Danemarck, par Saxon, le grammairien, livre VII, pag. 125 et suivantes.

DANS: la Zélande, régnait jadis le roi Syvalde, plus fameux par ses ancêtres que par ses actions. Il lui avait fallu, dans sa jeunesse, conquérir sa couronne les armes à la main; mais, depuis cette époque, il vivait, contre l'esprit de son siècle, dans le sein du repos, uniquement occupé du bonheur de son peuple et de l'éducation de sa fille chérie. Sigride était digne, en effet, par sa conduite et ses vertus, de toute la tendresse de son père. La nature lui avait accordé la beauté; et la douceur, la modestie, l'aimable pudeur, prétaient encore à ses charmes un nouvel éclat.

La pudeur était alors, il est vrai, à peine une vertu; du moins, personne ne songeait à s'en faire un mérite, car toutes les femmes étaient pudiques. On n'avait pas encore inventé de mot pour exprimer l'effronterie, une heureuse ignorance du monde et de ses arts corrupteurs, rendait le beau sexe plus vertueux que ne peuvent le faire aujourd'hui toutes nos sciences, tous nos livres, toute notre morale et notre philosophie. On était vertueuse, on était modeste, parce qu'on n'imaginait pas qu'une fille pût être autrement; et une chasteté rigoureuse, avant et après l'hymen prouvait que les femmes regardaient l'amour comme une chose sérieuse, et que le vice ne savait pas encore se cacher sous les dehors de la vertu.

Mais Sigride était de plus aimable et douce, chose rare alors, et qui l'élevait au-dessus de ce siècle sauvage. Le jugement droit, le caractère pacifique de son père, et ses sages conseils, lui avaient inspiré une douceur, une bonté qui éclataient dans tous ses traits, et auxquelles sa pudeur modeste donnait encore un nouveau prix.

Elle comptait alors seize printems, et son père, le cœur partagé entre la joie et l'inquiétude, voyait aprocher l'époque où les jeunes prétendans avaient coutume de se rassembler près des dé

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