AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de jullius


Un livre à mettre entre toutes les mains, et notamment celles des plus jeunes (enfin… pas trop jeune quand même).

Dans la lignée des excellentes histoires populaires qui voient le jour depuis quelques années (H. Zinn sur l'Amérique, C Conner sur la science, C Harmann sur l'humanité), Noiriel livre une relecture du roman national qui, pour poursuivre avec cette idée de roman, nous fait passer de la princesse de Clèves à Germinal.
Non pas pour nous faire mieux pleurer, mais parce que l'histoire des France n'a de sens que si elle parle de l'histoire des Français (de mêmes que le siècle de Louis XIV s'éclairait « soudain » d'un nouveau jour sous l'excellente plume de Pierre Goubert dans Louis XIV et vingt millions de Français).
Et, comme chaque fois que l'histoire analyse des faits historiques significatifs et leurs ressorts, elle est aussi une brillante sociologie autant que science du politique (au sens de l'étude des mécanismes du vivre en communauté/société, et non du seul pouvoir institutionnel) et, encore, géographie humaine.
Elle est même, dans le cas de la France, pays impérialiste s'il en est, histoire du monde.
Résumer cette somme n'aurait aucun sens (outre que je ne vois aucun intérêt aux résumés de livre sur Babelio). En revanche, je crois fermement que le bouquin de Noiriel est sans doute l'un des meilleurs actuellement disponibles pour comprendre l'état actuel de notre pays et nombre des sujets qui le traversent et le déchirent.

Le comprendre, non seulement : s'en faire une idée juste aussi ! Car Noiriel est engagé, il a raison de l'être. Que nous raconte l'histoire de notre pays, pour qui veut bien la lire comme il faut ? Oui : si chacun pense savoir comment il la faut lire, toutes les lectures, et donc tous les récits dont elles accouchent, ne se valent pas ! Car l'enjeu est celui du vivre ensemble, question elle-même intimement liée à la justice sociale.
Aussi faut-il comprendre comment l'État a réussi à imposer sa marque au peuple et comment, dans ce cadre, les luttes entre les catégories sociales (et à l'intérieur de celles-ci) se sont développées ; en métropole, dans les colonies, dans les ateliers de la proto-industrialisation, dans les tranchées de la Grande Guerre ou les usines des années 1930…
Il s'agit de comprendre comment les dominants ont su dominer, de mettre à jour les processus de ce rapport social, ses vecteurs (crises économiques, pression fiscales ou démographiques), et ses moments de tension. Et de saluer, aussi, les tentatives de renversement des pouvoirs ou groupes de domination dont ces siècles sont la scène : paysans écrasés par la pression fiscale sous l'ancien régime puis ouvriers broyés dans les grandes industrie ; sans culotte de l'ère révolutionnaire ; femmes de tous âges luttant pour leur émancipation politique, colonisés puis immigrés…

Mettre en lumière les jeux de rapport de pouvoir dans l'histoire longue des luttes (le temps long des mouvements populaires, des révoltes, des émotions), éclaire le passé et le présent. Noiriel est aussi un instructeur d'éducation civique. Il nous donne les armes de la formation d'un esprit critique qui devrait être la base de la formation citoyenne ; à cet égard son travail sur les mots et leur emploi, sur les faux semblants, les manipulations sémantiques est tout aussi profitable que nombre d'histoires vécues qu'il rapporte qui viennent donner sens à l'Histoire.
Commenter  J’apprécie          82



Ont apprécié cette critique (7)voir plus




{* *}