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Critique de Bouvy


Dès mon enfance, observant le monde adulte qui m'entourait, fin des années soixante et début soixante-dix, je trouvais que la société était inégalitaire. Petits garçons, le vendredi après-midi, nous étions séparés des filles (dans les petits villages de la campagne belge, l'enseignement en était aux balbutiements de la mixité) pour faire du bricolage tandis que ces dernières était cantonnées à la couture. Deuxième d'une nombreuse fratrie (7 garçons et une fille, heureusement pour elle, la septième) je trouvais injuste cette séparation des genres et ce destin forcé que déjà on nous imposait. Peut-être pour échapper au trop plein de masculinité familiale, c'était toujours en compagnie des filles que je passais mon temps. L'adolescence m'apporta d'autres émois et découvertes et c'est vers les jeunes femmes libres et indépendantes que j'étais attiré. Le jour où j'ai rencontré mon épouse, assez tard (31 ans), je n'avais pratiquement pas d'amis masculins mais presqu'uniquement des amies féminines. J'avoue qu'au début de ma vie de couple, ce n'était pas simple à gérer, ni pour mon épouse ni pour moi. Bizarrement, c'est un métier d'apparence viril que j'ai choisi d'exercer, la ferronnerie d'art, la forge. Mais sous son apparence rude et physique, ce métier est un métier d'art dans lequel, derrière le geste qui semble viril, c'est la part de féminité qui sommeille en vous qu'il faut laisser s'exprimer pour s'épanouir dans cette profession que je commence avec bonheur à voir se féminiser. J'eu la chance de faire des rencontres heureuses. Je crois que depuis ma plus tendre enfance je suis dans un état amoureux perpétuel. Que se soit un simple baiser ou une nuit torride, j'ai toujours éprouvé beaucoup de sentiment pour toutes ces femmes qui ont enrichi ma vie, qui m'ont appris à être à l'écoute du corps de l'autre, à être attentif à leur plaisir, à goûter le suave et partager le côté ludique de l'amour. De toute ces belles personnes que j'ai rencontré et de mon épouse en particulier, je reste amoureux, ce qui fait sans doute de moi un polygame fidèle. J'ai tenté d'éduquer mes filles (je n'ai pas eu de garçon et j'en suis fort aise) pour qu'elles soient libres, indépendantes, qu'elles soient rebelles au patriarcat, pour que ce soit elles qui décident de leur plaisir et que surtout, elles n'aient jamais de compte à rendre à personne. Je me rappelle les débats passionnés avec mon père, qui, nourri de préjugés judéo-chrétiens, de préjugés sur la supériorité des « mecs » sur les « nanas », tentait de m'expliquer qu'avec les idées que je défendais sur la liberté des femmes et de ce qu'elle peuvent ou veulent faire de leur corps, que j'était trop (je cite) con pour refaire le monde. Je tentais de lui expliquer le ridicule d'une société patriarcale et patronyme, je prenais la défense des mères célibataires, des femmes forgerons ou militaires. Il me présentait Eve, créée à partir de la côte d'Adam et coupable d'avoir perverti son homme à croquer le fruit défendu et je lui opposais le mythe de Lilith, qui au-delà de sa réputation de succube est la femme créée dans la même glaise qu'Adam donc l'égale de l'homme. La femme qui revendiquait le droit d'être aussi au-dessus de l'homme et pas forcément en-dessous, la femme qui revendiquait le droit de choisir quand et où elle voulait bien. La femme qui a tenu tête à Dieu et qui de son propre chef, pour sauvegarder son indépendance quitta l'Eden. (Évidemment, ce n'est qu'une légende, vive la laïcité). Enfin, la femme dans toute sa splendeur, épanouie, combattante, expurgée de tous les préjugés d'une société qui même laïque, est fondée sur les scories des religions monothéistes et condamne le plaisir de la chair, surtout celui de la femme, qu'elle juge anecdotique, voir inutile surtout pour la reproduction.

A quoi donc peut bien servir toutes ces confidences, me direz-vous ? Alors, tu la balances ta critique ! Mais oui, depuis le début de ce texte. Ce livre est formidable. Enfin, nous nous intéressons au plaisir féminin. Qu'il soit solitaire, hétéro ou lesbien, oui, il est essentiel pour l'épanouissement de toute la société. Les dernières découvertes concernant le désir féminin risque de remettre en cause bon nombre de théories sur l'évolution. Elles pourraient aussi remettre en cause la structure actuelle de nos sociétés occidentales, basée sur la monogamie, la fidélité absolue, la famille, le sens de la propriété. J'adore la perspective d'imaginer une nouvelle société bâtie sur le plaisir de toutes et tous, de la liberté sexuelle des femmes. J'ai envie de crier vive la révolution du clitoris. Il est sans doute trop tard pour notre génération de la vivre ou même simplement la fomenter mais grâce à des ouvrages comme celui-ci, qui balaient les préjugés, qui ouvrent les portes du pouvoir du plaisir féminin, qui révèlent l'importance sociale de celui-ci, nous pouvons simplement préparer le terrain pour les générations à venir. Grâce à la connaissance du corps, l'apprentissage du plaisir, peut-être qu'enfin, nous verrons la création d'une société véritablement libre, égalitaire et fraternelle.

Voilà donc un ouvrage formidable, qui devrait être présent dans toutes les bibliothèques scolaires. Éduquons les garçons à être moins cons et les filles à être libre de leur corps pour qu'enfin, le monde ne soit que bonheur et épanouissement.
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